Texte de la QUESTION :
|
M. Pascal Terrasse attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le taux de TVA applicable dans certaines activités de service. Nombreuses sont celles, en effet, qui emploient une main-d'oeuvre importante, constituant ainsi un fort réservoir d'emplois qui structure l'économie de régions entières en l'absence d'emplois industriels. Dans un contexte de plus en plus fort de concurrence des territoires au niveau européen, et à l'approche de l'application de la réduction du temps de travail dans les petites et moyennes entreprises, il est temps de donner un signe économique fort pour éviter la dépréciation de certaines professions et leur garantir une marge de manoeuvre qui leur permettra de s'adapter à ces défis sans les précipiter dans la crise. Sont concernés en premier lieu notamment les métiers de bouche, ceux de l'hôtellerie, de la restauration et de l'accueil touristique, dont la masse salariale représente plus de 50 % des charges. La Cour de justice des Communautés européennes a condamné ces derniers mois le régime français de TVA applicable dans la restauration. Certains pays européens ont quant à eux obtenu le droit d'appliquer un taux réduit de TVA pour ce même secteur. Le régime de TVA applicable aux entreprises de service ne répond plus aujourd'hui aux contraintes et enjeux qui s'imposent à elles. Aussi, il lui demande que soit étudiée avec attention, à l'occasion du projet de loi de finance pour l'année 2002, la faisabilité d'une baisse du taux de TVA pour les entreprises de service fortement utilisatrices de main-d'oeuvre.
|
Texte de la REPONSE :
|
Par un arrêt du 29 mars 2001 la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a jugé non conforme à la sixième directive TVA la tolérance administrative qui permettait, sous certaines conditions, de ne pas soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) les sommes perçues au titre du service obligatoire. Cette tolérance était susceptible de s'appliquer à toutes les entreprises prestataires de service dont le personnel est en contact direct avec la clientèle et notamment aux restaurateurs et aux coiffeurs. Il était possible de considérer, et le Gouvernement a plaidé en ce sens, que cette pratique ancienne qui était laissée au libre choix du prestataire n'entraînait aucune distorsion de concurrence. Toutefois, la CJCE a rappelé le principe de neutralité fiscale qui s'oppose notamment à ce que des opérateurs économiques qui effectuent les mêmes opérations soient traités différemment en matière de perception de la TVA. Le Gouvernement est bien évidemment tenu de se conformer à cette décision. Ainsi, l'instruction administrative du 15 juin 2001 publiée au Bulletin officiel des impôts 3 A-8-01 abroge la tolérance administrative. Il faut cependant expliquer et relativiser la portée de cette décision. Tout d'abord, beaucoup de restaurants et de salons de coiffure, en l'absence de personnel salarié, ne pouvaient pas se prévaloir de la mesure de tolérance administrative. Il en va de même pour tous ceux qui ont du personnel mais qui n'est pas rémunéré au pourboire. En effet, le dispositif sanctionné par la CJCE était assorti de conditions très précises de partage, de transparence et de déclaration de ces sommes. Pour les établissements réellement affectés par cette décision, la conséquence sur les prix sera limitée (de l'ordre de 2 %) et devrait être à la charge du client. En outre, l'instruction du 15 juin 2001 précise que devront être soumises à la TVA les sommes perçues au titre du service obligatoire à compter du 1er octobre 2001. Les professionnels disposeront ainsi du délai nécessaire pour se conformer à ces nouvelles règles. Enfin, les vrais pourboires, c'est-à-dire la somme d'argent laissée volontairement au personnel, ne sont, bien entendu, pas concernés par cette jurisprudence. Par ailleurs, les règles communautaires de droit commun en matière de taux de TVA limitent l'application du taux réduit aux seules opérations reprises sur la liste annexée à la directive n° 92-77 du 19 octobre 1992 relative au rapprochement des taux de TVA. Or les prestations de restauration et de coiffure n'y figurent pas. Ces prestations ne peuvent pas non plus bénéficier des dispositions de la directive communautaire n° 1999/85/CE du 22 octobre 1999 qui autorise les Etats membres à appliquer, à titre expérimental, pour une durée de trois ans jusqu'au 31 décembre 2002, un taux réduit de TVA à certains services à forte intensité de main-d'oeuvre. La liste des services susceptibles de bénéficier de cette mesure comprend les petits services de réparation (bicyclettes, chaussures et articles de cuir, vêtements et linge de maison), la rénovation et la répartition des logements privés, le lavage de vitres et le nettoyage de logements privés, les services de soins à domicile ainsi que la coiffure. Lors de son adoption, les Etats membres ont décidé de ne pas y faire figurer le secteur de la restauration. En outre, chaque Etat membre est tenu de limiter l'expérience à deux, voire trois à titre exceptionnel, des catégories de services ainsi définies. La France a décidé d'appliquer le taux réduit de la TVA, d'une part, aux travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur les locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans, d'autre part, aux services d'aide à la personne, y compris le nettoyage de logements privés fournis par des entreprises agréées en application de l'article L 129-1-II du code du travail. Ces mesures sont inscrites aux articles 5 et 7 de la loi de finances pour 2000 car le Parlement les a jugées prioritaires. Le choix de ces secteurs correspond à la volonté de développer l'emploi, notamment en favorisant la réduction du travail dissimulé et de faciliter l'amélioration du parc de logements et la vie quotidienne des ménages. En décidant l'application du taux réduit à trois des cinq de ces catégories de services retenues par les Etats membres, la France a ainsi utilisé entièrement les marges de manoeuvre dont la directive lui permet de disposer.
|