Texte de la QUESTION :
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M. Jacky Darne attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation politique particulièrement préoccupante au Zimbabwe. Amnesty International a saisi l'occasion du 20e anniversaire de l'indépendance du Zimbabwe pour adresser une lettre ouverte à Robert Mugabe, Président en exercice. Dans ce courrier, l'organisation de défense des droits de l'homme dénonce les violences politiques dont sont victimes les opposants à Robert Mugabe et à la ZANU-PF. Ces faits sont concomitants d'un regain de tension dans le dossier de la réforme agraire. Des paysans sans terres, dirigés par des « vétérans », occupent plusieurs propriétés agricoles. Or, ces occupations ont récemment été encouragées par le Président Mugabe, alors même qu'elles sont jugées illégales par les tribunaux zimbabwéens. Enfin, à l'issue des élections législatives des 24 et 25 juin, qui ont été l'occasion pour l'opposition de faire une percée remarquable, le chef de la mission d'observation de l'Union européenne a affirmé que ces opérations électorales n'étaient ni libres ni équitables. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer sa position dans ce dossier, ainsi que les actions que le Gouvernement entend prendre dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union européenne.
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Texte de la REPONSE :
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Les cinquièmes élections législatives que le Zimbabwe a connues depuis son indépendance se sont déroulées dans un calme relatif les 24 et 25 juin 2000, au terme d'une campagne électorale qui s'est déroulée dans un climat tendu et marquée par un certain nombre de violences largement imputables au parti présidentiel, la ZNAU-PF. Ces violences ont surtout touché l'opposition et les exploitants agricoles appartenant à la communauté blanche, dont les propriétés ont été illégalement occupées par des anciens combattants de la guerre d'indépendance. Il s'agissait, pour le pouvoir, de remobiliser sa base rurale en forçant la réalisation d'une réforme agraire. Cette stratégie a causé la mort de 33 personnes, ravivé les clivages ethniques, aggravé la crise économique, porté atteinte à l'état de droit et faussé la compétition électorale. Face à cette situation préoccupante, la France a réagi. Conjointement avec les pays de l'Union européenne, elle est intervenue à plusieurs reprises auprès du gouvernement zimbabwéen pour exprimer ses vives préoccupations à l'égard de la dégradation du climat politique, pour dénoncer l'usage de la violence, appeler au respect du droit et condamner l'amendement constitutionnel, qui a autorisé la confiscation de certaines terres sans indemnisation pour la propriété du sol. Des représentants des deux assemblées françaises ont également pris part à la mission européenne d'observation des élections, dont la présence sur le terrain a contribué à l'apaisement des tensions et a favorisé l'expression de la volonté populaire. Globalement acceptés par tous, les résultats, qui se traduisent par une courte victoire de la ZANU-PF, ont marqué une étape dans l'affermissement de la jeune démocratie zimbabwéenne. Ils ont également consacré l'émergence d'une opposition parlementaire d'envergure nationale (près de la moitié des sièges éligibles) issue des syndicats et de la société civile, regroupée autour du Mouvement pour le changements démocratique (MDC). Si, au prix d'atteintes, graves mais ponctuelles, aux droits de l'homme, le Zimbabwe et l'Afrique australe ont évité l'extension d'un nouveau foyer d'instabilité, les problèmes de fond demeurent, en particulier le redressement économique et le traitement ordonné de l'inégalité foncière. Le nouveau gouvernement devra convaincre la population et les bailleurs de fonds de sa détermination et de ses capacités à redresser la situation dans le respect du droit et des règles démocratiques. Le Zimbabwe est dans l'attente de la reprise d'une vie politique plus normale, avec des institutions rénovées. Il attend également des décisions économiques difficiles (réforme agraire, réduction du déficit budgétaire, dévaluation, contrôles des prix), et l'indispensable reprise de l'aide internationale. Tout en restant vigilante face à une conjoncture incertaine, la France, à titre national aussi bien qu'en tant que présidente de l'Union européenne, entend veiller à ce que ce pays aux réelles potentialités ne s'enfonce pas davantage dans la crise et n'accroisse l'instabilité régionale.
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