FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 495  de  Mme   Perrin-Gaillard Geneviève ( Socialiste - Deux-Sèvres ) QOSD
Ministère interrogé :  santé et action sociale
Ministère attributaire :  santé et action sociale
Question publiée au JO le :  23/11/1998  page :  6314
Réponse publiée au JO le :  25/11/1998  page :  9402
Rubrique :  mort
Tête d'analyse :  suicide
Analyse :  lutte et prévention
Texte de la QUESTION : Mme Geneviève Perrin-Gaillard attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur le problème du suicide mis en exergue par l'observatoire régional de la santé Poitou-Charentes. Le suicide constitue un sérieux problème de santé publique, tant par les pertes en vies humaines qu'il provoque que par les problèmes psychologiques et sociaux dont il témoigne. La région Poitou-Charentes est à ce titre caractéristique. Elle présente une surmortalité par suicide de 17 % pour les hommes et de 7 % pour les femmes par rapport à la moyenne nationale. Plus inquiétant encore, et bien que la mortalité par suicide soit trois fois plus élevée chez les hommes que chez les femmes, le taux de mortalité par suicide pour la classe d'âge des femmes de quinze à trente-cinq ans est passée de 5,4 à 9,8, soit une augmentation de 45 %. Au total, la mortalité par suicide est plus importante que celle par accident de la circulation, au plan régional comme au plan national. La Conférence nationale de santé de 1996 avait fait de la prévention du suicide l'une de ses dix priorités. Elle lui demande ce que compte faire le Gouvernement dans le cadre de sa politique de santé publique pour prévenir le nombre de suicides.
Texte de la REPONSE : M. le président. Mme Geneviève Perrin-Gaillard a présenté une question, n° 495, ainsi rédigée:
«Mme Geneviève Perrin-Gaillard attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur le problème du suicide mis en exergue par l'observatoire régional de la santé Poitou-Charentes. Le suicide constitue un sérieux problème de santé publique, tant par les pertes en vies humaines qu'il provoque que par les problèmes psychologiques et sociaux dont il témoigne. La région Poitou-Charentes est à ce titre caractéristique. Elle présente une surmortalité par suicide de 17 % pour les hommes et de 7 % pour les femmes par rapport à la moyenne nationale. Plus inquiétant encore, et bien que la mortalité par suicide soit trois fois plus élevée chez les hommes que chez les femmes, le taux de mortalité par suicide pour la classe d'âge des femmes de quinze à trente-cinq ans est passée de 5,4 à 9,8, soit une augmentation de 45 %. Au total, la mortalité par suicide est plus importante que celle par accident de la circulation, au plan régional comme au plan national. La Conférence nationale de santé de 1996 avait fait de la prévention du suicide l'une de ses dix priorités. Elle lui demande ce que compte faire le Gouvernement dans le cadre de sa politique de santé publique pour prévenir le nombre de suicides.»
La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard, pour exposer sa question.
Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Monsieur le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, je souhaite attirer votre attention sur le problème du suicide mis en exergue par l'observatoire régional de la santé Poitou-Charentes.
Nous le savons tous, le suicide constitue un sérieux problème de santé publique, tant par les pertes en vies humaines qu'il provoque que par les problèmes psychologiques et sociaux dont il témoigne. La région Poitou-Charentes est à ce titre caractéristique. Elle présente une surmortalité par suicide de 17 % pour les hommes et de 7 % pour les femmes par rapport à la moyenne nationale. Plus inquiétant encore, et bien que la mortalité par suicide soit trois fois plus élevée chez les hommes que chez les femmes, le taux de mortalité par suicide pour la classe d'âge des femmes de quinze à trente-cinq ans est passé de 5,4 à 9,8 %, soit une augmentation de 45 %. Au total, la mortalité par suicide est plus importante que celle par accident de la circulation.
La conférence nationale de santé de 1996 avait fait de la prévention du suicide l'une de ses dix priorités. Que compte faire le Gouvernement, dans le cadre de sa politique de santé publique, pour prévenir le nombre de suicides, au plan national, bien sûr, mais dans la région Poitou-Charentes aussi ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Madame la députée, le baromètre du Comité français d'éducation pour la santé, rendu public ce matin, confirme tristement vos propos. Le suicide est encore, dans notre pays, la première des causes de mortalité pour les jeunes adultes de vingt-cinq à trente-quatre ans, et la seconde pour les jeunes de quinze à vingt-quatre ans. On doit déplorer, hélas ! 12 000 suicides «réussis» par an.
Vous l'avez souligné, le thème du suicide a été identifié comme l'une des dix priorités de santé par les deux premières conférences nationales de santé. Dix régions particulièrement touchées, dont la vôtre, madame la députée, ont engagé des programmes spécifiques.
Sur le plan national, des actions programmées de prévention du suicide en direction des adolescents et des jeunes adultes seront menées pendant trois ans. Un comité de spécialistes, associant sociologues, intervenants sociaux et médecins, est en place au ministère et devrait me rendre ses recommandations avant la fin de l'année.
D'ores et déjà, nous avons voulu agir dans plusieurs directions. Tout d'abord, nous souhaitons développer l'approche globale en prenant en compte l'ensemble des dimensions de ce problème complexe de santé publique tant sur le plan de la prévention que de la prise en charge. Ensuite, nous nous employons à mettre en place un système de recueil de connaissances épidémiologiques, indispensable à la détermination des orientations stratégiques. Cela n'est pas simple. Il ne suffit pas, en effet, de déclarer, comme je l'ai fait, que nous voulons faire tomber le nombre des suicides en dessous de 10 000. Il faut très précisément s'adresser aux professionnels et considérer ce problème très vaste dans toutes ses dimensions. Ce matin, nous avons constaté, par exemple, que les familles les plus défavorisées, brisées ou restructurées, comme on dit, sont les plus atteintes. Cela signifie que la famille compte énormément en elle-même.
Plus encore, on s'aperçoit que 30 % des suicides «réussis» sont occasionnés par les armes à feu légères et les fusils de chasse qui se trouvent dans les maisons. Ainsi, il y a cinq fois plus de risques que le suicide soit réussi lorsqu'il y a une arme au foyer. Il est donc indispensable de développer, comme cela a été fait au Canada, et notamment au Québec, une politique d'information sur les armes à feu, en matière par exemple de rangement.
Nous essayons de mettre en place des actions de prévention, particulièrement au sein des dix régions plus spécialement engagées dans la réflexion, dont la région Poitou-Charentes.
L'ANAES est chargée d'élaborer un protocole d'accueil, de prise en charge et de projet de sortie des suicidants de l'hôpital. Car si les adolescents rencontrent maintenant dans la majorité des cas un psychiatre lorsqu'ils arrivent à l'hôpital, ils n'ont pas toujours l'occasion d'être pris en charge par des correspondants à leur sortie. C'est fort dommageable. De toute façon, lorsque des réseaux existent, ils ne sont pas suffisants.
L'objectif est donc d'assurer le suivi avec les médecins. Il faut les former pour qu'ils puissent prendre en charge à long terme dans les réseaux, non seulement les jeunes mais, également, leur famille. Pour l'heure, les psychiatres manquent.
Tel est le programme que nous mettons en place et grâce auquel, je l'espère, nous passerons, en trois ans, en dessous du seuil horrible de 10 000 morts «réussies» par an.
Je précise encore que la moitié des adolescents qui ont tenté de se suicider avait consulté un médecin dans la semaine qui précédait leur acte. Il y a donc un problème de formation médicale, puisque ces médecins n'ont pas été capables de les prendre en charge. Mais je sais que ce n'est pas facile. Quant à l'autre moitié, celle qui n'a pas consulté, il faut trouver les moyens de la diriger vers le système de soins.
SOC 11 REP_PUB Poitou-Charentes O