Texte de la QUESTION :
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M. Kofi Yamgnane attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la tenue, à Oslo, d'une conférence organisée conjointement par la Norvège, l'UNICEF et le BIT en vue de parvenir à l'établissement d'un programme mondial d'action contre le travail des enfants dans le monde. L'exploitation des enfants demeure une réalité à l'échelle mondiale. L'on estime, en effet, qu'à l'heure actuelle, de par le monde, près de 250 millions d'enfants, pour la plupart originaires d'Afrique et d'Asie, sont employés aux travaux les plus divers et les plus difficiles, si ce ne sont les plus dangereux. Le travail des enfants, en dehors des conditions souvent d'extrêmes difficultés dans lequel il s'exerce, est un facteur aggravant de retard pour le développement des économies dans lesquelles il est en vigueur. Conséquence d'inégalité, l'absence d'éducation et l'habitude de la servitude constituent de puissants vecteurs de reproduction de ces mêmes inégalités dans le futur. Notre pays a signé la convention internationale de 1989 relative aux droits de l'enfant, convention qui reconnaît, dans son article 31, « le droit de l'enfant d'être protégé contre l'exploitation économique et de n'être astreint à aucun travail comportant des risques ou susceptible de compromettre son éducation ou de nuire à son développement physique, mental, spirituel, moral ou social ». Pour près de 250 millions d'enfants âgés de cinq à quatorze ans, cette convention n'est restée qu'une vertueuse promesse sans lendemain, que les difficultés de réalisation pratiques rencontrées par les signataires ne sauraient excuser. A l'heure où sont remis en cause les schémas simplificateurs appuyés sur la seule répression et son lot de sanctions commerciales, au profit d'une approche tenant compte des réalités culturelles et socio-économiques des situations rencontrées, la conférence d'Oslo se doit d'apporter des éléments de réponses véritablement applicables et de faire avancer cette grande cause universelle. Alors même que de nombreux Etats ont dépêché sur place des membres de leur gouvernement, la France a délégué auprès de cette conférence son ambassadeur en Norvège. Une telle situation, outre l'image peu favorable qu'elle donne de notre pays hors de nos frontières et les incidences négatives à prévoir en matière économique du fait du développement d'une concurrence déloyale appuyée sur la quasi-inexistence du coût de la main-d'oeuvre induit, est de nature à faire naître le doute quant à la réalité de la volonté française de mettre un terme au développement de cette forme moderne d'esclavage qu'est le travail des enfants. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser la démarche suivie en la matière par le Gouvernement.
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Texte de la REPONSE :
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L'honorable parlementaire a bien voulu appeler l'attention du ministre sur l'absence de personnalité de rang ministériel à la conférence d'Oslo qui s'est consacrée au travail des enfants et sur la démarche que le Gouvernement entend suivre en ce domaine. La France accorde, tant au plan national, qu'international, une haute priorité à la protection de l'enfance dans tous ses aspects (droits, santé, bien-être, éducation, environnement). En particulier, elle apporte au fléau que représente le travail des enfants dans le monde une attention toute particulière, consciente qu'il s'agit aujourd'hui d'une des plus graves violations des droits de l'enfant et d'un véritable défi pour la communauté internationale. C'est pourquoi, elle a décidé d'oeuvrer de manière très active à l'éradication de ce phénomène, qualifié de « forme moderne de l'esclavage », et qui a fait l'objet cette année de deux grandes conférences internationales, l'une à Amsterdam en février, l'autre à Oslo en octobre. Les membres de la délégation française, représentant à Oslo le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'emploi et de la solidarité ainsi que le secrétariat d'état, chargé de la coopération, ont joué un rôle important tout au long de la conférence, y compris par leur participation active à la rédaction du programme d'action. Ce programme, adopté à l'unanimité, identifie des stratégies concrètes assorties d'un calendrier et appelle les pays à accorder une priorité à l'abolition immédiate des formes les plus intolérables et dangereuses du travail des enfants. Par ailleurs, la détermination du Gouvernement d'éradiquer ce fléau se traduit, sur le plan international, par des actes concrets. La France, avec ses partenaires européens, participe activement aux travaux menés sur ce thème au sein des diverses instances internationales compétentes, notamment à l'OIT et à l'UNICEF, ainsi qu'à l'Assemblée générale des Nations Unies et à la Commission des droits de l'homme. Elle est partie à tous les instruments internationaux pertinents (la Convention des droits de l'enfant et la convention 138 de l'OIT sur l'âge minimum d'accès à l'emploi). Elle est associée à un certain nombre de projets conduits sur le terrain par l'UNICEF et l'OIT. Elle participe notamment au financement du programme international pour l'élimination du travail des enfants (IPEC) à hauteur de 3 MF pour 1997, programme qui concentre avec efficacité son action sur les formes les plus inacceptables de ce phénomène : travaux dangereux, travail forcé, emploi des enfants en dessous de 12 ans, enfants travaillant dans les rues. La France a annoncé sa décision de poursuivre, dans les années à venir, son effort financier au bénéfice de ce programme. Elle a lancé, en collaboration avec l'UNICEF, des projets visant à améliorer les conditions sociales des populations défavorisées de plusieurs capitales africaines. Face au faible taux de scolarisation, elle a pris l'initiative de lancer, dans le cadre d'actions de développement au profit d'une quarantaine de pays, essentiellement africains, des programmes d'éducation de base qui mettent l'accent sur l'accès à l'école et la qualité de l'enseignement et qui contribueront à terme à réduire le travail des enfants. Les efforts menés dépassent l'éducation formelle pour inclure, dans le cadre d'opérations de proximité auprès des populations les plus défavorisées, des actions d'alphabétisation. Enfin, ainsi que le recommande le programme d'action adopté à Oslo, la France prendra une part active à l'élaboration et à l'adoption d'une nouvelle convention de l'OIT sur les formes les plus intolérables du travail des enfants, qui sera discutée lors de la prochaine conférence générale du travail de juin 1998. Malgré la grande complexité et l'ampleur du problème, la France fait siens les propos optimistes du directeur général de l'OIT qui déclarait à Oslo que « le combat contre le travail des enfants est bien engagé et peut être gagné dans les quinze années à venir dans tous les pays. »
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