Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Yves Besselat appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le contrôle des flux migratoires exercé par les autorités britanniques. Le Royaume-Uni a mis en vigueur le 3 avril dernier une nouvelle législation relative à l'immigration et au droit d'asile qui renforce les sanctions à l'égard des personnes facilitant l'entrée illégale de clandestins sur le territoire britannique. Dès le mois de janvier, les transporteurs français se sont mobilisés pour informer leurs conducteurs sur les nouvelles procédures à suivre. Depuis trois mois, les contentieux se multiplient et, chaque fois, la responsabilité du transporteur est retenue par les autorités britanniques. Les recours contre ces décisions n'aboutissent jamais, y compris dans les cas où l'entreprise et son personnel démontrent qu'ils ont respecté les consignes instaurées par le service de l'immigration et que le conducteur s'est présenté spontanément aux forces de contrôle. De fait, il est impossible de prouver toute bonne foi et le caractère contradictoire de la procédure ne peut être garanti. Les entreprises de transport, en plus d'être victimes à leur insu du trafic organisé des clandestins, sont victimes d'une législation injuste et du manque de coordination des politiques d'immigration des Etats membres de l'Union européenne. Il s'interroge sur les modalités d'application de cette nouvelle législation avec les engagements internationaux de la Grande-Bretagne.
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Texte de la REPONSE :
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La lutte contre la délinquance et la fraude dans les transports internationaux est une préoccupation majeure des pouvoirs publics. Pour ce qui concerne l'immigration clandestine, le récent drame de Douvres rappelle, s'il en était besoin, l'ampleur du phénomène et l'urgence à trouver de nouveaux moyens de lutte. Le séminaire organisé par le ministère de l'intérieur à Paris les 20 et 21 juillet 2000, qui a réuni vingt et un ministres étrangers, témoigne de l'importance que les gouvernements attachent au règlement de cette question. Tous ont dressé un état identique de la situation : montée des flux, organisation de filières internationales dans lesquelles la grande criminalité est désormais impliquée, clandestins ignorant des risques encourus et payant très cher leur voyage. C'est aussi un fléau pour les professionnels du transport qui doivent supporter des dégâts importants, tant pour leurs véhicules que pour les marchandises transportées, et qui sont de surcroît systématiquement soupçonnés de participer, sinon activement, du moins passivement à ce type de trafics. La situation est particulièrement préoccupante pour les entreprises qui acheminent du fret vers la Grande Bretagne en raison de l'application, à compter d'avril 2000, d'une nouvelle législation (l'immigration and asylum ac) qui prévoit des amendes très lourdes pour les transporteurs (2 000 lires par clandestin) lorsque des clandestins sont découverts à bord des véhicules à l'arrivée sur le sol britannique. C'est pourquoi, une réflexion active et permanente a été engagée depuis plusieurs mois avec le ministère de l'intérieur. Elle a permis d'identifier de nouvelles pistes de travail, parmi lesquelles figurent la création d'un dispositif d'alerte (création d'une ligne téléphonique spéciale pour prévenir les forces de l'ordre de la présence de clandestins à bord du véhicule), l'amélioration de l'information et de la formation des conducteurs, la sécurisation des moyens de transport. Deux décisions sont d'ores et déjà prises : le Conseil national des transports est chargé de faire, dans les trois mois, des propositions permettant d'améliorer la sécurisation des moyens de transport. Par ailleurs, un groupe de travail permanent tripartite équipement-intérieur-profession est créé. Coprésidé par un membre du conseil général des ponts et chaussées et un représentant du ministère de l'intérieur, ce groupe aura pour mission de travailler sur les dispositions techniques de lutte contre l'infiltration des clandestins sur le territoire et les mesures d'accompagnement, notamment en matière de police, et de sécurité dans les ports. Parallèlement, une organisation ayant pour but d'améliorer la sûreté des ports maritimes de commerce français a été créée par un arrêté du 14 mai 1999. Il institue auprès du ministre des transports un Comité national de sûreté du transport et des ports maritimes chargé de définir une politique en la matière, et des comités locaux de sûreté portuaire dans certains ports, dont la liste était à fixer. Ce comité national, présidé par le directeur du transport maritime, des ports et du littoral, a défini les vingt-huit ports (essentiellement les ports autonomes et les ports d'intérêt national) où des comités locaux ont, depuis, été construits et se sont réunis, sous la présidence du préfet de département, pour faire une première évaluation des vulnérabilités de ces ports. Le comité local de sûreté portuaire de Calais, prototype de ces comités locaux, travaille depuis plus de trois ans à la définition et à la mise en place de mesures destinées à réduire la perméabilité des accès au terminal transmanche. L'immigration clandestine à partir de Calais pose un problème particulier aux transporteurs routiers. En effet, les candidats à l'immigration vers le Royaume-Uni sont très nombreux et, en cas de découverte de clandestins, même si le transporteur est de bonne foi, les autorités britanniques appliquent les pénalités prévues si le véhicule ne présente pas le système de sécurisation demandé. Aussi, des solutions adaptées ont déjà été mises en oeuvre. Elles comprennent la mise en place d'un plan complet de sécurisation de la zone portuaire, avec pose de nouveaux grillages, installation d'un circuit de surveillance vidéo, organisation de patrouilles cynophiles, détection systématique de gaz carbonique indiquant une présence humaine à l'embarquement de tous les camions français. Par ailleurs des contacts ont été noués avec les services de l'immigration britannique pour améliorer les opérations de contrôle des véhicules. Ce plan commence à avoir des effets positifs. Les différentes mesures arrêtées au niveau national ou au niveau local, comme à Calais, ne peuvent toutefois à elles seules régler l'ensemble du problème. Lors du séminaire des 20 et 21 juillet 2000, la délégation française a plaidé pour une « approche équilibrée » de ces questions. La lutte contre les filières ne saurait remettre en cause d'autres aspects de la politique d'immigration auxquels elle tient comme par exemple le regroupement familial, pas plus que le respect du droit d'asile auquel elle tend rester fidèle. Avec les autres Etats, elle a plaidé pour une lutte appropriée, mieux coordonnée notamment à l'échelle internationale, et aux moyens renforcés, mais toujours soucieuse d'appréhender la dimension humanitaire de ce phénomène. Une première étape pourra être l'adoption d'une directive pour harmoniser les sanctions pécuniaires imposées aux transporteurs acheminant, sur le territoire des Etats membres, des ressortissants des pays tiers démunis de titre d'admission. La France a pris l'initiative d'un projet de texte communautaire qui est actuellement discuté au sein des instances de l'Union européenne. La France a également déposé deux projets de texte destinés à renforcer le cadre légal pour la répression de l'activité de passeur. Il est clair, cependant, que le meilleur moyen de tarir les filières est de mettre fin au départ de candidats à l'immigration par des mesures préventives de vaste ampleur, relatives notamment au développement de leur pays d'origine.
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