Texte de la QUESTION :
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M. Yves Nicolin appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la subordination de la délivrance des visas d'entrée en France aux enfants mineurs adoptés à l'étranger, à la fourniture de la preuve du caractère définitif du jugement, lui imposant, ainsi qu'aux parents, un insupportable délai d'attente. Comme tout demandeur de visa de long séjour, l'enfant (ou son représentant légal) doit en principe remplir un formulaire auquel il joint, outre une photographie d'identité récente : un titre de voyage d'une validité supérieure d'au moins trois mois à celles du visa sollicité, des justificatifs de la situation socioprofessionnelle, les justificatifs d'un éventuel lien de type familial ou privé en France, un engagement de n'exercer aucune activité professionnelle soumise à autorisation, un justificatif d'hébergement en France, des justificatifs des moyens d'existence pour la durée du séjour et un justificatif d'une couverture médicale. Lorsque cet enfant étranger doit voyager en France en vue d'y être adopté, les services consulaires français lui imposent toutefois une condition supplémentaire : il (ses parents adoptants) doit apporter la preuve du caractère définitif du jugement du tribunal local prononçant son adoption, par la production d'un certificat de non-appel de ce jugement. Il lui indique que l'administration française est l'une des seules en Europe à avoir ajouté ainsi une telle exigence. Or, cette condition supplémentaire ne trouve sa justification et son origine dans aucun texte législatif ou réglementaire. Seule une instruction générale relative à l'état civil du 11 mai 1999 impose, aux termes du point 585.2, d'apporter la preuve du caractère définitif de la décision étrangère et ne concerne par définition que l'établissement de l'état civil et non la délivrance d'un visa. L'administration n'est donc absolument pas fondée à ajouter ainsi aux conditions qui président à la délivrance des visas, sauf à commettre un excès de pouvoir. Il lui rappelle que pendant ce délai, qui peut aller d'une dizaine de jours à quelques mois selon les pays, les parents adoptants se trouvent totalement bloqués sur place, avec l'enfant, supportant difficilement de lourdes contraintes d'hébergement, de climat, de dépenses élevées et vivant parfois dans des conditions de salubrité ou de sécurité tout à fait précaires. En outre, l'utilité d'interdire l'entrée en France de l'enfant dont l'adoption est prononcée par le tribunal local mais non encore définitive, n'apparaît pas clairement. Il est injuste que les cas, très rares, où un appel est interjeté et conduit à l'annulation de la première décision servent de justification à cette interdiction générale. Enfin, l'hypothèse se présentant alors même que l'enfant et les parents sont entrés sur le territoire français, il leur appartiendrait naturellement, le cas échéant en usant de moyens de coercition, de reconduire l'enfant dans son pays d'origine. Aussi, il lui demande d'indiquer précisément les fondements tant juridiques que d'opportunité qui s'opposent à cette délivrance de visa au mineur étranger dont l'adoption est d'ores et déjà prononcée.
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Texte de la REPONSE :
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La délivrance d'un visa long séjour aux enfants mineurs adoptés à l'étranger est effectivement subordonnée, entre autres conditions, à la preuve du caractère définitif du jugement d'adoption, afin de se conformer à la législation étrangère d'une part et de garantir à l'enfant un statut stable et reconnu à son arrivée en France d'autre part. En effet, dans nombre de pays, les décisions d'adoption sont assorties d'un délai d'appel durant lequel elles sont susceptibles d'être remises en cause. De telles situations surviennent régulièrement et constituent pour les familles comme pour l'enfant, une épreuve parfois traumatisante ; elles ne manqueraient pas de soulever de sérieuses difficultés avec les autorités compétentes du pays d'origine, si l'enfant se trouvait déjà en France. Il s'agit également de s'assurer que l'enfant adopté pourra, dans les meilleurs délais après son arrivée en France, bénéficier d'un statut juridique stable, lui conférant les mêmes droits sur le sol français que tout autre enfant. Or, les décisions d'adoption prononcées à l'étranger ne sont opposables en France qu'à la condition d'être définitives : même assorti d'une mise à exécution immédiate, un jugement d'adoption étranger dont il ne serait pas possible de prouver le caractère définitif ne pourrait être mentionné ou transcrit auprès du service central de l'état civil, ni faire l'objet d'un exequatur, d'une reconnaissance ou d'une décision d'adoption devant une juridiction française. Il en résulterait une situation d'insécurité juridique pour l'enfant qui, pendant toute la durée du délai d'appel (parfois plusieurs mois), se trouverait en France sans que le lien de filiation avec les adoptants puisse être légalement établi. Il convient de souligner aussi la diversité des réglementations et des pratiques en vigueur dans les pays d'origine en matière de délai d'appel, celui-ci pouvant aller de quelques jours à plusieurs mois. Si certains pays, notamment ceux dans lesquels l'adoption relève d'une décision administrative, autorisent la modification sans délai de l'acte de naissance d'origine et la délivrance immédiate des titres de voyage à l'enfant, de nombreux autres pays n'autorisent pas le départ de l'enfant avant l'expiration du délai d'appel et s'opposent à la délivrance des documents nécessaires à sa sortie de leur territoire. D'ores et déjà, le ministre des affaires étrangères tient le plus grand compte pour autoriser la délivrance des visas, des situations particulières notamment lorsque la santé ou la sécurité de l'enfant sont en cause. Dans le souci de faciliter les démarches d'adoption, il s'attachera à apporter à la règle appliquée actuellement les assouplissements qui paraîtront possibles dans les limites permises par la réglementation des pays d'origine.
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