FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 65866  de  M.   Sarre Georges ( Radical, Citoyen et Vert - Paris ) QE
Ministère interrogé :  culture et communication
Ministère attributaire :  culture et communication
Question publiée au JO le :  17/09/2001  page :  5291
Réponse publiée au JO le :  18/02/2002  page :  896
Rubrique :  audiovisuel et communication
Tête d'analyse :  France Télévision
Analyse :  financement. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Georges Sarre attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur l'avenir du financement de France Télévision. Suite à une plainte déposée par des opérateurs privés contre les services publics audiovisuels pour concurrence déloyale, notamment au titre des tarifs publicitaires, la Cour européenne vient d'ordonner à la Commission européenne de contrôler l'affectation des aides publiques des pays européens à destination de leur service public audiovisuel, en mettant en place un dispositif de surveillance des tarifs publicitaires et en définissant un contrat de service public spécifique. Si, d'aventure, la France devait être sanctionnée, qu'adviendrait-il du mode de financement actuel de France Télévision ? Serait-elle dans l'obligation, comme l'exige la Cour européenne, de rembourser une partie des sommes versées par l'Etat au titre de la redevance ? France Télévision est un service public dont le mode de financement est, et doit demeurer, une prérogative nationale. Il souhaite donc que le Gouvernement saisisse la Commission européenne afin de réaffirmer ce principe, garant de la qualité, de la spécificité et de la diversité de l'offre du service public audiovisuel. Enfin, une dotation budgétaire d'un milliard de francs a été octroyée à France Télévision en vue du lancement du numérique terrestre. Si l'injonction de la Cour européenne est confirmée, France Télévision serait dans l'obligation de rembourser les sommes déjà versées au titre de cette dotation. Il est évident que, sans l'aide financière de l'Etat, le service public audiovisuel n'a pas les moyens d'assurer seul son entrée dans le numérique terrestre. Aussi, si cette dotation devait être considérée comme non conforme aux règles européennes, il souhaite connaître par quels autres moyens elle envisage d'aider financièrement France Télévision à s'inscrire qualitativement dans le développement du numérique terrestre, nouvelle ère pour l'audiovisuel.
Texte de la REPONSE : Le protocole annexé au traité d'Amterdam a affirmé la compétence exclusive des Etats membres pour définir les missions imparties aux chaînes publiques de télévision et les modes de financement qui leur correspondent. Dans ce cadre, un financement mixte associant des ressources étatiques et commerciales (publicitaires notamment) est considéré comme pleinement légitime. Pour autant les radiodiffuseurs publics sont soumis, comme toutes les entreprises chargées d'une mission de service public, aux règles communautaires de concurrence et notamment à celles relatives aux aides d'Etat dont la Commission est chargée de vérifier le respect. Le rôle primordial des télévisions publiques dans la promotion de la culture et le maintien du pluralisme rend toutefois délicate l'application de ces règles et les difficultés rencontrées par la Commission dans l'examen des plaintes des opérateurs privés ont, depuis 1992, développé une insécurité juridique préjudiciable à l'ensemble du secteur audiovisuel. La diversification des activités des radiodiffuseurs publics (diffusion numérique et sur Internet notamment) rendant encore plus urgente une clarification des principes applicables en la matière, la France a, sous sa présidence (juillet-décembre 2000), invité les Etats membres et la Commission à réfléchir aux solutions juridiques envisageables. Une communication précisant les modalités d'application des règles relatives aux aides d'Etat au secteur de la radiodiffusion publique, préparée par les services de la concurrence de la Commission européenne en collaboration avec les Etats membres et les radiodiffuseurs, a été adoptée le 17 octobre 2001 et discutée lors du Conseil des ministres de la culture du 5 novembre 2001. La Commission reprendra l'examen des plaintes en cours, dont celle concernant France Télévision, au regard des principes définis dans ce texte. La communication répond aux voeux de la France, rappelés lors des conseils de Bruxelles (23 novembre 2000) et de Falun (22 mai 2001), d'assurer le maintien d'un service public audiovisuel fort. Elle reconnaît que les services publics de radiodiffusion peuvent être soustraits aux règles de concurrence afin d'assurer l'effectivité des principes posés par le protocole d'Amsterdam. Les aides dites « existantes », c'est-à-dire antérieures au traité de Rome, seront examinées au cas par cas sous l'angle des critères spécifiques définis par le règlement de procédure de la Commission du 22 mars 1999 et conforme à la jurisprudence de la Cour en la matière (date d'institution de l'aide, nature des bénéficiaires, évolution du montant et des modalités d'attribution, évolution du paysage audiovisuel national). La compatibilité de la redevance audiovisuelle avec le traité ne laisse pas place à des doutes sérieux, ses bénéficiaires (le secteur audiovisuel public, la modification de son paramètre étant indifférente) et ses principes d'assiette et de taux n'ayant pas été modifiés depuis 1949. En ce qui concerne les aides « nouvelles », postérieures au traité de Rome, la Commission vérifiera qu'il existe une définition officielle des missions de service public sans en apprécier le contenu, que la bonne exécution de ces missions est contrôlée par un organisme indépendant et que les activités de service public et celles de diversification commerciale sont clairement identifiées sur la plan comptable lorsque l'Etat a opté pour un mode de financement mixte. La Commission s'assurera également qu'il existe une proportionnalité entre le montant des financements publics accordés aux diffuseurs et les coûts de réalisation de leurs missions de service public, celles-ci pouvant désormais couvrir l'ensemble de la programmation et non plus requérir une distinction entre des programmes dits de service public et des programmes réputés de nature exclusivement commerciale. La Commission reconnaît enfin que le déploiement de l'activité des chaînes sur les nouveaux supports (numérique et Internet) et dans l'édition de contenus en ligne constitue un prolongement naturel de leurs missions de service public. En ce qui concerne la dotation en capital prochainement accordée à France Télévision pour son déploiement sur le réseau numérique terrestre, toutes les précautions juridiques ont été prises pour que les critères de compatibilité ci-dessus exposés soient respectés. Conformément au protocole d'Amsterdam, ce projet correspond à une extension des missions de service public de radiodiffusion. Les chaînes numériques créées répondront à des missions définies par la loi et par des cahiers des charges et leur bonne exécution fera l'objet d'un double contrôle du Parlement et du Conseil supérieur de l'audiovisuel. La Cour de justice n'a pour sa part pas encore eu l'occasion de se prononcer sur la question des aides d'Etat accordées aux diffuseurs publics. Un certain nombre d'articles de presse semblent avoir opéré un amalgame entre d'une part la communication de la Commission et d'autre part l'arrêt de la Cour du 12 juillet 2001 opposant la Commission européenne et l'Etat français à TF1. Cet arrêt a, en effet, été présenté comme comportant pour la Commission une obligation de définir la notion de service public audiovisuel et de procéder à une surveillance accrue des tarifs publicitaires pratiqués par les radiodiffuseurs publics. Or l'arrêt en question ne porte que sur une question d'ordre purement procédural (recevabilité d'une entreprise privée à former un recours en carence contre la Commission pour défaut d'adoption d'une décision dont elle n'aurait pas été destinataire). Bien qu'ayant donné gain de cause à TF1, il ne présente donc aucune incidence sur la question du financement des diffuseurs publics en général, ni sur les aides accordées par l'Etat français à France Télévision en particulier.
RCV 11 REP_PUB Ile-de-France O