Texte de la QUESTION :
|
M. Pierre Morange appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le droit des successions et, en particulier, sur les dons manuels. Il résulte de l'application des articles 843 et suivants du code civil que tout héritier venant à une succession doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt par donations entre vifs, et que ce rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage. Sur le plan patrimonial, selon que les biens donnés auront été transmis par simple déclaration de don manuel ou par donation partage, les conséquences peuvent être fâcheuses. En effet, la valeur du bien donné est estimée à la date de l'acte de donation partage, alors que celle du don manuel est appréciée à la date du règlement successoral, si elle a servi à acquérir un bien (art. 860 et 869 du code civil). Ainsi, le cas de dons manuels à des enfants par leurs parents peut provoquer une injustice, eu égard au fait que le montant de la somme rapportable sera majoré de la plus-value éventuelle du bien acquis avec cet argent. L'accroissement de la valeur du bien donné à l'un des enfants, grâce notamment à son savoir-faire, profitera à ses cohéritiers passifs, inefficaces ou dépensiers. C'est pourquoi, dans le but d'assurer une égalité de traitement entre les deux formes de donation, il serait souhaitable d'introduire dans notre législation une disposition calquée sur l'article 1078 du code civil relative aux donations partages selon laquelle les biens donnés par dons manuels seraient évalués au jour du don manuel et non au jour du règlement successoral. Il l'interroge donc sur ses intentions.
|
Texte de la REPONSE :
|
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que, depuis la loi du 3 juillet 1971 sur les rapports à succession et la réduction des libéralités, tous les biens donnés en avancement d'hoirie sont évalués à l'époque du partage dans l'état qu'ils avaient au jour de la donation. Seul le rapport d'une somme d'argent, dont la remise est assimilée à un prêt, est égal à son montant. Il n'y a d'exception que dans le cas où cette somme a servi à acquérir un bien, le rapport étant alors dû de la valeur de ce bien en fonction de son état au moment de l'acquisition. Ne sont donc prises en considération que les fluctuations de valeur advenues à la chose donnée pour une cause étrangère à l'activité du donataire, lesquelles modifient l'étendue du rapport, qu'elles grossissent ou diminuent selon qu'elles sont des plus-values ou des moins-values. A l'inverse, les fluctuations de valeur dues à des améliorations ou des dégradations imputables au donataire sont sans effet sur le rapport et sont donc au profit ou à la charge de leur auteur. En soumettant le rapport au régime des dettes de valeur, le législateur de 1971 a permis d'assurer l'égalité du partage entre les cohéritiers quelles que soient les dates des libéralités reçues. En matière de donation-partage l'article 1078 du code civil dispose que les biens donnés sont évalués au jour de l'acte dès lors que tous les enfants ont reçu un lot, solution reposant sur l'acceptation par chaque enfant de l'évaluation retenue à la fois pour son lot et celui des autres. En cas de donation antérieure, l'article 1078-1 du code civil permet au donateur d'incorporer cette libéralité à la donation-partage, la soumettant ainsi au même régime d'évaluation. Le dispositif en vigueur permettant de parvenir à une solution équilibrée entre les intérêts des différents héritiers, il n'apparaît pas devoir être modifié.
|