FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 58450  de  M.   Dosière René ( Socialiste - Aisne ) QE
Ministère interrogé :  aménagement du territoire et environnement
Ministère attributaire :  aménagement du territoire et environnement
Question publiée au JO le :  05/03/2001  page :  1303
Réponse publiée au JO le :  09/07/2001  page :  3972
Rubrique :  animaux
Tête d'analyse :  oiseaux sauvages
Analyse :  commerce. réglementation
Texte de la QUESTION : M. René Dosière attire l'attention de Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur un problème de compatibilité de législations entre, d'une part, les articles L. 211-1, L. 211-2 et L. 211-3 du code rural et l'arrêté ministériel du 17 avril 1981 et, d'autre part, la directive 79/409/CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages. Cette directive communautaire, concernant la conservation des oiseaux sauvages, oblige les Etats membres à interdire la commercialisation des spécimens appartenant à une espèce d'oiseaux ne figurant pas dans ses annexes, pour autant qu'il s'agit d'une espèce vivant naturellement à l'état sauvage sur le territoire européen. Or, selon la cour de justice des communautés européennes, cette directive ne s'applique pas aux espèces d'oiseaux nés et élevés en captivité. On peut, dès lors, considérer que ladite directive impose aux Etats membres d'assurer la protection d'une espèce d'oiseaux vivant à l'état sauvage sur le territoire européen. De plus, en l'absence de législation communautaire sur le commerce des oiseaux sauvages nés et élevés en captivité, les Etats membres demeurent compétents pour réglementer cette matière, sous réserve de respecter les autres dispositions communautaires et, en premier lieu, celles du traité de Rome. C'est ainsi que la législation française (les articles L. 211-1, L. 244-2 et L. 211-3 du code rural et l'arrêté ministériel du 17 avril 1981) réprime la vente de spécimens vivants d'oiseaux appartenant à une espèce protégée. Toutefois, il semblerait que notre législation soit contraire à l'article 30 du traité de Rome, qui stipule que les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent sont interdites entre les Etats membres. Aussi, concernant les oiseaux bagués, ceux nés et élevés en captivité et relevant du champ d'application de l'article 30 du traité de Rome, il souhaite savoir quelles mesures le ministère entend prendre afin de rendre notre législation compatible avec les dispositions communautaires.
Texte de la REPONSE : La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative aux dispositions réglementaires nationales interdisant le commerce d'oiseaux d'espèces vivant à l'état sauvage sur le territoire européen et protégées en application des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement. La question porte sur la compatibilité de l'arrêté du 17 avril 1981 modifié fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire, pris en application de ces dispositions législatives avec les dispositions communautaires, en particulier avec celles du traité instituant la Communauté européenne, dans la mesure où cet arrêté prévoit pour un certain nombre d'espèces des mesures d'interdiction du commerce qui ne concernent pas seulement les animaux vivant dans la nature ou qui en sont issus mais s'étendent également aux animaux nés et élevés en captivité. La directive du Conseil CEE n° 79/409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages a défini les règles de protection des espèces d'oiseaux vivant à l'état naturel sur le territoire des Etats membres. Pour la majorité de ces espèces, cette directive fixe un principe général d'interdiction de commercialisation. Comme il a été confirmé par la Cour de justice des communautés européennes dans son arrêt du 8 février 1996 rendu au sujet de la commercialisation d'oiseaux appartenant à une espèce protégée, le champ d'application de cette directive vise uniquement les animaux qui vivent dans la nature ou qui en sont issus. En conséquence, l'examen de la compatibilité juridique des mesures portant sur les animaux nés et élevés en captivité ne peut s'effectuer à la lumière des dispositions de la directive du 2 avril 1979 mais à celle de l'article 30 du traité instituant la Communauté européenne. Cet article prévoit que des interdictions ou des restrictions à la libre circulation des marchandises au sein de l'Union européenne (l'interdiction de commercialisation des animaux devant être considérée comme une telle mesure) peuvent être prises par les Etats membres si elles sont notamment justifiées par des raisons de protection de la vie des animaux. C'est précisément pour de telles raisons, incluant les intérêts de conservation de la faune sauvage, qu'ont été adoptées les mesures d'interdiction du commerce des animaux nés et élevés en captivité, appartenant à une espèce protégée puisque leur commerce et leur élevage à des fins commerciales sont susceptibles d'avoir un impact significatif sur le niveau de conservation de l'espèce à l'état naturel. Ces activités sont effectivement de nature à entraîner des prélèvements d'animaux dans la nature. Certaines espèces sont difficiles à élever et il serait dès lors plus aisé, pour répondre à une demande commerciale, de se procurer les animaux en les prélevant dans la nature. De même, une production intensive d'animaux, ayant pour but unique leur commerce, serait tentée de recourir à de tels prélèvements afin de renouveler la population d'animaux destinés à la reproduction en captivité dans le but de prévenir les inconvénient dus à la consanguinité. Par ailleurs, si l'on accorde une valeur marchande aux animaux, le risque de fraudes consistant à présenter des individus comme nés et élevés en captivité alors qu'ils sont issus de la nature serait bien plus elevé. La généralisation du commerce des animaux d'espèces indigènes, en favorisant leur détention par des particuliers ne possédant aucune compétence particulière pour les élever, conduirait à amplifier le risque que ces animaux soient entretenus dans de mauvaises conditions alors même que de nombreuses espèces requièrent des soins attentifs. S'ensuivrait également une amplification du risque de relâcher, dans la nature, volontaires ou non, d'animaux de ces espèces au patrimoine génétique différent de celui des populations sauvages puisqu'ayant fait l'objet d'une pression de sélection de la part de l'homme. A terme, il pourrait être craint une compétition entre les populations d'origine captive et les populations sauvages ou une modification de ces populations sauvages par croisement entre les animaux d'origines différenes. Ce fait peut être illustré à l'heure actuelle par les observations fréquentes dans la nature des modifications phénotypiques de canards colverts appartenant à une espèce dont la commercialisation est autorisée. Les dispositions nationales, pour l'ensemble des raisons qui viennent d'être évoquées, n'ont jamais été jugées non conformes au droit européen par la Cour de justice des communautés européennes. Le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement a le souci qu'elles ne constituent pas une entrave excessive aux activités des établissements zoologiques ou des personnes compétentes et passionnées par l'élevage de ces animaux. C'est pourquoi de nouvelles dispositions réglementaires accorderont prochainement un statut particulier aux animaux nés et élevés en captivité, appartenant à une espèce protégée, tout en maintenant l'interdiction de leur commerce. Elles prévoiront notamment leur marquage, leur enregistrement dans un fichier national et assoupliront les conditions de leur circulation. Elles faciliteront les échanges d'animaux entre les élevages autorisés par l'administration et pour lesquels la compétence de leur responsable aura été reconnue. La mise en oeuvre de ces nouvelles dispositions reçoit le soutien des principales organisations professionnelles ou associatives concernées.
SOC 11 REP_PUB Picardie O