Texte de la QUESTION :
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A la suite d'un rapport du haut comité de santé publique sur la santé en milieu carcéral, relatant les insuffisances et l'inadaptation des réponses apportées par l'administration pénitentiaire aux problèmes de santé publique soulevés par l'état sanitaire de la population carcérale, la loi du 18 janvier 1994 a transféré la prise en charge sanitaire des détenus au service public hospitalier. Si la mise en place de ces services médicaux constitue un progrès incontestable pour l'amélioration de la situation sanitaire des prisons, des difficultés subsistent encore pour l'amélioration sanitaire des prisons, des difficultés subsistent encore pour la distribution des médicaments mais aussi pour la mise en place de l'accueil des détenus dans les établissements de soins, en cas de consultations ou d'examens nécessitant le recours à un plateau technique. Face à cette situation qui reste préoccupante, Mme Odile Saugues attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, et lui demande de lui faire connaître ses intentions pour améliorer la prise en charge médicale des détenus et les conditions d'hygiène dans les prisons.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice informe l'honorable parlementaire qu'un premier bilan de mise en oeuvre des protocoles passés entre établissements hospitaliers et établissements publics en application de la loi du 18 janvier 1994 a été élaboré par le ministère de la santé et le ministère de la justice. Ce premier bilan national des conditions pratiques de la mise en oeuvre des protocoles a été réalisé au cours de l'année 1996, sur la base de synthèses régionales, pénitentiaires et sanitaires, débattues lors de réunions interrégionales auxquelles participaient les représentants concernés du ministère chargé de la santé et du ministère de la justice et des services déconcentrés. Ce bilan fait apparaître que l'ensemble des acteurs constatent une amélioration indéniable de la qualité des soins en milieu pénitentiaire, depuis la mise en oeuvre des protocoles. Les points suivants ont été notamment soulignés : visite médicale d'entrée réalisée systématiquement permettant d'établir en règle générale un réel bilan de santé (dans ce cadre, un recueil d'information standardisé sur l'état de santé des entrants est réalisé) ; renforcement notable des prestations de médecine générale, de soins infirmiers, de soins dentaires et développement des consultations spécialisées réalisables sur place (une enveloppe nationale de 393 MF, valeur 1994, a été ouverte pour financer le dispositif de soins en milieu pénitentiaire) ; permanence des soins pour les urgences effective dans l'ensemble des établissements (régulation des appels assurée le plus souvent par le service d'aide médicale urgente) ; les travaux d'aménagement des locaux destinés aux équipes hospitalières des unités de consultations et de soins ambulatoires et des services médico-psychologiques régionaux, retardés en raison du gel budgétaire intervenu en 1995, sont désormais achevés dans la quasi-totalité des établissements (coût 80 MF sur trois ans) ; cinquante-neuf des soixante-quinze postes de surveillants prévus au programme pluriannuel justice pour accompagner la création des unités de consultations et de soins ambulatoires et le renforcement des services médico-psychologiques régionaux ont été pourvus. Mais ce bilan révèle également des difficultés persistantes : l'amélioration de la qualité de l'offre de soins en prison entraîne une demande de soins accrue de la part des détenus, permettant d'identifier des besoins sanitaires supplémentaires, notamment dentaires ; d'une manière générale, des progrès sont encore nécessaires en matière de prévention et d'organisation de la continuité des soins ; l'articulation entre équipes hospitalières et pénitentiaires doit être renforcée afin d'améliorer la prise en charge globale de la personne détenue, dans un objectif de réinsertion. Dès à présent des moyens supplémentaires ont été dégagés par le ministère chargé de la santé pour renforcer les unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA), notamment en personnel. Les besoins principaux portent sur les postes de personnel infirmier, de chirurgien-dentiste et de secrétariat. Un budget complémentaire de 10,205 MF a été alloué en juillet dernier aux agences régionales d'hospitalisation afin de répondre aux besoins repérés par les directions régionales des affaires sanitaires et sociales. L'effort engagé pour répondre aux difficultés va être poursuivi et la priorité est mise sur les axes de travail suivants : promouvoir les actions de prévention et d'éducation pour la santé et organiser la poursuite des soins après la période d'incarcération. Un guide méthodologique pour la conduite d'actions en matière d'éducation pour la santé, en milieu carcéral, élaboré par le Comité français d'éducation pour la santé sera diffusé en 1998. La promotion de cet outil s'accompagnera de la mise en place de formations-actions sur une dizaine de sites pilotes ; développer la prise en charge médico-psychologique en milieu carcéral (renforcement des moyens en personnel, renforcement du partenariat entre les services médico-psychologiques régionaux, les secteurs de psychiatrie générale et les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile, ainsi que la coordination avec les équipes de soins somatiques) ; renforcer l'articulation entre équipes pénitentiaires et sanitaires ; mettre en place le schéma national d'hospitalisation des détenus : second volet de la réforme de l'organisation des soins en milieu pénitentiaire, l'objectif de ce schéma en cours d'élaboration est de concilier les impératifs de qualité des soins et de rationalisation des opérations de surveillance. Il est prévu qu'il repose, pour les hospitalisations d'urgence ou de courte durée : sur les établissements de santé de proximité ; pour les autres hospitalisations : sur huit pôles hospitaliers à vocation interrégionale (sept unités sécurisées hospitalières en centre hospitalier universitaire et l'établissement public de santé national de Fresnes (EPSNF), qui constituera en complémentarité avec l'Assistance publique-hôpitaux de Paris le huitième pôle à vocation interrégionale). En ce qui concerne la distribution des médicaments, le bilan national réalisé fait apparaître que dans la quasi-totalité des établissements pénitentiaires, elle est conforme à la nouvelle réglementation : distribution par du personnel infirmier et médicaments non dilués. Les difficultés persistantes portent essentiellement sur la distribution le week-end et les jours fériés. Le renforcement des moyens des UCSA, notamment en personnel infirmier, devrait permettre de les résoudre. De même, la possibilité ouverte par la réforme de laisser les détenus, capables de le faire, gérer eux-mêmes leur traitement est exploitée dans la plupart des établissements. Ces nouvelles modalités de distribution engendrent des risques de stockage et de trafic et nécessitent un renforcement de l'articulation entre services pénitentiaires et sanitaires afin de limiter ces risques. Des réflexions ont dès à présent été engagées afin de trouver des modes d'organisation répondant à cet objectif. Enfin, dans le cadre de la prise en charge des personnes toxicomanes, un traitement de substitution (méthadone et subutex) peut désormais être poursuivi ou initié en détention. Une réflexion spécifique doit être menée sur les modalités de mise en oeuvre de cette disposition. La prescription des médicaments est de la seule responsabilité du médecin, en revanche les modalités de distribution des médicaments, qui peuvent avoir des conséquences sur la sécurité, nécessitent une articulation entre sanitaire et pénitentiaire. On assiste par ailleurs à une augmentation des besoins en consultations et en examens spécialisés pour répondre à des pathologies de plus en plus lourdes. C'est le ministère de la justice qui a en charge la garde et l'escorte des détenus lors des examens ou consultations médicales qui se déroulent à l'hôpital. Une réflexion doit être menée, dans le cadre de l'accompagnement de la réforme du dispositif de soins en milieu carcéral, pour améliorer les conditions d'accueil et de garde des détenus lors de ces consultations, notamment afin de concilier impératifs de sécurité et respect de la confidentialité du colloque singulier médecin-malade. Lorsqu'il s'agit d'hospitalisations, l'escorte et la garde des détenus sont alors à la charge des forces de l'ordre. L'élaboration du schéma national d'hospitalisation permettra de rationaliser cette surveillance. En ce qui concerne l'amélioration des conditions d'hygiène dans les prisons, un effort important de rénovation du parc pénitentiaire a été engagé par l'administration pénitentiaire. Ce programme comprend notamment la rénovation des sanitaires (douches et WC). Cet effort doit être poursuivi. Parallèlement, le projet de décret modifiant le code de procédure pénale et relatif à l'organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires, actuellement en cours de signature, prévoit que les détenus doivent pouvoir se doucher au moins trois fois par semaine. De même, dans le cadre du projet de construction de nouveaux établissements pénitentiaires, le principe de la douche en cellule est envisagé. Enfin dans le cadre de la lutte contre les maladies transmissibles et de la mise en oeuvre de la circulaire santé-justice du 5 décembre 1996, relative à la lutte contre le VIH en milieu carcéral, de l'eau de Javel à 12 ° chlorométrique va être distribuée gratuitement aux détenus.
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