FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 54715  de  M.   Hue Robert ( Communiste - Val-d'Oise ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  04/12/2000  page :  6825
Réponse publiée au JO le :  28/05/2001  page :  3137
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  agressions sexuelles
Analyse :  pédophilie. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Robert Hue attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'avancée de l'enquête consacrée aux réseaux pédophiles. Le 24 février 2000, le quotidien l'Humanité révélait au grand public l'existence d'un important réseau pédophile dans notre pays. Fondée sur la découverte d'un cédérom et d'un répertoire comprenant 470 photographies d'enfants, parmi lesquels des garçonnets, des fillettes, des préadolescents et des bambins, cette révélation n'a pas débouché, de l'avis même de plusieurs associations de défense des droits de l'enfant, sur une action d'envergure suffisante pour éliminer totalement le fléau de la pédophilie. Dans son édition du 31 octobre, le même quotidien dénonçait la passivité de certains services de l'Etat chargés de s'attaquer au problème, le manque de moyens et de concertation avec les autorités des pays voisins et les pressions et sanctions intolérables exercées sur des professionnels - médecins, psychiatres, travailleurs sociaux - qui tentent de protéger les victimes en procédant à des signalements d'enfants qu'ils considèrent en danger. Compte tenu de la gravité du problème et de la légitime attente d'un grand nombre de familles et d'associations, il lui demande de bien vouloir le tenir informé de l'avancée de l'enquête ouverte suite à ces révélations et des moyens qu'elle entend dégager afin de favoriser la protection de l'enfance en danger.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que les faits auxquels il fait allusion ont donné lieu à l'ouverture d'une information judiciaire au tribunal de grande instance de Paris le 8 mars 2000 des chefs de corruption de mineurs de quinze ans, diffusion et enregistrement d'images pornographiques et mise en péril de mineurs. Dès lors, il convient de rappeler qu'en vertu du principe du secret de l'information il n'appartient pas à la ministre de la justice de donner des informations sur le déroulement des investigations diligentées par le juge d'instruction saisi. D'une façon plus générale, la garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que le conseil de sécurité intérieure, qui s'est réuni le 13 novembre 2000 sous la présidence du Premier ministre, a été consacré à la question des atteintes et violences sexuelles sur des mineurs et a réaffirmé avec détermination la poursuite des efforts du Gouvernement en vue d'une plus grande protection des enfants et d'une répression accrue de la déliquance sexuelle et de la pédophilie. Les axes de travails consistent à améliorer les circuits de signalements, la prise en charge des mineurs victimes et, s'agissant en particulier de la lutte contre les réseaux pédophiles, à renforcer les sanctions et la coopération internationale, qu'il s'agisse des moyens opérationnels d'enquêtes et des dispositifs légaux. En effet, certaines formes de la déliquance pédophile ayant des aspects internationaux, ou s'appuyant sur une criminalité organisée et facilitée par les nouvelles technologies, un groupe de travail interministériel a été mis en place en novembre 2000 à l'initiative du ministère de la justice, consacré au thème « Internet et pédophilie », afin d'examiner la pertinence de la législation au regard des nouvelles technologies dont l'utilisation peut faciliter la commission d'infractions à caractère pédophile. Ce groupe de travail, qui associe les services des ministères de l'intérieur et de la défense compétents et des acteurs de terrain (officiers de police judiciaire spécialisés, magistrats du parquet et magistrats instructeurs), mène une étude portant à la fois sur la prévention de cette délinquance, le traitement judiciaire des procédures et la dimension internationale du phénomène. En outre, il convient de rappeler qu'un office central de lutte contre la cybercriminalité a été créé en mai 2000, venant ainsi renforcer le dispositif répressif déjà en vigueur, en permettant de traiter de manière spécifique la déliquance à caractère pédophile ou pornographique sur l'Internet. L'action des services répressifs des états s'est considérablement renforcée grâce notamment à des organisations internationales de police tels Europol et Interpol qui s'engagent notamment dans la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants, y compris sur Internet. A cet égard, il peut être rappelé des actions significatives qui illustrent la coordination efficace des différents services de police, comme l'opération « Cathédrale » menée dès le mois de septembre 1998 et qui a conduit à l'interpellation d'une centaine de personnes sur le territoire de treize Etats, dont la France, et plus récemment l'opération « Torre Annuziata » en Italie, qui a permis de démanteler un réseau de distribution de matériels pédopornographiques en octobre 2000. De plus, la garde des sceaux entend travailler à un renforcement du cadre juridique et technique de la coopération internationale. Ainsi, au niveau de l'Union européenne, la mise en oeuvre d'Eurojuts et des conventions d'entraide judiciaire, doit permettre une plus grande efficacité dans la lutte contre les réseaux pédophiles. Enfin, la garde des sceaux tient à souligner que les statistiques des services de police judiciaire, comme celles émanant du casier judiciaire national, démontrent que la déliquance sexuelle à l'égard des mineurs s'avère en premier lieu une déliquance de proximité, les agresseurs sexuels appartenant à l'entourage familial ou éducatif des mineurs. A cet égard, si la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles et à la protection des mineurs a considérablement renforcé le dispositif légal de signalements des mineurs en danger et de protection des mineurs victimes, les efforts doivent être poursuivis, notamment en direction des professionnels de l'enfance et au secteur médical ou médico-social, dont les interventions auprès de l'autorité judiciaire sont de première importance. En particulier, une réflexion interministérielle doit prochainement porter sur la corrélation entre l'obligation légale de signalement, pénalement sanctionnée, et le principe du secret professionnel applicable à certaines professions, ainsi que sur le contenu objectif des signalements.
COM 11 REP_PUB Ile-de-France O