FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 53838  de  M.   Destot Michel ( Socialiste - Isère ) QE
Ministère interrogé :  industrie
Ministère attributaire :  industrie
Question publiée au JO le :  20/11/2000  page :  6563
Réponse publiée au JO le :  05/03/2001  page :  1418
Rubrique :  industrie
Tête d'analyse :  construction navale
Analyse :  politiques communautaires. conséquences
Texte de la QUESTION : M. Michel Destot attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur le système d'aide à la construction navale et sur les évolutions qu'il doit subir dans les prochains mois. En effet, en l'état actuel des choses, l'Union européenne a décidé la suppression unilatérale de toute aide directe à la construction navale pour les commandes prises après le 31 décembre 2000. Le projet de loi de finances pour 2001 ne prévoit par conséquent aucun crédit en autorisation de programme (chapitre 64-93). Pourtant, l'Union européenne est intervenue à plusieurs reprises auprès de la Corée en condamnant les pratiques de concurrence déloyales ainsi que les subventions indirectes de son système bancaire, qui ont permis aux chantiers navals coréens d'offrir des prix de dumping sur tous les types de navires. Ce pays n'a pour l'instant pas modifié ses pratiques, qui ont notamment permis aux chantiers navals coréens d'occuper artificiellement une place prédominante dans la production des pétroliers et des navires de charge. De plus, le ministre allemand de l'industrie a présenté au Bundestag un budget d'aide à la construction navale en augmentation pour 2001, en demandant officiellement à la Commission européenne de prolonger les aides au-delà du 31 décembre 2000. En effet, l'article 12 du règlement européen relatif à l'arrêt des aides publiques à la construction navale prévoit la possibilité d'une révision. Le Conseil des ministres de l'industrie du 5 décembre prochain sous présidence française devrait permettre d'en décider et pourrait donner l'occasion à la France de défendre une prorogation du système d'aide. La suppression totale des aides pourrait poser de sérieuses difficultés aux chantiers navals européens, qui risqueraient de ne plus pouvoir prendre de nouvelles commandes dans des secteurs où ils ne seraient plus concurrentiels. Il lui demande donc de bien vouloir préciser les suites qu'il entend donner au système d'aide à la construction navale, compte tenu des évolutions que doit subir ce secteur dans les prochains mois.
Texte de la REPONSE : La situation de la construction navale dans le monde reste un sujet primordial pour l'ensemble des pays de l'Union européenne, et en particulier pour la France, du fait des enjeux très forts liés à cette industrie. Cette situation a été et reste difficile compte tenu des surcapacités des productions importantes, pour presque tous les types de navires, en même temps que du comportement de certains pays, et tout particulièrement la Corée du Sud. Le règlement 1540/98 du 29 juin 1998 encadre utilement l'ensemble des aides spécifiques qui peuvent être données à ce secteur : restructuration, recherche et développement, aides à la commande entre autres. Ces dernières, notamment du fait de la pression exercée par la France lors de l'établissement de ce règlement, ont été maintenues jusqu'à fin 2000. Il est cependant apparu clairement qu'un tel processus n'offrait plus sur le moyen et long terme, une réponse satisfaisante : la Corée a ainsi confirmé entre-temps sa place prépondérante sur le marché, pour certains segments de navires (porte-conteneurs, pétroliers...), alors que ces aides représentent toujours pour les différents pays de l'Union européenne une charge financière importante. La préoccupation de l'Union, en particulier de la France, a été tout au long de l'année 2000 de travailler simultanément à la conduite d'une véritable négociation avec la partie coréenne et à la construction d'une position cohérente des différents acteurs de l'Union, tant en termes offensifs que défensifs, tout en s'inscrivant dans la perspective de l'arrêt des aides à la commande. L'opposition d'une part significative des Etats membres et de la Commission rendait de fait impossible une décision de prolongation des aides au-delà du 31 décembre 2000. Au plan de la négociation, une action soutenue a ainsi été menée par les services de la Commission, sur toute l'année 2000, alors que la France exerçait la présidence de l'Union au second semestre. M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie a lui-même exprimé à plusieurs reprises, vis-à-vis de la partie coréenne, le souci industriel qui animait l'Union européenne et la France, la réelle volonté de déboucher sur un accord, mais aussi l'extrême fermeté avec laquelle l'Union européenne traiterait ce dossier, dans l'hypothèse où aucun accord ne serait trouvé. Ce dossier a par ailleurs abouti à la mise en oeuvre, sur initiative française, d'un dispositif complet qui a abouti, entre autre, à une sensibilisation du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale. Les Etats membres vont enfin poursuivre leurs efforts visant à l'élaboration, sur la base de propositions faites en 1994, afin de réaliser des conditions de concurrence équitables pour l'industrie de la construction navale. Le Conseil industrie du 5 décembre 2000, que M. Pierret a présidé, a ainsi été consacré en grande partie à la construction navale. Il a permis de déboucher sur l'adoption à l'unanimité de conclusions par le Conseil dans le sens d'un message d'extrême fermeté adressé à la Corée. La Commission s'est engagée à cette occasion à instruire la plainte ROC déposée par les chantiers navals européens. Faute d'un rétablissement de conditions de concurrence loyale, elles s'est également engagée, simultanément au dépôt de cette plainte et avant l'échéance du 1er mai 2001, à proposer un mécanisme défensif transitoire pour les segments de marché directement touchés par la concurrence coréenne. Elle étudiera en même temps des mesures de soutien nouvelles en faveur de ce secteur, en particulier en matière de recherche-développement. L'Union européenne est entrée dans une période cruciale pendant laquelle elle doit nécessairement continuer à montrer sa cohésion sur des questions qui engagent l'avenir de son industrie navale. La période qui s'ouvre va être déterminante pour renforcer la pression exercée sur la Corée du Sud et définir, si le besoin s'en confirme, le mécanisme défensif transitoire tel que la Commission en a accepté le principe et pourrait le proposer. Il est tout à fait essentiel que les différents Etats concernés, au-delà de leurs priorités nationales, travaillent de concert sur ce sujet pour trouver des réponses satisfaisantes pour l'ensemble de leur industrie navale, en écartant d'éventuels recours à des soutiens nationaux ou régionaux illicites. Les pouvoirs publics français restent tout particulièrement vigilants sur ce sujet et gardent en particulier un contact étroit avec les autres Etats membres dans cette optique. Cette vigilance s'exerce bien sûr en complémentarité avec celle des services de la Commission. Il est primordial en effet que s'impose la plus grande cohésion entre tous les acteurs de l'Union, dans la perspective même du dépôt d'une plainte contre la Corée auprès de l'OMC.
SOC 11 REP_PUB Rhône-Alpes O