Texte de la QUESTION :
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M. Michel Meylan attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la situation des agents qui utilisent volontairement, ou à la demande des collectivités publiques, leur véhicule personnel à l'occasion de leur service. Il souligne que cette pratique courante permet à la collectivité de réaliser des économies budgétaires tant en investissement qu'en fonctionnement. En cas de sinistre, d'accident, de vol ou autre, l'agent subira un préjudice : la perte ou la détérioration du véhicule, une franchise, un malus, voire une résiliation de son contrat d'assurance ou une déchéance de garantie de son assureur pour défaut de déclaration de clause d'usage adéquate. En cas de sinistre, et en l'absence d'indemnisation par la collectivité du préjudice subi par l'agent, celui-ci sera enclin à refuser à l'avenir d'utiliser son véhicule personnel pour des raisons de service. Il en découlera un problème organisationnel. La loi du 13 juillet 1983, modifiée notamment par celle du 16 décembre 1996, dispose que la collectivité doit défendre ses agents et les couvrir des condamnations civiles prononcées contre eux si la faute n'est pas détachable de la fonction, d'une part, et de réparer par ailleurs le préjudice qu'ils ont subi, d'autre part. Les articles 34 et 35 du décret n° 91-573 du 19 juin 1991 interdisent à la collectivité non seulement de prendre à sa charge les dommages causés et subis par l'agent, mais encore obligent l'agent à assurer la responsabilité éventuelle du commettant. La collectivité n'a pas le droit de souscrire un contrat d'assurance spécifique au profit de ses agents. Il existe dès lors non seulement un problème de gestion des ressources humaines et financières, mais aussi une incompatibilité entre la loi et un décret. En conséquence, il lui demande si les articles 34 et 35 du décret sont conformes à la loi du 13 juillet 1983 et si la collectivité peut souscrire au profit des agents utilisant un véhicule personnel pour des raisons de services une assurance spécifique auto-mission qui se substituera alors à l'assurance personnelle de l'agent en cas de sinistre, garantissant la responsabilité civile comme les dommages subis.
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Texte de la REPONSE :
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L'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires a créé un régime de garantie, par la collectivité publique, des dommages causés par ses fonctionnaires dans l'exercice de leurs attributions. Sur cette base, les fonctionnaires bénéficient d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent. Cette règle figure au rang des principes généraux du droit, le Conseil d'Etat l'ayant jugée applicable, même en l'absence de texte (CE, 26 avril 1963, centre hospitalier de Besançon ; CE, 27 avril 1988, commune de Pointe-à-Pitre). Par ailleurs, cette règle a été reconnue par le Conseil constitutionnel selon lequel « l'Etat répond des fautes commises par ses agents dans l'exercice de leurs fonctions et ne peut mettre en cause la responsabilité personnelle de ceux-ci qu'en cas de faute personnelle de leur part ». En matière d'accidents causés par des véhicules, l'article 1er de la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 attribuant aux tribunaux judiciaires compétence pour statuer sur les actions en responsabilité des dommages causés par tout véhicule et dirigées contre une personne morale de droit public dispose que « la responsabilité de la personne morale de droit public est, à l'égard des tiers, substituée à celle de son agent auteur des dommages causés dans l'exercice de ses fonctions ». L'administration peut toutefois dégager tout ou partie de sa responsabilité s'il existe des raisons sérieuses pour prétendre que l'agent n'était pas en service et utilisait son véhicule pour des raisons personnelles. Pour sa part, le décret n° 91-573 du 19 juin 1991 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels des collectivités et des établissements publics prévoit que, à défaut de véhicule administratif disponible, le mode de transport usuel doit être le transport en commun. Exceptionnellement, il peut être dérogé à cette règle sur le fondement d'une autorisation du chef de service, subordonnée à la souscription par l'agent d'une assurance garantissant la responsabilité de la collectivité qui l'emploie pour ce qui concerne les dommages causés au tiers. Alors même qu'elles n'ont fait l'objet d'aucune jurisprudence, ces dispositions ne semblent pas méconnaître celles posées par l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. En effet, elles n'imposent pas aux agents d'utiliser leur véhicule privé pour les besoins du service. Elles prévoient simplement une obligation d'assurance mise à la charge des agents lorsque ceux-ci sont autorisés à utiliser leur propre véhicule. Cela étant, le décret précité, qui a explicitement prévu la prise en charge des frais d'assurance par les agents, reste muet sur la possibilité pour la collectivité employeur de prendre en charge les primes correspondantes. A ce titre, l'indemnisation forfaitaire qui est versée à l'agent utilisant son véhicule personnel intègre les frais annexes à l'utilisation du véhicule, y compris les frais d'assurance. En l'état actuel du texte, on peut donc considérer que si elle prenait en charge le coût de cette assurance, la collectivité rétribuerait deux fois le même service.
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