Texte de la QUESTION :
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M. Jean Charroppin attire l'attention de M. le ministre de la défense sur les graves inquiétudes que laissent planer les conditions de la réduction par deux du nombre de sous-marins nucléaires russes opérationnels entre 1989 et 1999. L'actualité a hélas rappelé combien le déclin et le désarmement forcés de la flotte sous-marine à propulsion nucléaire ou lanceurs d'engins de la CEI nécessitaient une réelle coopération internationale. En effet, les menaces pour l'environnement, notamment de l'Union européenne, se confirment chaque jour comme l'ont indiqué à plusieurs reprises un nombre important de responsables de la marine russe. Il lui demande donc de lui préciser les mesures envisagées afin de renforcer, dans la mesure du possible, la surveillance du parc de sous-marins nucléaires russes à l'abandon.
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Texte de la REPONSE :
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La péninsule de Kola constitue la zone la plus dense en réacteurs nucléaires de propulsion dans le monde. En effet, une centaine de bâtiments (sous-marins, croiseurs, brise-glaces à vocation civile) ainsi qu'une centaine de sous-marins réformés sont stationnés dans cette zone. La plupart d'entre eux disposant de deux systèmes de propulsion à bord (réacteurs à eau pressurisé), le nombre total de réacteurs nucléaires, qui se trouvent en attente de démantèlement, est d'environ deux cents. Seuls quelques réacteurs ont été déchargés de leur combustible usé. A la suite d'une étude menée par des experts russes et norvégiens, le rapport Yablokov, publié en 1995, a fait officiellement état d'immersion volontaire de déchets radioactifs dans les mers de Barents et de Kara, et dans certains cas, de systèmes complets de propulsion issus de la flotte militaire et des brise-glaces. La nature et le volume de ces déchets sont toutefois inconnus. En 1992 et 1993, des missions de surveillance conduites par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de Vienne ont montré que le niveau de radioactivité dans la zone était très bas, ce qui indique qu'aucun nouveau largage massif de radioéléments dans l'eau n'est actuellement observable. La gestion la plus sûre et la moins onéreuse pourrait consister à créer des structures de stockage (temporaires et définitives) de capacité suffisante à terre. Les déchets principalement constitués de combustible usé sont en effet actuellement laissés à bord des navires. De plus, le retraitement de ces combustibles ne devrait se faire que dans des installations adaptées et fonctionnant correctement. Pour faire face à cette situation, les Etats-Unis fournissent une aide financière au démantélement des armes nucléaires russes. Ainsi, un programme de coopération pour réduire la menace (Cooperative Threat Reduction ou programme de « Nunn-Lugar »), est mis en oeuvre par les départements américains de la défense et de l'énergie, ainsi que par le département d'Etat. Dans ce cadre, ont été conclus : un accord entre gouvernements destiné à définir une politique de protection, de contrôle et de comptabilité des matières nucléaires ; un accord plus direct entre le ministère américain de l'énergie (DOE) et un nouvel organisme de surveillance civil afin de mettre en oeuvre un contrôle des matières nucléaires. Un programme de collaboration entre laboratoires et équipes de recherche russes et américaines a par ailleurs été mis en oeuvre à partir de 1994. Les Etats-Unis ont également acheté 500 tonnes d'uranium hautement enrichi d'origine militaire, qui seront diluées en uranium faiblement enrichi par les Russes et qui serviront dans les réacteurs civils américains. En outre, les Américains participent au fonctionnement du Centre international de science et de technologie afin de fournir un emploi pacifique aux chercheurs et aux ingénieurs qui ont travaillé sur les armes de destruction massive dans les laboratoires du complexe militaro-industriel soviétique. Ce centre, situé à Moscou, a été fondé en 1994 par l'Union europénne (UE), le Japon, la Russie et les Etats-Unis. Enfin, les Etats-Unis vont financer la construction de deux complexes de déchargement et de traitement du combustible nucléaire retiré des sous-marins russes, qui seront situés sur la base de la 49e usine de réparation de sous-marins de Vilyuchinsk. S'agissant de l'Europe, il n'existe pas au titre de l'UE de programme de surveillance du parc de sous-marins nucléaires russes à l'abandon. En revanche, la Norvège, pays européen non membre de l'UE, coopère avec la Russie pour la surveillance et la mise en sécurité de la flotte russe à propulsion nucléaire. La Russie et la Norvège ont commencé en 1999 à concrétiser leur programme commun de nettoyage des déchets nucléaires de la presqu'île de Kola, où sont ancrés les sous-marins de la flotte russe du Nord. Trois stations norvégiennes surveillent la situation radioactive dans cette zone et sept autres stations seront mises en exploitation dans les prochaines années. Lors de la visite à Mourmansk du secrétaire d'Etat norvégien aux affaires étrangères, le 4 septembre 2000, la Norvège a remis officiellement du matériel destiné à sécuriser le brise-glase nucléaire russe Sovjetskij Sojuz. Cette contribution marque un premier pas vers la mise en sécurité de la flottee russe à propulsion nucléaire. L'accident du sous-marin Kursk et la relance de la coopération avec la Norvège qu'il semble entraîner, pourraient réactiver l'ensemble des projets en cours. La lutte contre la pollution nucléaire fait en effet l'objet d'une coopération suivie entre les deux pays. Dans ce cadre, un accord de coopération militaire a été signé en septembre 1996 entre les ministres de la défense norvégien, américain et russe afin de limiter la pollution nucléaire dans la région arctique. Cette coopération comprend en particulier : des échanges et le développement en commun de méthodes et de technologies pour résoudre les problèmes d'environnement dans le secteur de la défense ; des initiatives communes pour la surveillance de l'environnement dans les zones de défense ; la formation de personnel spécialisé dans la lutte contre la pollution nucléaire. Par ailleurs, les ministres de la défense norvégien et russe se sont accordés pour entreprendre une étude sur les sources de pollution radioactive dans les territoires du Nord et élaborer un plan pour faire face à cette menace. Enfin, un accord a également été signé entre la Norvège et la Russie pour l'aide humanitaire d'urgence dans la région euro-arctique de Barents.
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