FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 6359  de  M.   Brana Pierre ( Socialiste - Gironde ) QE
Ministère interrogé :  Premier Ministre
Ministère attributaire :  Premier Ministre
Question publiée au JO le :  17/11/1997  page :  4006
Réponse publiée au JO le :  02/03/1998  page :  1169
Rubrique :  anciens combattants et victimes de guerre
Tête d'analyse :  résistants
Analyse :  défense des intérêts moraux. passagers du Massilia
Texte de la QUESTION : M. Pierre Brana appelle l'attention de M. le Premier ministre sur une exigence de fait historique et le devoir de mémoire de la nation. Il s'agit, par un geste fort, de rendre un hommage solennel à des hommes et à des femmes, notamment aux vingt-sept parlementaires qui ont refusé les pleins pouvoirs à Pétain, qui se sont embarqués sur le Massilia le 21 juin 1940. Ce devoir de vérité sur les passagers de ce bateau a été exprimé en particulier par Marie-Claire Mendès-France, présidente de l'Institut Pierre-Mendès-France, dans le journal Le Monde du 31 octobre 1997. Depuis plusieurs mois, témoins, journalistes, historiens, personnalités politiques et religieuses et plus hautes autorités de l'Etat rappellent des faits, dénoncent des compromissions, font acte de « repentance » et reconnaissent la part de responsabilité de l'Etat et des gouvernements pendant les heures sombres de l'occupation en 1940. Dans le souvenir des Français, l'appel du 18 juin du général de Gaulle et, à un degré moindre, le refus des « quatre-vingts » parlementaires de voter les pleins pouvoirs à Pétain le 10 juillet font passer sous silence ce que l'on peut considérer comme le premier acte de résistance de la représentation nationale. Oubliés les vingt-sept parlementaires et les passagers, civils et militaires, embarqués au Verdon, en Gironde, à destination de l'Afrique du Nord. Ils refusaient pourtant le déshonneur et la capitulation qu'a symbolisés le lendemain même l'armistice demandé par Pétain. Particulièrement signifiant de l'honneur national et des valeurs républicaines, cet embarquement fut décidé le 16 juin 1940 sur ordre des présidents de la chambre des députés et du Sénat, Jules Jeanneney et Edouard Herriot, et du président du Conseil, Paul Reynaud. Jugés, condamnés à l'époque comme des traîtres et des déserteurs, encore souvent considérés comme tels aujourd'hui, ces passagers partaient hors métropole, vers des territoires sous domination française, assurer la légitimité de la République et poursuivre la lutte contre l'ennemi en rejoignant des forces militaires. Sans retirer le mérite des compagnons de la France libre et celui de nombreux résistants, il lui demande donc s'il est dans ses intentions de rendre justice à ces oubliés - de tous bords politiques - de l'histoire. Ce serait à la fois une reconnaissance officielle et une action de morale civique vis-à-vis notamment des jeunes générations, comme il l'a demandé dans sa déclaration de politique générale.
Texte de la REPONSE : L'honorable parlementaire attire l'attention de Monsieur le Premier ministre sur le devoir de mémoire de la nation à l'égard de celles et ceux, qui le 21 juin 1940, prirent place à bord du Massilia, pour rejoindre l'Afrique-du-Nord. Le courage de ceux qui choisirent de résister, leur lucidité, la clairvoyance dont ils ont fait preuve en refusant de participer au Gouvernement qui allait se mettre en place quelques jours plus tard honore la France. A l'instar des parlementaires qui allaient refuser le 10 juillet 1940 de donner les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, celles et ceux qui embarquèrent à bord du Massilia, dès le 21 juin, incarnent les valeurs fondatrices de la République : Liberté, Egalité, Fraternité. Monsieur le Premier ministre est extrêmement attentif à ce que ce devoir de mémoire soit respecté. Ainsi, dès le 10 juillet 1997, Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, rendait un hommage solennel, au nom du Gouvernement, aux 80 parlementaires qui prirent la défense de la démocratie menacée, bafouée. Au-delà de ces gestes symboliques, le Gouvernement entend également traduire par des actes la reconnaissance du pays envers toutes les femmes et hommes qui, parfois au prix de leur vie, ont combattu pour défendre les valeurs de la République. Ainsi, la loi de finances 1998 traduit cette préoccupation : quarante millions supplémentaires ont été débloqués afin de permettre aux anciens combattants d'Afrique du Nord, qui sont au chômage et qui ont cotisé 40 ans, de bénéficier d'un dispositif équivalent à celui de la retraite anticipée. Cette décision vient renforcer le choix budgétaire qu'avait effectué le Gouvernement de limiter la baisse des crédits affectés au secrétariat d'Etat aux anciens combattants à 3,5 %, alors même que le nombre d'ayants droit diminue année après année. Il faut rappeler que le budget 1997 avait été marqué par une diminution beaucoup plus forte de 5,19 %.
SOC 11 REP_PUB Aquitaine O