FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 53463  de  M.   Bourg-Broc Bruno ( Rassemblement pour la République - Marne ) QE
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  06/11/2000  page :  6297
Réponse publiée au JO le :  02/04/2001  page :  1962
Rubrique :  collectivités territoriales
Tête d'analyse :  délégations de service public
Analyse :  associations. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Bruno Bourg-Broc demande à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de bien vouloir compléter la réponse faite à l'une de ses collègues (42187, AN du 28 février 2000, réponse du 21 août 2000) en ce qui concerne les délégations de service public « confiées » à des associations. En effet, il indiquait dans sa réponse que nombre d'associations dont les ressources sont principalement constituées par des subventions doivent être considérées comme participant à un service public et il ajoute « il ne s'agirait ni d'une délégation de service public, ni d'un marché mais d'une simple association au service public ». Or, à ce jour, la jurisprudence n'a jamais fait d'autre distinction que celle, soit du marché, soit de la délégation de service public. Il lui demande donc sur quels principes jurisprudentiels il a bâti cette nouvelle construction juridique et il lui demande également comment une telle définition peut s'insérer dans les principes des diverses directives européennes. Enfin, il lui demande confirmation ou infirmation de la nécessité ou non d'un appel à concurrence avant toute délégation de « tâches » confiées à des associations, notamment dans les secteurs socio-sportifs et culturels.
Texte de la REPONSE : Si la jurisprudence administrative s'est dans un premier temps surtout attachée à clarifier la frontière entre marché public et délégation de service, cette dichotomie ne peut pour autant être considérée comme recouvrant l'ensemble du champ des contrats liés à l'exploitation d'un service public passés par des personnes publiques. Dans ses conclusions sous un arrêt du Conseil d'Etat du 21 juin 2000, SARL Plage « Chez Joseph », le commissaire du Gouvernement a ainsi reconnu qu'il restait à déterminer la frontière séparant la délégation de service public de contrats qui ne sont pas des marchés. Il s'agissait en l'occurrence des conventions d'occupation domaniale qui, tout en n'étant pas des marchés publics, peuvent, selon les circonstances, constituer ou non des délégations de service public. Mais d'autres types de contrats peuvent être concernés et, plus particulièrement, les conventions liant des associations à une collectivité qui les subventionne. Comme indiqué dans la réponse apportée à la question n° 42187 du 28 février 2000 posée par Mme Marie-Jo Zimmermann, ces contrats n'ont pas à être systématiquement rangés dans la catégorie des délégations de service public ou dans celles des marchés publics. Ainsi en a jugé la cour administrative d'appel de Marseille, dans sa décision « commune de Toulon » du 20 juillet 1999. La cour a en effet estimé qu'une convention permettant le contrôle par la commune de l'emploi de la subvention accordée au comité des fêtes ne présentait les caractéristiques ni d'un marché public ni d'une délégation de service public. Par ailleurs, l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations prévoit que l'autorité administrative qui attribue une subvention est tenue, lorsque celle-ci dépasse un seuil défini par décret, de conclure une convention avec l'organisme de droit privé qui en bénéficie, ladite convention devant définir l'objet, le montant et les conditions d'utilisation de la subvention. Si la législation spécifique aux marchés publics ou aux délégations de service public trouvait à s'appliquer aux subventions accordées par des collectivités territoriales à des organismes de droit privé, il n'y aurait pas lieu de prévoir le recours à une convention qui figurait jusqu'alors dans une circulaire du 7 avril 1988, le contrat de délégation ou celui passé en vue de la réalisation du marché en faisant office. Il semble en particulier que l'intervention d'organismes de droit privé dans le domaine social, qui a notamment induit l'utilisation par la doctrine de l'expression d'« association au service public », dès 1974, ne doit pas être systématiquement considérée comme soumise au code des marchés publics ou à la loi Sapin, notamment lorsqu'elle s'exerce hors du champ concurrentiel. Sur le plan communautaire, il convient d'effectuer deux remarques préliminaires. La première concerne une différence de vocabulaire, le droit communautaire utilisant le terme concession, et non celui de délégation de service public. La seconde est que la problématique soulevée par l'auteur de la question doit être circonscrite aux seules activités économiques, les activités qui n'ont pas ce caractère n'étant pas soumises aux règles de la concurrence. La notion d'entité exerçant une activité économique est cependant envisagée de façon très large, en ne tenant compte ni du statut juridique de cette entité, ni de son mode de financement. En droit européen, un marché public est invariablement défini comme un contrat à titre onéreux conclu par écrit entre un pouvoir adjudicateur, d'une part, et un prestataire de services, un fournisseur ou un entrepreneur, d'autre part. En outre, en l'état actuel du droit communautaire, seule la concession de travaux fait l'objet d'une définition normative. L'article 1er sous d) de la directive 93/37/CEE la définit comme un contrat présentant les mêmes caractères qu'un marché public à l'exception du fait que la contrepartie des travaux consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter l'ouvrage, soit dans ce droit assorti d'un prix. En l'absence d'une définition précise de la concession de services dans un texte communautaire, la distinction entre marché public et concession de service repose sur des critères dégagés par la Cour de justice des communautés. La concession doit consister en une délégation d'un droit d'exploitation ainsi qu'en un transfert simultané au concessionnaire d'une proportion significative du risque lié à cette exploitation (CJCE, 26 avril 1994, affaire C-272/91 « Commission/Italie », CJCE, 10 novembre 1998, affaire C-360/96 « Arnhem »). Le fait qu'à l'heure les concessions de services ne relèvent du champ d'application d'aucun texte communautaire sectoriel ne dispense pas l'autorité concédante du respect d'un certain degré de publicité (CJCE, 7 décembre 2000, affaire C-324/98 « Telaustria »). Cependant, si un contrat ne peut être qualifié de concession du fait, par exemple, de l'absence de tout risque d'exploitation à la charge de l'exploitant, pour autant, ce contrat ne sera pas qualifié automatiquement de marché public. En effet, outre l'exigence d'un contrat conclu par écrit, la définition de marché public est axée sur le caractère onéreux de la prestation. Cela implique « que le montant auquel l'adjudicataire a droit soit déterminé concrètement au préalable », selon la formule de l'avocat général La Pergola dans l'affaire « Arnhem », et que cette contrepartie constitue la rétribution de l'entrepreneur, du fournisseur ou du prestataire de services. Or, notamment dans le cadre de conventions liant des associations à une collectivité qui les subventionne, il ne semble pas que cela soit toujours le cas. En conséquence, si l'on retrouve en droit communautaire la distinction entre marché public et concession, cette distinction, là encore, ne peut être considérée comme recouvrant l'ensemble des contrats relatifs à l'exécution d'activités, passés par des personnes publiques. Enfin, à l'occasion de la réforme du code des marchés publics, un travail est mené, afin de clarifier la situation des associations, pour distinguer ce qui relève du marché public, de la délégation de service public et de la subvention.
RPR 11 REP_PUB Champagne-Ardenne O