FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 6549  de  M.   Dehaine Arthur ( Rassemblement pour la République - Oise ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  24/11/1997  page :  4166
Réponse publiée au JO le :  04/05/1998  page :  2549
Rubrique :  moyens de paiement
Tête d'analyse :  chèques
Analyse :  chèques impayés. provision suffisante. définition
Texte de la QUESTION : M. Arthur Dehaine appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'absence de précisions relative à la « provision suffisante » due au créancier bénéficiaire d'un chèque impayé. Cette lacune alimente de nombreuses interprétations contentieuses entre les créanciers bénéficiaires de chèques impayés, d'une part, et les banques tirées - teneurs des comptes des émetteurs défaillants -, d'autre part. L'article 1254 du code civil, resté inchangé depuis sa promulgation, impose d'imputer d'abord les paiements partiels faits par le créancier sur les intérêts et non sur le capital (sauf accord contraire du créancier). La Cour de cassation ne s'était jamais expressément prononcée sur la question de l'imputation des paiements partiels sur les frais de recouvrement d'une créance par préférence au capital. Par l'arrêt du 7 février 1995 (cf. Répertoire du notarial Defrénois de 1995, p. 942), la Cour de cassation a affirmé qu'au même titre que les intérêts visés par l'article 1254 du code civil, les frais de recouvrement d'une créance constituent des accessoires de la dette et que le débiteur ne peut, sans le consentement du créancier, imputer les paiements qu'il a faits sur le capital par préférence à ces accessoires. Le deuxième alinéa du même article 65-3 de la loi n° 91-1382 du 30 décembre 1991, modifiant le décret-loi du 30 octobre 1935, précise que : « le titulaire du compte recouvre la possibilité d'émettre des chèques lorsqu'il a justifié avoir [ ... ] constitué une provision suffisante et disponible destinée au règlement du chèque impayé par les soins du tiré ». De même le dernier alinéa de l'article 65-3 de la loi précitée stipule que : « En tout état de cause, les frais de toute nature qu'occasionne le rejet d'un chèque sans provision sont à la charge du tireur. » Sauf à contredire la doctrine prononcée par la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 7 février 1995 ; et pour mettre un terme au désordre persistant sur son interprétation, il lui demande de préciser si, en conformité avec la règle de droit, le montant de la provision suffisante due au porteur d'une créance constituée d'un chèque impayé est composé du nominal du chèque (ou capital de la dette), des frais et intérêts moratoires à compter de la date du rejet (ou accessoires de la dette), dans les conditions précitées à l'article 45 du décret-loi du 30 octobre 1935 modifié. Il lui demande ce qu'il entend faire pour remédier à cette situation.
Texte de la REPONSE : la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'aux termes de l'article 65-3 dernier alinéa du décret-loi du 30 octobre 1935 unifiant le droit en matière de chèques et relatif aux cartes de paiement « les frais de toute nature qu'occasionne le rejet d'un chèque sans provision sont à la charge du tireur ». En revanche, le porteur du chèque impayé n'est pas fondé à réclamer au banquier tiré le paiement des frais. Ainsi, la Cour de cassation a rappelé, dans un arrêt du 21 octobre 1997, « qu'il ne résulte d'aucune disposition de la loi que la banque ait l'obligation, lors de la seconde présentation, de payer, outre le montant du chèque, les frais et intérêts » (Cass. Com., 21 octobre 1997, Dalloz Affaires n° 43, 1997, chroniques, p. 424). Si le compte présente une provision suffisante à seconde présentation, l'établissement tiré ne règle donc que le nominal du titre, non les frais de recouvrement exposés par le porteur ou les intérêts de retard. Dans le cas inverse, le tiré est seulement tenu, par application des dispositions de l'article 36, alinéa 2 du décret n° 92-456 du 22 mai 1992 de délivrer, sans frais pour le porteur, un certificat de non-paiement. Il résulte de ces dispositions que le porteur ne peut, en principe, obtenir le paiement des intérêts et frais que dans le cadre d'un recours exercé directement contre le tireur. L'article 45 du décret-loi du 30 octobre 1935 prévoit d'ailleurs que le porteur peut réclamer « à celui contre lequel il peut exercer son recours » (un garant, en particulier le tireur, et non le banquier tiré qui a la qualité de débiteur principal) non seulement le montant du chèque impayé mais aussi les intérêts et frais.
RPR 11 REP_PUB Picardie O