Texte de la QUESTION :
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M. Patrick Delnatte souhaite retenir l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la défense, chargé des anciens combattants, sur l'adoption récente, par le parlement allemand, d'une loi créant une fondation pour l'indemnisation des anciens travailleurs forcés sous l'Allemagne nazie. Cette fondation, baptisée « Souvenir, responsabilité et avenir », sera dotée de 10 milliards de marks apportés à parts égales par l'Etat et l'industrie allemande. Alors que le négociateur allemand du dossier a déclaré que l'Allemagne pourrait entamer avant la fin de l'année 2000 le versement de ces indemnisations à près d'un million de survivants du travail forcé, il lui demande de bien vouloir lui préciser les modalités et les procédures que devront suivre les ressortissants français concernés afin d'obtenir leur indemnisation.
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Texte de la REPONSE :
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Dès son arrivée au pouvoir, le chancelier Schröder a décidé d'impliquer l'Etat allemand dans les négociations engagées entre associations de victimes et entreprises ayant employé des travailleurs forcés. Il a mis en place un groupe de travail associant le gouvernement allemand et les entreprises, dirigé par l'ancien ministre libéral de l'économie, le comte Otto Von Lambsdorff. Les négociations ont été menées avec des organisations représentant des victimes du nazisme, avec l'objectif prioritaire d'indemniser celles qui avaient été soumises à une exploitation économique dans les conditions particulièrement inhumaines et qui n'avaient pas été, ou peu, indemnisées à ce jour. Etaient principalement visés les ressortissants d'Europe centrale ou orientale ou de Russie ayant subi ce type de traitements, en raison notamment de leur confession ou de leur nationalité, et n'ayant par la suite reçu aucun dédommagement, du fait qu'ils résidaient au-delà du rideau de fer ou pour tout autre motif. L'architecture retenue pour le dispositif d'indemnisation prévoit la répartition de ces fonds entre différentes associations partenaires dont chacune est chargée de les distribuer, après examen des dossiers individuels présentés, à une catégorie spécifique de victimes : les Polonais, les Russes, les Ukrainiens, les Biélorusses, les Tchèques, les personnes d'origine juive et une dernière catégorie représentant le reste des victimes, et notamment les personnes non juives d'Europe occidentale. Le projet de loi a été adopté le 14 juillet 2000 par le Parlement allemand. Le dispositif allemand prévoit un montant total de 10 milliards de DM, financé à parité par les entreprises et par l'Etat allemands. La ventilation de ces fonds entre les différentes associations partenaires chargées de distribuer ceux-ci a été précisée par la loi qui définit deux catégories de victimes indemnisables : la catégorie qualifiée au cours des négociations de « travailleurs esclaves » et qui concerne les personnes internées dans les camps de concentration et dans leurs équivalents (ghettos...) : chaque victime pourra toucher jusqu'à 15 000 DM ; l'autre catégorie recouvre les travailleurs forcés déportés en Allemagne, dans ses frontières de 1937, ou dans un territoire occupé par le Reich et forcés de travailler dans des camps fermés et surveillés. Chaque victime pourra toucher jusqu'à 5 000 DM. La somme effective touchée par chaque personne résultera du montant des fonds alloués à « l'organisation-partenaire » à laquelle elle doit s'adresser - et, dans l'hypothèse où ces fonds ne permettraient pas à l'association-partenaire concernée de verser les maxima annoncés, des dispositions prévues par la loi pour allouer en priorité les moyens restant à cette organisation-partenaire. Le dispositif allemand prévoit également que les prestations antérieures versées par des entreprises pour indemniser un travail forcé et d'autres préjudices nazis, même si elles ont été octroyées par l'intermédiaire de tiers, seront déduites de l'indemnisation. Les autorités autrichiennes ont par ailleurs décidé de créer un dispositif d'indemnisation du travail forcé, qui repose également sur les notions de « travailleur esclave » et de « travailleur forcé » et prévoit des indemnisations d'un montant comparable à celles accordées par le dispositif allemand. Ce texte de loi a été adopté par la chambre des députés le 7 juillet dernier. La loi autrichienne a prévu un montant global de 6 milliards de schillings et une distribution au fur et à mesure des besoins, sans ventilation préétablie entre des associations-partenaires. Elle prévoit, globalement, de verser : 105 000 schillings (environ 50 000 francs) aux personnes qui ont été en camp de concentration, enfermées ou soumises à des mesures de discipline très strictes ; 35 000 schillings (environ 17 000 francs) aux personnes ayant été contraintes au travail dans l'industrie, l'artisanat, la construction, l'électricité, les services publics, la poste et les transports ferroviaires. Les Allemands doivent prendre en charge les « travailleurs esclaves », c'est-à-dire les travailleurs forcés ayant été détenus dans des camps de concentration ou des sites assimilables (ghettos) quel que soit le lieu où se trouvaient ceux-ci. Lorsque le travail forcé n'a pas été accompli dans un camp de concentration (ou dans un site assimilable), le dispositif autrichien doit être compétent si ce travail a été effectué en Autriche et le dispositif allemand lorsque ce travail a été effectué dans les frontières allemandes de 1937 ou dans un territoire occupé par le Reich. Il convient, en outre, de préciser que les dispositifs d'indemnisation mis en place par les deux pays ont été conçus à partir de concepts différents de ceux retenus par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et la législation française. Les ressortissants français entrent dans la catégorie « reste du monde » regroupant l'ensemble des pays autres que la Russie et les Etats d'Europe centrale. Ils peuvent, s'ils relèvent du dispositif allemand, transmettre dès à présent leurs demandes d'indemnisation aux organisations-partenaires compétentes : pour les demandeurs d'origine juive, résidant en France et en Europe, à Claims conference, article 2 Fund Sophienstrasse 26, 60487 Frankfurt-am-Maim, Germany. La date limite de dépôt des demandes auprès de cet organisme est fixée au 12 avril 2001 ; pour tous les autres demandeurs résidant en France à l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), bureau pour la France, 66, rue de Provence, 75009 Paris. Ces deux organisations ont pour charge de transmettre aux postulants les formulaires de demande. Ils devront, s'ils relèvent du dispositif autrichien, adresser directement leurs demandes au « Fonds pour la réconciliation, la paix et la coopération » mis en place par l'Autriche et dont le siège est à Vienne.
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