Texte de la QUESTION :
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M. Pierre Brana attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur les nouveaux accords entre les éditeurs de presse et La Poste. En particulier sur le « ciblage », c'est à dire le principe de modulation tarifaire, tel que prévu. En dehors de tout jugement sur la qualité et la fonction de certains titres retenus, ce ciblage constitue un point d'achoppement entre types de publications. Tout en comprenant la nécessaire adaptation des tarifs postaux, marqués par des déséquilibres et par de nouvelles conditions de concurrence et des dispositions de la législation européenne, cette réforme est discriminatoire et dangereuse pour les publications agricoles et rurales notamment. La renégociation du régime économique de l'aide postale risque de conduire à des hausses exagérées des tarifs postaux, à un renchérissement des abonnements et, par voie de conséquence, à une diminution des lecteurs, à la disparition de certains titres, à une augmentation du chômage. Au-delà du danger économique, le statut même de la presse et son rôle d'information et de formation du citoyen qui sont remis en question. L'aide postale, c'est-à-dire le soutien indirect de l'Etat au transport de la presse par voie postale, contribuait pleinement au pluralisme et à la démocratie en permettant à tout lecteur d'accéder librement à la publication de son choix, en tout point du territoire, à un prix raisonnable. La réforme prévue remet en cause ce fondement historique, héritage de Révolution, qui encourage la « libre communication des pensées et des opinions » énoncé par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Il s'agit, à terme, d'aboutir à un système à deux vitesses concentrant l'aide publique sur les titres d'information générale et politique en réduisant le soutien aux autres formes de presse, dont la presse agricole et rurale. En outre, cette réforme va à l'encontre de la politique du Gouvernement en matière d'aménagement du territoire et du maintien d'un tissu humain par l'économie locale. Elle pénalisera le lecteur rural souvent isolé et attaché à cette presse « dont l'intérêt dépasse de façon mainifeste les préoccupations d'une catégorie (professionnelle) de citoyens », critère d'ailleurs retenu par le code des postes et télécommunications pour attribuer le tarif préférentiel. Enfin, comment nier à cette catégorie de média son concours permanent à l'information des agriculteurs et des ruraux dont elle est souvent l'un des seuls organes de presse écrite ? Qui plus qu'elle a concouru au progrès de l'agriculture française et à sa participation au développement du pays, a favorisé l'idée européenne, la production de qualité et la gestion responsable du milieu rural ? Ecartée, la presse agricole et rurale a déposé des recours devant le Conseil d'Etat pour demander l'annulation dudit décret. Plusieurs arguments ont été invoqués : non-respect des procédures en matière d'aide publique et du principe d'égalité de traitement des usagers du service public, introduction d'une discrimination tarifaire faussant le jeu de la concurrence et atteinte au principe constitutionnel de pluralisme de la presse. Il lui demande donc de bien vouloir reconsidérer les dispositions contestées de ces accords.
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Texte de la REPONSE :
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La grille tarifaire postale en vigueur jusqu'au 1er mars 1997 pour le transport et la distribution de la presse était marquée par de nombreux déséquilibres. Il convenait de remédier à ces inégalités en donnant à la nouvelle grille tarifaire une transparence et une neutralité économique nouvelles. Par ailleurs, il a été décidé de demander aux éditeurs de journaux d'augmenter progressivement leur participation au coût du transport postal. Celle-ci pouvait être estimée dans les années récentes à un peu plus de 1,8 milliard de francs, alors que l'Etat contribue pour 1,9 milliard de francs ; le solde, supérieur à 3 milliards de francs, était supporté par La Poste, c'est-à-dire par les clients de cet établissement. Globalement donc, les éditeurs ne contribuaient que pour 28 % environ à ce coût, alors que les « accords Laurent » de 1980 avaient fixé un objectif de 33 % pour 1990. Il résulte notamment des « accords Galmot » signés le 4 juillet 1996, à l'issue de la table ronde Etat, presse, Poste, mise en place à l'automne 1995, complétés par un relevé de conclusions du 10 janvier 1997, que la contribution de la presse au coût de son transport postal augmenterait de 8,7 % par an pendant cinq ans, soit une progression totale globale de 50 % par rapport à la situation antérieure. En signant ces accords, les représentants des éditeurs de presse ont marqué leur conscience de la nécessité de réformer la grille tarifaire et d'augmenter leur part de prise en charge du coût de ce transport. Ce nouveau dispositif est entré en vigueur le 1er mars dernier. La presse agricole et rurale, comme d'autres, connaîtra des augmentations de tarifs progressives mais, heureusement, plus limitées que ce que certains chiffres, annoncés en cours de discussion, le laissaient entendre. En tout état de cause un dispositif d'écrêtement des hausses trop brutales figure dans le décret précité.
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