Texte de la QUESTION :
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M. Michel Fromet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions d'application de la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence et le droit des victimes. Les magistrats et les personnels de police nous font part de leurs inquiétudes légitimes relatives aux moyens matériels et humains qui accompagnent l'application de la loi. En ce qui concerne particulièrement les conditions de placement en garde à vue, le procureur de la République ou le juge d'instruction doivent être désormais avisés dès le début du placement et non plus dans les meilleurs délais. Cette nouvelle disposition implique une présence accrue des magistrats du parquet. Dès lors, il lui demande, d'une part si l'avis immédiat de placement en garde à vue par télécopie est suffisant ou si elle doit se faire nécessairement par échange téléphonique, et d'autre part s'il est prévu d'augmenter les effectifs de magistrats de jour comme de nuit.
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Texte de la REPONSE :
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La garde des sceaux fait savoir à l'honorable parlementaire que l'obligation pour un officier de police judiciaire d'aviser immédiatement l'autorité judiciaire compétente - procureur de la République ou juge d'instruction - de sa décision de prendre une mesure de garde à vue à l'encontre d'un justiciable n'a pas été créée par la loi du 15 juin 2000. La loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, sur ce point précis, ne modifie en rien le droit positif mais se borne à aligner la rédaction du code de procédure pénale sur l'interprétation jurisprudentielle constante en la matière de la chambre criminelle de la Cour de cassation. En effet, sous l'empire des dispositions précédentes, issues de la loi du 24 août 1993, la chambre criminelle a, par une jurisprudence fondée notamment sur la décision n° 93-326 DC du Conseil constitutionnel du 11 août 1993, estimé que l'information des magistrats à qui est confié par la loi le contrôle des mesures de garde à vue doit intervenir « sans délai, sauf circonstances insurmontables » (Crim. 24 novembre 1998 ; 29 février 2000, 2 arrêts). La chambre criminelle a ainsi annulé des mesures de garde à vue du fait d'une information jugée trop tardive du procureur de la République, motif pris que tout retard dans la mise en oeuvre de cette obligation, non justifié par des circonstances insurmontables, fait nécessairement grief aux intérêts de la personne concernée : cette règle a été également appliquée par la haute juridiction à l'hypothèse où c'est le juge d'instruction mandant qui n'avait pas été informé dès le commencement de la garde à vue (cf. les arrêts précités). Cette jurisprudence est donc confortée par la nouvelle rédaction des articles 63, 77 et 154 du code de prodécure pénale. La loi ne précise pas les modalités selon lesquelles le procureur de la République doit être informé par les enquêteurs du placement en garde à vue. Les services ou unités de police judiciaire et les juridictions peuvent donc conserver les pratiques antérieurement suivies, dès lors que ces dernières respectaient les exigences posées par la Cour de cassation dans ses arrêts précités. En particulier, l'avis au magistrat compétent peut se faire par téléphone ou par télécopie, solutions déjà préconisées par le commentaire de la loi du 4 janvier 1993. La garde des sceaux indique par ailleurs à l'honorable parlementaire que le Gouvernement a décidé de procéder à une augmentation sans précédent du nombre des magistrats. Le « Plan pour la justice » prolonge ainsi l'effort entrepris depuis 1997 pour la création de postes de magistrats, et aboutira en 2005 à une augmentation totale de 1 439 magistrats supplémentaires dans les juridictions.
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