Texte de la QUESTION :
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M. Christian Bataille attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des personnes confrontées à l'application des règles qui régissent le principe de caution solidaire et, plus particulièrement, sur les conséquences parfois désastreuses du règlement d'une dette qui fait l'objet de litiges et ne peut pas être soldée dans des conditions acceptables compte tenu du comportement des organismes bancaires. En effet, lorsqu'un entrepreneur, caution pour son établissement et contraint par un promoteur indélicat à la liquidation, est condamné au remboursement de la dette, cette dette ne cesse d'augmenter après application, au titre de sa caution, des frais de poursuite, de la cause pénale de remboursement anticipé, et de la clause qui prévoit, en cas de difficultés, un taux d'intérêt majoré. Dans un cas extrême, on peut donc assister à une amplification considérable de la dette chaque année, surtout si tarde la nomination d'un expert pour évaluer avec exactitude cette dette qui s'accumule chaque jour ainsi que d'un spécialiste pour vérifier les calculs de la banque. Une telle situation engendre pour la personne concernée le remboursement total d'une somme trois fois supérieure au montant de la dette calculé à l'origine, à laquelle il convient d'ajouter les intérêts à taux majorés. Les organismes bancaires peuvent ainsi réaliser des profits considérables à partir de situations de grandes difficultés, les dispositions récentes qui prévoient d'imputer en priorité les sommes remboursées à la dette principale ne s'appliquant pas aux affaires en cours. Aussi, il lui demande si des modifications peuvent être apportées aux textes en vigueur afin de remédier à ces abus, en réformant également le principe souvent contestable qui consiste à faire supporter à une caution solidaire les frais de justice et accessoires, ainsi que des intérêts à taux majorés excessifs sans lien avec la réalité économique du moment. Par ailleurs, il lui demande si on peut envisager une réforme qui impose aux juridictions de faire procéder à la vérification par la Banque de France des sommes réclamées.
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Texte de la REPONSE :
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La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le recours croissant au cautionnement dans les différents secteurs de la vie économique et sociale a conduit le législateur, en raison notamment du développement du contentieux qui en est issu, à modifier certaines règles de ce contrat afin d'améliorer la protection de la caution, tant au moment de la formation du cautionnement qu'au moment de son exécution. Ainsi, au moment de la formation du contrat, la loi du 13 juillet 1979 relative à l'information et à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier a fait bénéficier la caution personne physique du même délai de réflexion que celui offert à l'emprunteur. La loi du 31 décembre 1989 sur le surendettement des particuliers a en outre subordonné, dans le domaine du crédit aux consommateurs, la validité de la convention à une mention manuscrite apposée par la caution, destinée à lui faire prendre conscience de l'étendue de son engagement. La loi de 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle a également prévu que le cautionnement solidaire d'un crédit à un entrepreneur individuel soit limité à un montant déterminé. Enfin, la loi du 21 juillet 1994 relative à l'habitat a réglementé le cautionnement des obligations issues d'un contrat de location à usage d'habitation ou mixte, en prévoyant notamment une mention manuscrite obligatoire. Lors de l'exécution du contrat, la loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises a rendu obligatoire l'information annuelle des cautions par les établissements de crédit sur le montant garanti, la durée de l'engagement et, lorsque l'engagement est à durée indéterminée, sur la faculté de révocation du cautionnement. Cette disposition a été étendue à tous les créanciers par la loi du 11 février 1994, en cas de cautionnement à durée indéterminée consenti par une personne physique pour garantir une dette professionnelle d'un entrepreneur individuel. Le souci de renforcer les intérêts de la caution a également été pris en compte par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, qui a sensiblement accru son droit à l'information, en instituant une information annuelle sur l'évolution du montant de la créance garantie et de ses accessoires, pour tout cautionnement indéfini contracté par une personne physique, ainsi qu'une information sur la défaillance du débiteur principal. Cette loi a également prévu de laisser, en toute hypothèse, un minimum de ressources à la caution en cas de poursuites du créancier. Dernièrement, la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécutité financière a renforcé l'efficacité des sanctions prévues en cas de manquement à l'obligation d'information instituée par la loi du 1er mars 1984, en prévoyant que les paiements effectuées par le débiteur principal devaient être réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette. La situation particulièrement difficile à laquelle les cautions de dettes professionnelles demeurent bien souvent confrontées a incité le Gouvernement a engager une nouvelle réflexion sur la pratique de ce type de sûreté et sur les modifications susceptibles, le cas échéant, d'en parfaire le régime juridique. Dans le cadre de la préparation du projet de loi d'orientation pour la petite entreprise et l'entreprise artisanale, le secrétaire d'Etat aux petites entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation a ainsi confié au Conseil national du crédit et du titre le soin d'étudier les améliorations qui pourraient être apportées au sort des cautions de dettes professionnelles. Si les orientations que pourrait prendre une réforme ne sont pas encore arrêtées, l'objectif poursuivi consiste à mieux garantir les intérêts de la caution sans perdre de vue l'intérêt que ce type de sûreté peut présenter pour le crédit des particuliers et des entreprises.
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