Texte de la QUESTION :
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M. Louis Guédon appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé sur les conséquences économiques de la loi dite Evin qui interdit la publicité des boissons alcoolisées, privant ainsi les industriels de la possibilité de faire connaître leurs produits, amputant les agences de communication d'une part significative de leur activité et retirant aux médias ainsi qu'aux clubs sportifs une recette précieuse. Dans ces conditions, il lui demande si, plus de cinq ans après son adoption, il est possible d'évaluer l'impact de cette loi sur l'alccolisme et si un recul de ce fléau a pu être enregistré. Il lui demande également quelles conséquences le Gouvernement entend tirer du bilan de cinq années d'application de la loi Evin quant au maintien ou à l'abrogation de ce texte.
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Texte de la REPONSE :
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La consommation globale d'alcool en France a constamment régressé au cours des vingt dernières années. Cette diminution globale ne doit pas masquer une modification des modes de consommation au détriment de sous-groupes de la population, notamment des jeunes ou les plus démunis. Le consommation d'alcool demeure une des principales causes de morbidité et de mortalité évitables. On considère que cinq millions de personnes ont un usage nocif de l'alcool et que deux millions d'entre elles sont dépendantes de l'alcool. De nombreuses causes de décès pourraient voir leur fréquence sensiblement diminuée si les habitudes de consommation d'alcool étaient modifiées. Si l'on ne considère que les pathologies liées à une consommation chronique d'alcool, on constate en 1994 que 8 050 hommes et 3 150 femmes sont morts de psychose alcoolique, de cirrhose ou de lésions alcooliques du foie, que plus de 10 700 femmes sont décédés d'un cancer des voies aérodigestives supérieures (lié le plus souvent à l'association d'alcool et de tabac), soit au total de 23 400 décès liés à un alcoolisme chronique. A côté des pathologies liées à l'éthylisme chronique, les personnes ayant une consommation à risque d'alcool représentent plus de 25 % des patients vus en médecine générale et des malades hospitalisés pour des causes diverses, sans que cette consommation nocive ne soit repérée systématiquement. Conçue pour contribuer à l'amélioration de l'état sanitaire de la population, la loi n° 91-32 du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme comporte un ensemble de mesures destinées à combattre l'usage nocif de l'alcool et du tabac. Ainsi, des dispositions y figurent visant à limiter la publicité pour les boissons alcooliques, surtout chaque fois qu'elle risque d'être destinée aux jeunes par le support qu'elle utilise ou par les valeurs qu'elle associe à la consommation d'alcool. Les professionnels du domaine de l'alcool n'en conservent pas moins la possibilité de réaliser de la publicité pour leurs produits par la voie des supports énuméres par la loi, parmi lesquels la presse adulte, la radio, l'affichage. Il convient de noter l'assouplissement législatif intervenu en 1994 permettant la publicité par affichage sans encadrement par voie réglementaire. Par ailleurs, concernant l'interdiction de vente d'alcool sur les lieux sportifs, le décret n° 92-880 du 26 août 1992 pris en application de l'article L. 49-1-2 fixe les conditions dans lesquelles les groupements sportifs agréés peuvent déroger à l'interdiction d'offre d'alcool dans les lieux sportifs (à l'exclusion des boissons du quatrième groupe) a été assoupli, le décret n° 96-704 du 8 août 1996 ayant étendu de un à dix le nombre des autorisations annuelles pouvant être accordées par le préfet. En tout état de cause, il paraît excessif de considérer que les dispositions introduites par la loi du 10 janvier 1991 empêchent les industriels du secteur de l'alcool de faire connaître leurs boissons. En outre, les 900 millions de francs sur quatre ans de manque à gagner évalué par les éditeurs doivent s'apprécier au regard des coûts directs et indirects attribuables à l'alcoolisme qui s'élèvent à 80 milliards de francs. Afin d'apprécier l'impact de ces dispositions sur les comportements et sur les secteurs d'activités concernés, une commission a été constituée le 24 mars 1997, sous l'égide du commissariat général du Plan. Les données épidémiologiques ne permettent pas de tirer aujourd'hui des conclusions sur les effets propres de la loi. La description quantitative de la consommation globale d'alcool ne suffit pas à mesurer l'effet sur les comportements de la loi, et des études plus fines sur l'évolution des modes de consommation sont menées afin de rechercher et d'analyser les ruptures de tendances selon la catégorie sociale, l'âge, le sexe du consommateur. Ces statistiques devront être interprétées au regard des divers aspects de la politique globale de lutte contre l'alcoolisme et tenir compte des difficultés liées aux modifications des conditions socio-économiques indépendantes de la loi.
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