FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 43238  de  M.   Accoyer Bernard ( Rassemblement pour la République - Haute-Savoie ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  13/03/2000  page :  1588
Réponse publiée au JO le :  18/12/2000  page :  7196
Rubrique :  famille
Tête d'analyse :  adoption
Analyse :  couples homosexuels
Texte de la QUESTION : M. Bernard Accoyer signale à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, la récente décision du tribunal administratif de Besançon annulant le refus d'agrément par le conseil général du Jura, en vue de l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel. Le conseil général du Jura avait justifié son refus par « l'absence d'image ou de référent paternel susceptible de favoriser le développement harmonieux d'un enfant adopté ». Le commissaire du Gouvernement avait lui aussi préconisé le refus, en se référant à une jurisprudence constante établie dans l'intérêt de l'enfant selon laquelle « le modèle de l'altérité sexuelle et la référence à un couple différencié sont utiles à son développement ». Le commissaire du Gouvernement notait également que la loi dite bioéthique du 29 juillet 1994 réserve aux couples composés d'un homme et d'une femme le bénéfice des techniques de procréation médicalement assistée. La question de l'homoparentalité avait été évoquée lors des débats sur le PACS, en particulier ce type de décision autorisant l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel. Le garde des sceaux avait alors répondu aux inquiétudes légitimes des parlementaires que cette hypothèse était irréaliste, laissant entendre que le Gouvernement était opposé au droit d'adoption pour les couples homosexuels, tout en refusant fermement de l'inscrire dans la loi. Aujourd'hui, le Gouvernement se trouve face à ses responsabilités. C'est pourquoi il lui demande si le Gouvernement entend prendre des mesures pour interrompre cette évolution jurisprudentielle, dont on peut penser qu'elle n'apporte pas le cadre idéal à l'intérêt de l'enfant.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'adoption n'est autorisée en droit français que dans deux situations précisément définies dans le code civil : soit l'adoption est demandée par les deux époux voulant adopter ensemble un enfant ; l'enfant aura alors un lien de filiation adoptive à l'égard des deux requérants ; soit l'adoption est demandée par une seule personne, qu'elle soit célibataire, veuve ou mariée (le consentement de son conjoint sera alors requis) ; le code civil ne pose aucune autre condition sur ses choix de vie ; dans ce cas, l'enfant n'aura de filiation adoptive qu'avec cette personne. Ainsi, des concubins, qu'ils soient hétéro ou homosexuels, ne peuvent adopter ensemble un enfant. La décision du tribunal administratif de Besançon auquel l'auteur de la question fait référence ne concerne pas les conditions énoncées ci-dessus mais l'agrément administratif, phase préalable de la procédure judiciaire d'adoption. Cet agrément est destiné à s'assurer, dans l'intérêt de l'enfant, de la capacité éducative et d'accueil des candidats à l'adoption. Dans le jugement évoqué, le tribunal a estimé que cette appréciation concernant une candidate vivant avec une personne de même sexe était erronée en droit et en fait. Toutefois, dans deux espèces comparables (CE 9 octobre 1996 département de Paris C/M. Frette et CE 12 février 1997 Mme Parodi et M. Bettan), le Conseil d'Etat a adopté une position contraire et confirmé la légalité du refus d'agrément. En tout état de cause, l'agrément ne préjuge pas la décision qui sera prise ultérieurement par le tribunal de grande instance et qui a pour seul critère l'intérêt de l'enfant qu'il appartient au juge d'apprécier souverainement. Il n'est donc pas possible d'en déduire des conséquences générales sur les conditions posées pour adopter un enfant. En outre, le pacte civil de solidarité n'a aucune incidence sur la filiation et l'état des personnes et n'a donc eu, en aucun cas, pour effet de modifier le droit régissant l'adoption. Il n'a pour objet que de fournir un cadre légal permettant à un couple d'organiser sa vie commune. La garde des sceaux a constamment réaffirmé lors des débats sur le pacte civil de solidarité que le Gouvernement ne proposera pas une modification de la législation pour permettre à deux personnes de même sexe d'adopter ensemble un enfant. Celui-ci a besoin, pour la construction de son identité physique, sociale et relationnelle, d'avoir en face de lui au cours de son enfance et de son adolescence, un père et une mère.
RPR 11 REP_PUB Rhône-Alpes O