Texte de la QUESTION :
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M. Albert Facon appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le problème des mines anti-personnel. Si la France s'est engagée à signer le traité d'interdiction totale des mines anti-personnel lors de son ouverture à la signature prévue pour la conférence d'Ottawa de décembre prochain, respectant ainsi une opinion publique communautaire largement favorable à une interdiction totale des mines anti-personnel, la question de l'universalité dudit traité ne semble toujours pas réglée. Certes, le traité négocié à Oslo depuis quelques années déjà permet une interdiction complète de la production, du stockage et de l'emploi des mines anti-personnel et contient des dispositions accordant aux Etats un délai raisonnable (quatre ans) pour procéder à la destruction de leurs stocks, refusant les exceptions, exemptions ou délais de mise en oeuvre prolongés ardemment défendus par certains Etats. Cependant, force est de constater que la souplesse des mécanismes de vérification du respect du délai de destruction, ainsi que l'absence de caractère universel risquent d'affaiblir les obligations de l'accord et d'empêcher la dynamique d'adhésion souhaitée. En outre, l'absence d'un accord sur l'interdiction des transferts (importations et exportations) qui pourrait être négocié à Genève dans le cadre de la conférence du désarmement tend à concourir à cet affaiblissement, en permettant un commerce mondial des mines aussi bien entre certains gouvernements qu'entre des acteurs non gouvernementaux. Pourtant, un tel accord obligeant tous les Etats semble le complément indispensable au traité d'Ottawa. Dans un contexte où 25 000 personnes sont victimes chaque année d'une arme devenue incontrôlable, il est clair que le gouvernement français doit montrer la voie d'une interdiction véritablement contraignante de ces mines et doit prendre toute sa responsabilité en déposant un projet de loi qui ne se bornera pas à interdire seulement la production et la vente des mines anti-personnel. Dans ces conditions, il lui demande quelles dispositions d'ordre interne il entend prendre et quelle position il entend défendre lors de la conférence d'Ottawa et, dans le cadre de l'action commune définie par l'Union européenne, pour qu'un terme soit enfin mis aux massacres engendrés par les mines anti-personnel grâce à un traité universel et contraignant.
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Texte de la REPONSE :
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L'honorable parlementaire a bien voulu soulever la question de l'universalisation de la Convention d'Ottawa et celle du rôle de la France à cet égard. La France a signé, le 3 décembre, à Ottawa, la Convention sur l'interdiction de la fabrication, de l'emploi, du stockage et du transfert des mines antipersonnel. Ce texte pose, à l'encontre des mines antipersonnel, une norme d'interdiction totale et sans exception dont la France s'était attachée à défendre le principe à l'occasion des négociations d'Oslo (septembre 1997). Le régime de vérification du respect des dispositions de la Convention d'Ottawa a été, comme la France en avait exprimé le souhait, substantiellement renforcé. Le gouvernement français s'efforcera d'en assurer une mise en oeuvre effective, notamment par la prise en compte des observations recueillies sur le terrain par des acteurs non institutionnels. Comme le souligne l'honorable parlementaire, l'absence d'universalité de la Convention d'Ottawa en constitue aujourd'hui la faiblesse essentielle. C'est pourquoi la France demeure attachée à l'ouverture de négociations sur la question des mines antipersonnel à la conférence du désarmement pour permettre de rallier aux principaux objectifs de cette Convention les grands pays producteurs et consommateurs de mines antipersonnel (Inde, Chine, Russie et Etats-Unis) qui ne sont pas disposés, à ce stade, à signer la Convention d'Ottawa. Ces Etats ont manifesté une certaine ouverture à l'égard d'un premier accord sur la question des transferts. Un tel accord permettrait d'assécher les marchés d'approvisionnement des acteurs qui font encore usage de mines antipersonnel. La France entend promouvoir l'ouverture de pareilles négociations dès la prochaine session de la conférence du désarmement, en janvier 1998. Cette position a été défendue par la France à l'occasion de la conférence de signature de la Convention d'Ottawa. Une référence au travail complémentaire à entreprendre à la conférence du désarmement a, par ailleurs, été acceptée par nos partenaires de l'Union européenne dans l'action commune adoptée par l'Union le 28 novembre dernier. Sur le plan national, le gouvernement français a imposé, dès 1993, un moratoire sur les exportations de mines antipersonnel. Ce moratoire a été étendu, en 1995, à la production de ce type d'armes. Le gouvernement français a par ailleurs annoncé, le 23 juin dernier, sa décision de renoncer sans exception à toute forme d'emploi des mines antipersonnel dès l'entrée en vigueur d'un traité efficace et, au plus tard, à la fin de 1999. Le gouvernement français déposera, au début de 1998, un projet de loi de ratification de la Convention d'Ottawa afin que son examen commence aussitôt que possible. Il est par ailleurs nécessaire de prévoir un projet de loi portant transposition dans notre ordre juridique interne d'un certain nombre de dispositions figurant dans la Convention d'Ottawa (s'agissant, notamment, des sanctions pénales en cas de violation de la Convention et de la mise en oeuvre du dispositif de vérification). Ce projet de loi sera déposé au Parlement dans le courant de l'année prochaine afin que son adoption puisse, en coïncidant avec l'entrée en vigueur de la Convention d'Ottawa, assurer la mise en oeuvre effective des engagements souscrits par la France.
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