Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Claude Mignon appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés soulevées par l'association pour l'accompagnement de la réforme des prestations compensatoires en ce qui concerne l'application ou la non-application par les tribunaux des dispositions prévues par la loi du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce. L'AARPEC a, en effet, constaté que de nombreux délibérés de jugement statuant sur des requêtes en révision font apparaître une exclusion du champ d'application de la loi de conventions homologuées dans lesquelles la révision n'avait pas été prévue antérieurement au nouveau dispositif législatif. Il a été constaté également que le remariage ou le concubinage notoire de la créancière était inégalement apprécié selon les juridictions, certaines d'entre elles n'en tenant parfois aucun compte. L'association a constaté qu'il n'était pas toujours pris acte des sommes déjà versées, parfois même il n'était pas exigé que la créancière justifie de ses ressources. Par ailleurs, la règle de déduction de la pension de réversion est diversement appliquée. Il lui demande, par conséquent, quelle est sa position sur ces difficultés ressenties sur le terrain par de nombreux débiteurs de rentes viagères qui ne comprennent pas que leurs requêtes en révision soient rejetées alors qu'ils justifient connaître de réelles difficultés financières. Il lui demande également si elle entend préciser à l'avenir la loi du 30 juin 2000, le cas échéant par voie de circulaire, pour mieux faire connaître et surtout mieux faire appliquer ces nouvelles dispositions légales et de manière cohérente sur l'ensemble du territoire national.
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Texte de la REPONSE :
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La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le législateur, en votant la loi du 30 juin 2000, relative à la prestation compensatoire en matière de divorce, n'a pas souhaité introduire des dispositions permettant de mettre un terme de plein droit au versement de la rente allouée au titre de la prestation compensatoire. En effet, il est apparu que le remariage ou le concubinage notoire du créancier n'est pas toujours synonyme d'amélioration de sa situation personnelle. Il convient dès lors d'apprécier cet élément nouveau au vu des circonstances propres à l'espèce. Le législateur a fait en revanche le choix d'assouplir les conditions d'obtention de la révision de la rente, en conférant au juge aux affaires familiales un large pouvoir d'appréciation des circonstances de fait. En ce qui concerne la transmission de la rente aux héritiers du débiteur, le législateur a préféré, plutôt que de déroger au droit commun des successions, mettre en place un mécanisme plus souple, qui tienne compte des intérêts des parties, au vu des situations particulières. S'agissant des rentes allouées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi précitée, il est prévu que les pensions de réversion éventuellement servies du chef du conjoint décédé seront déduites de plein droit du montant de la rente. Ce mécanisme permet de limiter, voire de supprimer la charge pesant sur les héritiers du débiteur de la prestation. Concernant les rentes antérieures et afin de ne pas porter atteinte à la situation et aux droits acquis du créancier, la déduction n'est pas automatique. Il incombe aux héritiers du débiteur de saisir le juge d'une demande en déduction de la pension de réversion. Dans ces deux cas, le débiteur ou ses héritiers sont désormais autorisés à saisir le juge, dès lors qu'ils rapportent la preuve d'un changement important de la situation des parties depuis la décision ayant fixé la prestation compensatoire. Il appartient alors au magistrat d'apprécier si la nouvelle situation matrimoniale du créancier ou le décès du débiteur sont constitutifs d'un tel changement. En outre, le principe même du divorce sur requête conjointe justifie que la convention homologuée, expression du consentement libre et éclairé des parties, ne puisse pas être remise en cause ultérieurement. Il appartient donc aux époux de veiller, lors de l'élaboration de la convention définitive, à ce qu'une clause permettant la révision en cas de changement ultérieur significatif de leur situation ou fixant un terme à la rente, soit insérée. En conséquence, si un bilan de l'application de la loi nouvelle va être établi prochainement, au vu des éléments recueillis auprès des juridictions, aucune modification n'est envisagée sur les choix fondamentaux qui ont guidé la réforme. Seules des mesures d'adaptation pourront être éventuellement prises si la nécessité s'en fait sentir.
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