FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 598  de  M.   Luca Lionnel ( Rassemblement pour la République - Alpes-Maritimes ) QOSD
Ministère interrogé :  aménagement du territoire et environnement
Ministère attributaire :  aménagement du territoire et environnement
Question publiée au JO le :  01/02/1999  page :  512
Réponse publiée au JO le :  03/02/1999  page :  689
Rubrique :  déchets, pollution et nuisances
Tête d'analyse :  décharges
Analyse :  fermeture. Jas-de-Madame. Villeneuve-Loubet
Texte de la QUESTION : M. Lionnel Luca appelle l'attention de Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur la fermeture de la décharge du Jas-de-Madame, à Villeneuve-Loubet, recevant plus de 400 000 tonnes de déchets des Alpes-Maritimes. Il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour traiter les futurs déchets du département.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Lionnel Luca a présenté une question, n° 598, ainsi rédigée:
«M. Lionnel Luca appelle l'attention de Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur la fermeture de la décharge du Jas-de-Madame, à Villeneuve-Loubet, recevant plus de 400 000 tonnes de déchets des Alpes-Maritimes. Il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour traiter les futurs déchets du département.»
La parole est à M. Lionnel Luca, pour exposer sa question.
M. Lionnel Luca. Madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, je souhaite vous interroger sur le problème majeur du traitement des déchets dans les Alpes-Maritimes, et plus particulièrement sur la fermeture, en juin prochain, de la décharge dite du Jas-de-Madame, située sur la commune de Villeneuve-Loubet, entre Cagnes et Antibes. Cette décharge, qui reçoit, à l'heure actuelle, 400 000 tonnes de déchets, a des conséquences nuisibles sur l'environnement de Villeneuve-Loubet, comme de la commune voisine de Biot, et particulièrement nuisibles, du fait qu'elle a été réalisée à une époque où l'on était peu vigilant sur les conditions de traitement.
Un syndicat intercommunal s'est constitué en 1991 pour la réalisation d'une unité de traitement et de valorisation, toujours sur la commune de Villeneuve-Loubet. Des problèmes divers, d'ordre administratif, sur lesquels je ne m'étendrai pas - opposition du propriétaire, appel d'offres illégal sous la conduite d'une administration d'Etat pourtant conducteur de l'opération - ont retardé sa réalisation.
Depuis trois ans, on a procédé à une redéfinition du lieu et des objectifs. Ainsi a été décidée la mise en place d'un tri sélectif dans toutes les communes du syndicat, puisqu'une étude globale a été faite en ce sens.
Prochainement, un dossier de demande d'utilité publique sera déposé auprès du préfet. En attendant, il faut trouver des solutions transitoires. Si, pour les vingt et une communes du syndicat intercommunal, elles sont trouvées, car les capacités de traitement existent, en revanche, le problème reste posé pour les 250 000 tonnes de déchets du reste du département, en particulier à l'ouest, sur le secteur de Cannes-Grasse.
L'actuelle société exploitante vient de proposer l'ouverture d'une deuxième décharge, près de ses installations, toujours sur la même commune de Villeneuve-Loubet, qui présente l'avantage d'être très pratique.
Vous comprendrez aisément que les élus de cette commune, comme des communes environnantes, s'opposent à cette sorte de fatalité, qui ne devrait pas en être une.
Cette deuxième décharge présente l'inconvénient d'être beaucoup plus proche du village. On peut le constater déjà visuellement parce que le défrichement a commencé avant même d'attendre le résultat de la commission d'enquête publique. En outre, le professeur de géologie consulté dans le cadre de la commission d'enquête n'exclut pas un risque réel de pollution de la nappe phréatique.
L'administration semble cautionner ce projet, par la voix de ses plus hautes autorités, en affirmant que c'est la seule proposition qui lui aurait été faite, ce qui est manifestement faux.
D'autres solutions alternatives lui ont été proposées, qui ont été révélées par la presse et qui ont été parfois refusées sous des prétextes tout à fait particuliers. Ainsi, une société visant à faire une usine de compost sur la zone industrielle départementale de Carros s'est vu adresser une fin de non-recevoir après six mois de discussion avec la DDAF sous prétexte qu'il n'y aurait pas de débouchés pour ce produit dans les Alpes-Maritimes. Le week-end prochain, le salon de la Vie saine à Antibes, organisé par Région verte de Noël Perna, sera l'occasion d'indiquer un autre site de décharge possible tout aussi satisfaisant.
Une commission d'enquête est actuellement à l'oeuvre, qui rendra prochainement ses conclusions.
Si je me permets d'appeler aujourd'hui votre attention, madame la ministre, c'est d'abord parce que deux de mes courriers n'ont pas reçu de réponse précise, et parce que, au-delà de la réponse que vos services vous ont préparée, je souhaiterais vivement votre intervention personnelle pour que la population n'ait pas le sentiment d'une certaine collusion entre les services de l'Etat et les intérêts d'un exploitant privé qui n'est que la filiale d'un grand groupe ayant déjà eu l'occasion de faire la une de l'actualité en d'autres circonstances.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le député, vous avez raison, la fermeture prochaine de la décharge du Jas de Madame nécessite la mise en place de solutions de remplacement, d'autant que cette décharge reçoit annuellement 414 000 tonnes de déchets, ce qui est considérable.
Dans la perspective de cette fermeture, prévue initialement en 1996, un important travail de réflexion et de concertation a été conduit dès le début des années 90, à l'initiative de l'Etat.
Deux syndicats de traitement ont alors été créés, le SIVEDU, dont vous êtes le président depuis 1995, puis le SIVADES. Ils regroupent les principales communes clientes de la décharge actuelle. Leur mission est de mettre en place des unités de traitement susceptibles de la remplacer.
Dès 1992, LE SIVEDU a fait réaliser une consultation préalablement à la mise en place d'un complexe de valorisation des déchets. En 1995, il a remis en question ses choix précédents et a réalisé, en 1997, l'étude de différents scénarios de gestion sélective des déchets afin d'aboutir à une gestion plus globale.
Le SIVADES a mené une démarche similaire dès 1994, mais l'annulation de la consultation par le Conseil d'Etat en 1996 a conduit à reprendre l'ensemble des études préalables.
Les unités multifilières du SIVEDU et du SIVADES ne seront pas fonctionnelles avant 2003. Pour faire face à la fermeture inéluctable de la décharge du Jas de Madame en 1999, le préfet a lancé en 1997 un appel à projet auprès de l'ensemble des collectivités et des maîtres d'ouvrage.
Aujourd'hui, un seul dossier de demande d'autorisation d'exploiter a été déposé. Il est instruit conformément à la réglementation en vigueur. Un second projet, me dit-on, est sur le point d'être déposé auprès des services de la préfecture. Dans les deux cas, il s'agit de projets de centres de stockage portés par des entreprises du secteur privé.
Sur place, me dites-vous, les habitants auraient le sentiment qu'il existe une collusion entre les services de l'Etat et les intérêts de grands groupes. C'est une accusation très grave. Elle suffit en tout cas à ce que je me penche de façon plus précise sur ce dossier. Je vous serais donc très reconnaissante de me fournir les éléments en ce sens.
La responsabilité de l'élimination des déchets des ménages appartient aux communes ou aux établissement publics de coopération. L'Etat joue pourtant un rôle très actif dans la recherche de solutions pour le traitement des déchets - je pense à l'adoption récente du plan départemental d'élimination des déchets ménagers et assimilés - mais il ne peut faire l'impasse sur le rôle que jouent les élus et les structures de coopération intercommunale, auxquels revient en priorité la responsabilité de conduire cette politique.
M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.
M. Lionnel Luca. Madame la ministre, je vous remercie de bien vouloir vous pencher plus particulièrement sur le dossier. Vous pensez bien que, si je me permets de faire une telle allusion, c'est parce que la situation de monopole qui prévaut dans les Alpes-Maritimes ne vous est pas inconnue. Je souhaite donc que l'Etat soit totalement impartial et j'apprends ce matin avec bonheur qu'un deuxième dossier sera déposé. S'il y a plusieurs propositions, cela infirmera le sentiment que l'on pouvait avoir après certains refus.
Comme nous avions eu l'occasion de le dire dans le groupe d'études parlementaire sur le traitement des déchets, il faudra peut-être réfléchir au problème qu'ont les petites communes pour faire face non pas à la collecte, qui me paraît tout à fait normale, mais au traitement des déchets. Les départements pourraient peut-être jouer un rôle beaucoup plus important que celui qu'ils veulent bien jouer aujourd'hui. Très franchement, en effet, comment des collectivités locales peuvent-elles mettre en oeuvre leur compétence sans services véritablement organisés face à des intérêts très puissants, la compétence administrative étant aussi toute relative ? L'opération annulée par le Conseil d'Etat était en effet réalisée par une administration d'Etat et financée par le syndicat intercommunal. Il faudrait réfléchir à ce problème et déboucher peut-être sur une répartition des tâches qui permettrait aux communes de ne pas être pieds et mains liés.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Juste un mot, monsieur le député, pour vous rappeler que les petites communes sont évidemment invitées à choisir l'intercommunalité et la coopération, mais qu'elles peuvent toujours faire appel aux services de l'ADEME, l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, qui ne mégote jamais son soutien et ses conseils aux collectivités qui la sollicitent.
RPR 11 REP_PUB Provence-Alpes-Côte-d'Azur O