Texte de la QUESTION :
|
M. Robert Lamy appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'application de la loi du 30 juin 2000 relative à la révision de la prestation compensatoire. Il semblerait que l'application de la loi ne soit pas conforme à son esprit et génère des injustices. Ainsi, l'application de cette loi conduit à la distinction de deux catégories de Français, les nouveaux et les anciens divorcés. En effet, de nombreux délibérés de jugements statuant sur des requêtes en révision font apparaître quelques inadaptations. Ainsi sont exclues du champ de l'application de la loi les conventions homologuées dans lesquelles la révision n'a pas été prévue antérieurement au nouveau dispositif législatif. Il existe une totale subjectivité dans l'appréciation de l'importance des changements survenus depuis le jugement du divorce. Il a été constaté que, dans certains cas, le débirentier est tenu pour responsable financièrement et moralement de l'instabilité du nouveau couple de son ex-épouse. De plus, très souvent, le concubinage de la créancière n'est pas pris en compte et la remise de réduction de la pension de réversion n'est pas appliquée. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures elle entend prendre afin de faire cesser ces pratiques jurisprudentielles disparates et inéquitables.
|
Texte de la REPONSE :
|
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que, votée à l'initiative du Parlement, la loi du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce a considérablement assoupli les modalités de révision de celle-ci lorsqu'elle est fixée sous forme de rente. Entré en vigueur le 1er juillet 2000, ce texte a suscité un certain nombre d'interrogations qui ont amené la chancellerie à dresser un bilan aussi exhaustif que possible des premières applications de la loi nouvelle, préalable indispensable à toute éventuelle adaptation. L'ensemble des juridictions a été consulté. Il ressort tout d'abord de la synthèse des contributions, qui vient d'être achevée, que le nombre d'affaires tendant à la révision de prestations compensatoires est très réduit, voire marginal, ce qui ne peut que relativiser les difficultés d'application que la loi nouvelle a pu susciter. En outre, le dépouillement des décisions rendues révèle que la jurisprudence, remplissant pleinement son rôle a, d'ores et déjà, précisé les conditions de la révision et notamment, celle de changement important dans la situation des parties ouvrant droit à révision. Ainsi, le remariage, le concubinage, l'exercice d'une activité professionnelle ou encore le fait d'hériter peut constituer un tel changement selon les circonstances d'espèce, appréciées souverainement par les juridictions sous le contrôle de la Cour de cassation. Il subsiste néanmoins quelques divergences d'interprétation notamment sur le contenu et la portée de l'attestation sur l'honneur que les parties doivent produire aux débats pour justifier de leurs ressources et conditions de vie ainsi que certaines difficultés portant sur les méthodes à appliquer pour convertir la rente en capital. Un décret de procédure civile en voie de finalisation et une circulaire en cours d'élaboration devraient permettre d'apporter des réponses adaptées. En revanche le législateur n'a pas souhaité, à juste titre, introduire des dispositions permettant de mettre un terme de plein droit au versement de la rente allouée au titre de la prestation compensatoire. Le remariage, ou le concubinage notoire du créancier, n'est en effet pas toujours synonyme d'amélioration de sa situation personnelle. Il convient dès lors d'apprécier cet élément nouveau au vu des circonstances propres à chaque espèce, dans le cadre d'une demande en révision fondée sur l'existence d'un changement important dans la situation des parties depuis la décision ayant fixé la prestation compensatoire. En ce qui concerne la transmission de la rente aux héritiers du débiteur, le législateur a préféré, plutôt que de déroger au droit commun des successions, mettre en place un mécanisme souple, qui tienne compte des intérêts des parties, au vu des situations particulières. S'agissant des rentes allouées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi précitée, il est prévu que les pensions de réversion éventuellement servies du chef du conjoint décédé seront déduites de plein droit du montant de celles-ci. Ce mécanisme permet de limiter, voire de supprimer la charge pesant sur les héritiers du débiteur de la prestation. Il est vrai que, concernant les rentes antérieures, la déduction n'est pas automatique afin de ne pas porter atteinte à la situation et aux droits acquis du créancier. Mais il incombe alors aux héritiers du débiteur de saisir le juge d'une demande en déduction de la pension de réversion. Quant à la révision des prestations fixées par les parties dans le cadre du divorce sur requête conjointe, l'article 23 de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral, qui complète l'article 279 du code civil, permet au débiteur de saisir le juge d'une demande en révision sur le fondement des articles 275-1, 276-3 et 276-4 dans les mêmes conditions ; qu'une clause spécifique ait été incluse dans la convention ou non, le critère tenant au changement important dans la situation des parties étant applicable en toute hypothèse. Au regard de l'ensemble de ces adaptations, il n'apparaît ni nécessaire ni souhaitable de remettre en cause les choix fondamentaux qui ont été ceux du Parlement.
|