FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 518  de  M.   Voisin Michel ( Union pour la démocratie française-Alliance - Ain ) QOSD
Ministère interrogé :  anciens combattants
Ministère attributaire :  anciens combattants
Question publiée au JO le :  30/11/1998  page :  6457
Réponse publiée au JO le :  02/12/1998  page :  9735
Rubrique :  associations
Tête d'analyse :  anciens maquis de l'Ain et du Haut Jura
Analyse :  mise en liquidation judiciaire
Texte de la QUESTION : M. Michel Voisin appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur la mise en liquidation judiciaire de l'Association nationale des anciens maquis de l'Ain et du haut Jura, qui a entraîné un vif émoi auprès de nos concitoyens. Certes, il ne lui appartient pas de prendre position ni de s'immiscer dans une procédure judiciaire, mais il convient d'interroger et d'appeler toujours à la plus grande prudence lorsqu'il s'agit du domaine de la mémoire. En conséquence il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'il compte prendre pour permettre à cette association de retrouver sa notoriété, le respect et la place qui est la sienne afin qu'elle puisse continuer à assumer, avec le succès qui fut le sien, le devoir de mémoire auquel les Français sont attachés.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Michel Voisin a présenté une question, n° 518, ainsi rédigée:
«M. Michel Voisin appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur la mise en liquidation judiciaire de l'Association nationale des anciens des maquis de l'Ain et du Haut-Jura, qui a entraîné un vif émoi auprès de nos concitoyens. Certes, il ne lui appartient pas de prendre position ni de s'immiscer dans une procédure judiciaire, mais il convient d'interroger et d'appeler toujours à la plus grande prudence lorsqu'il s'agit du domaine de la mémoire. En conséquence il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'il compte prendre pour permettre à cette association de retrouver sa notoriété, le respect et la place qui est la sienne afin qu'elle puisse continuer à assumer, avec le succès qui fut le sien, le devoir de mémoire auquel les Français sont attachés.»
La parole est à M. Michel Voisin, pour exposer sa question.
M. Michel Voisin. Monsieur le sécrétaire d'Etat aux anciens combattants, M. Lucien Guichon, député-maire d'Oyonnax, s'associe à ma question.
A quelques jours de votre venue dans notre département pour la commémoration du cinquante-cinquième anniversaire de la rafle de Nantua, je voudrais évoquer devant vous une affaire particulièrement douloureuse pour les survivants des maquis organisateurs du défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax, qui a eu un retentissement considérable tant sur le plan national qu'auprès de nos alliés.
En effet, ces anciens résistants, regroupés dans l'Association nationale des anciens des maquis de l'Ain et du Haut-Jura, créée par le colonel Roman Petit, doivent faire face aujourd'hui à un différend qui a conduit le 9 juillet 1998 à la mise en liquidation judiciaire de cette association par jugement du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse.
Je ne veux pas m'appesantir sur les multiples procédures judiciaires qui ont marqué le dossier, mais je souhaite néanmoins en faire un bref résumé.
En 1989, cette association avait décidé d'organiser un voyage au Canada pour ses membres, lesquels souhaitaient témoigner leur reconnaissance et leur amitié aux aviateurs de ce pays, qui ont mené de nombreuses missions de ravitaillement au profit de la Résistance française.
L'agence de voyages avec laquelle avait été passé un contrat pour l'organisation de ce séjour n'a pu tenir ses engagements en raison de son dépôt de bilan le 4 septembre 1990, quelques jours avant la date du départ, et alors que le voyage des quatre-vingt-dix participants, pour douze jours, avait été intégralement réglé.
Pour faire suite à cette liquidation judiciaire, devant l'impossibilité de parvenir à un accord amiable avec le repreneur et devant le refus de garantie de l'association de prévoyance et de solidarité des agences de voyages, l'association des anciens du maquis de l'Ain a dû se résoudre à engager une action en justice auprès du tribunal de grande instance de Paris.
Par jugement en date du 21 janvier 1994 prévoyant l'exécution provisoire, l'association de prévoyance a été condamnée à prendre en charge les dépenses engagées et à régler le 8 juin suivant la somme de 838 139 francs au titre du principal et des intérêts.
Mais la cour d'appel de Paris a réformé en partie ce jugement par son arrêt du 16 février 1996, et l'association s'est vue contrainte de rembourser la somme de 571 574 francs, ce qu'elle est dans l'impossibilité absolue de faire après le paiement des frais d'avocat et le remboursement à ses membres des sommes versées pour le voyage.
Je ne veux pas commenter une décision de justice, mais je tiens à souligner, et vous le comprendrez aisément, monsieur le secrétaire d'Etat, l'émoi et l'indignation des populations, et surtout des anciens résistants, qui viennent d'apprendre qu'ils pourraient être poursuivis personnellement pour comblement du passif de leur association, alors que leur bonne foi ne peut en aucun cas être mise en cause.
Vous allez les rencontrer prochainement. Je vous demande par conséquent quelle action vous comptez entreprendre pour venir en aide à l'association dans cette douloureuse affaire, afin qu'elle retrouve la notoriété, le respect et la place qu'elle mérite, et pour qu'elle continue à assumer avec succès le devoir de mémoire auquel nous tenons tant.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Monsieur le député, assurer la dignité et l'honorabilité des résistants, c'est d'abord, comme vous l'avez fait, rappeler les événements tels qu'ils se sont déroulés, afin qu'il n'y ait aucun doute, dans l'esprit de personne, sur la situation financière de l'association regroupant les prestigieux résistants de l'Ain et du Haut-Jura et sur ses raisons. Ces anciens résistants sont confrontés à une situation kafkaïenne. Ayant voulu aller au Canada pour participer à une réunion avec des aviateurs canadiens qui avaient combattu autrefois à leurs côtés, ils ont été condamnés par la justice parce qu'une agence de voyages indélicate a encaissé le chèque représentant le montant du voyage, mais sans organiser celui-ci.
Comme vous, je me garderai de commenter une décision de justice. Que convient-il de faire ?
Une nouvelle association a été constituée, elle a été déclarée à la sous-préfecture et s'est réunie le 11 octobre 1998. Je serai effectivement présent à Nantua le 14 décembre, et cette visite témoigne du respect et de la considération que je porte à tous les membres de cette association ainsi qu'au travail de mémoire qu'elle effectue.
En ce qui concerne la question financière, je ne prendrai pas d'engagement aujourd'hui, mais j'examinerai, en liaison avec l'Office national des anciens combattants, qui attribue certaines subventions, s'il est possible de faire un geste en faveur de cette association, et si le ministère lui-même peut apporter un élément de réponse.
Ce qui est sûr, c'est que le secrétariat d'Etat appréciera l'association, les élus du département et le travail de mémoire. A partir du moment où des emplois-jeunes ont été créés, où des crédits ont été prévus pour les actions de mémoire, je suis tout à fait déterminé à agir de concert avec cette association et les collectivités territoriales pour poursuivre ce travail de mémoire, qui est un devoir. Ce travail est essentiel, en cette fin de siècle, pour que les jeunes générations, qui auront à assumer le destin de la France et de l'Europe au début du xxie siècle, n'oublient pas les épreuves qu'a rencontrées notre pays, et comment il les a surmontées. L'an prochain, nous célébrerons le 55e anniversaire des débarquements de Normandie et de Provence, mais également de la libération de la France, notamment par les réseaux intérieurs de résistance. Ce doit être pour nous l'occasion d'affirmer ce devoir de mémoire, puisque c'est le chemin de la citoyenneté pour les jeunes générations.
La considération que nous portons à ces résistants sera donc marquée par mon déplacement le 14 décembre. Elle pourra être confirmée par des initiatives en 1999. Reste la question financière. Je vais étudier, je le répète, si mon département ministériel et si l'Office national des anciens combattants peuvent apporter une contribution. Peut être les collectivités territoriales pourront-elles également faire un geste. Le conseil général de l'Ain et le conseil régional pourraient eux aussi apporter un élément de réponse satisfaisant afin de libérer ces résistants glorieux d'une contrainte financière dont ils ne sont en rien responsables.
M. le président. La parole est à M. Michel Voisin.
M. Michel Voisin. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat et je sais que vous ferez le maximum pour résoudre cette douloureuse affaire. Vous avez indiqué une piste. Peut-être pourrons-nous unir nos efforts pour que ces résistants et leurs familles aient toutes garanties et puissent dormir un peu plus tranquilles.
UDF 11 REP_PUB Rhône-Alpes O