Texte de la QUESTION :
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M. Guy Lengagne appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation au Zimbabwe. Les 12 et 13 février derniers, 54,6 % des Zimbabwéens répondaient non au référendum constitutionnel organisé par le président Robert Mugabe, établi depuis l'indépendance du pays en 1980, afin de consolider ses pouvoirs présidentiels. Cette opposition massive a marqué une sanction importante du principal dirigeant et de son parti, la ZANU-PF, d'autant que le parlement zimbabwéen a été dissous le 11 avril dernier à l'issu de cinq ans de législature et que de nouvelles élections législatives devraient avoir lieu très prochainement. Cet affaiblissement de la position de Mugabe s'ajoute à celui lié à la dégradation de la situation économique globale. Tous les indicateurs sont aujourd'hui en effet dans le rouge : taux d'inflation à 57 %, taux d'intérêt à 50 %, pénurie de pétrole... Dans ces circonstances, le président a décidé, afin de tenter de conserver le pouvoir pour les échéances à venir et afin de détourner la colère d'une population noire paupérisée à l'extrême, de lancer les anciens combattants de la guerre d'indépendance à l'assaut des propriétés des quelques 4 500 fermiers blancs. Ces derniers représentent à l'heure actuelle moins de 1 % de la population et détiennent plus de 70 % des terres arables. L'Union européenne, sous l'impulsion de la Grande-Bretagne, souhaiterait aujourd'hui faire pression sur le président Mugabe pour que cessent ces expulsions et craint une escalade de la violence dans le pays. Il lui demande donc quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet.
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Texte de la REPONSE :
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Le Zimbabwe traverse une triple crise économique, sociale et politique. Au pouvoir depuis vingt ans, le parti présidentiel ZANU-PF a subi son premier revers en février lors du rejet par référendum du projet de nouvelle Constitution (55 % de non, 26 % de participation). C'est cependant le scrutin législatif des 24 et 25 juin 2000 qui constitue l'enjeu politique majeur. Robert Mugabe a fait de l'inégale répartition des terres agricoles (4 200 grands fermiers, « blancs » pour la plupart, détiennent 60 % des meilleures terres arables) le thème mobilisateur des populations rurales et des vétérans de la guerre de libération qui constituent sa base politique. Après avoir échoué à le faire inscrire dans la Constitution, il a fait adopter, le 6 avril par le Parlement sortant, un amendement autorisant le Gouvernement à confisquer les terres de grands domaines agricoles - pour les redistribuer aux petits fermiers noirs dans le cadre d'une réforme agraire relancée en novembre 1997 après dix-sept ans d'inaction - en faisant porter à Londres la charge de leur indemnisation. Fin février, un mouvement d'occupations illégales de plus d'un millier de propriétés s'est traduit par le décès de plus de vingt personnes. Face à cette stratégie de la tension, l'opposition s'efforce de ne pas surenchérir. Elle a renoncé à boycotter le scrutin mais a déposé un recours devant la Haute Cour pour protester contre les manipulations du pouvoir et les violences politiques. A l'initiative de la Grande-Bretagne - qui possède d'importants intérêts au Zimbabwe, où se trouvent environ 20 000 de ses ressortissants - l'Union européenne a exprimé ses vives préoccupations à l'égard de la dégradation du climat politique au Zimbabwe et sa condamnation de la violence et des atteintes répétées à l'état de droit. La France s'est naturellement associée à toutes ces démarches. Elle se félicite de la reprise de la concertation entre les différentes parties, tant à l'intérieur du pays qu'entre Harare et ses partenaires extérieurs. De même, elle accueille favorablement la perspective de voir le PNUD chargé de « dépolitiser » le dossier foncier au zimbabwe en s'attachant à résoudre le problème central du rachat des terres, dans l'esprit de transparence, de légalité et de rationalité qui avait prévalu lors de la Conférence internationale d'Harare en septembre 1998. Des personnalités françaises participeront à une mission européenne d'observation électorale, acceptée par le président Mugabe. La France souhaite que ces observateurs européens, qui devraient être renforcés par la présence d'autres missions de même type (SADC, Commonwealth, Etats-Unis, etc.), puissent se mettre rapidement en place et soient en nombre suffisant pour limiter les excès à même de dénaturer les résultats du scrutin.
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