FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 585  de  M.   Boulaud Didier ( Socialiste - Nièvre ) QG
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  06/05/1998  page :  3384
Réponse publiée au JO le :  06/05/1998  page :  3384
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Afghanistan
Analyse :  droits de l'homme
DEBAT : M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud.
M. Didier Boulaud. Monsieur le ministre des affaires étrangères, depuis trop longtemps maintenant, l'Afghanistan et Kaboul vivent sous le régime de terreur imposé par les fanatiques talibans. Il y a quelques semaines, deux condamnés ont été égorgés vifs au couteau devant une foule de 35 000 spectateurs, enivrés de sang, qu'il a fallu disperser par la force pour éviter qu'ils n'emportent les cadavres. Chaque jour, des hommes et des enfants sont battus ou fouettés parce que leurs épouses ou leurs mères ont osé quitter leur domicile. Même le port intégral du tchador ne change rien à la sanction. Les femme sont cloîtrées et les soins dans les hôpitaux leur sont interdits.
La patrie des droits de l'homme va-t-elle supporter longtemps une telle situation ou entend-elle prendre, dans le cadre de l'ONU, les initiatives qui s'imposent - quels que soient les intérêts géostratégiques ou économiques des uns ou des autres dans cette région d'Asie centrale - pour mettre fin à l'horreur ? En un mot, l'heure du devoir d'ingérence n'a-t-elle pas sonné ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. C'est vrai, monsieur le député, l'Afghanistan est un pays particulièrement malheureux. Cela fait vingt ans qu'il est dévasté par une guerre étrangère puis civile, et que s'y accumulent les fléaux. D'abord, c'est le pays dans lequel il y a le plus de mines antipersonnel, et j'ajoute cet élément au tableau que vous avez décrit; par ailleurs, les conditions sociales, les conditions de vie des femmes et des enfants, déjà extraordinairement difficiles avant la guerre - guerre contre la Russie puis guerre civile - se sont constamment aggravées.
Aujourd'hui, dans toutes les instances où la France a son mot à dire sur ces questions, que ce soit au sein de l'Union européenne ou au sein de la commission des droits de l'homme des Nations unies, nous prenons position sur tous les plans, nous prenons des initiatives et condamnons avec une extrême énergie les violations des droits de l'homme, non seulement les plus choquantes et les plus révulsantes, comme celles que vous avez citées, mais d'autres également qui ont lieu tous les jours et dont, malheureusement, on ne parle pas.
La solution à ce conflit sera politique. Il faut donc agir, soit directement, soit par le biais de l'Europe ou des Nations unies - un représentant spécial du secrétaire général des Nations unies est d'ailleurs chargé de cette tâche - pour convaincre les pays limitrophes de l'Afghanistan, ce pays martyr, de cesser de jouer leur jeu intérieur sur le dos de leur voisin. L'Iran, le Pakistan, d'autre pays encore se servent de ce territoire. Il y a également d'autres enjeux, puisque c'est l'un des territoires par lesquels on peut acheminer le gaz et le pétrole d'Asie centrale.
Bref, nous n'y arriverons pas simplement par des condamnations, même si celles-ci sont indispensables, et je vous demande de nous faire confiance: nous serons extrêmement vigilants sur ce plan. Nous savons qu'il faut aussi un traitement politique de ce problème, et nous cherchons à développer une politique européenne commune sur ce point. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
SOC 11 REP_PUB Bourgogne O