Rubrique :
|
anciens combattants et victimes de guerre
|
Tête d'analyse :
|
malgré-nous
|
Analyse :
|
incorporés de force dans des formations paramilitaires. revendications
|
Texte de la QUESTION :
|
M. André Schneider attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur la situation des Alsaciens Mosellans incorporés de force, lors de la Seconde Guerre mondiale, dans les formations paramilitaires allemandes telles, notamment, le RAD (Reichsarbeitsdienst) et le KHD (Krieghilfsdients). Cette catégorie d'incorporés de force, qui compte environ 3 500 personnes, est exclue du bénéfice de l'accord franco-allemand de 1979 qui prévoit l'indemnisation de tous les anciens incorporés de force, quel que soit leur statut. Avec les années, certains dossiers ont pu être réglés mais il en reste encore près de 700 en cours d'instruction à la direction départementale des anciens combattants de Strasbourg et à celle de Metz. Très souvent, l'absence d'indemnisation pour ces incorporés de force dans des organisations paramilitaires est liée à l'impossibilité pour eux de rapporter la preuve de leur participation à des combats sous commandement militaire allemand en application de l'arrêt Kocher du Conseil d'Etat relatif aux conditions d'attribution du titre d'incorporé de force dans Wehrmacht. Cette jurisprudence permet en effet d'assimiler aux incorporés de force dans l'armée allemande, celles et ceux qui ont été impliqués dans des opérations militaires. Une telle assimilation leur ouvre la possibilité de bénéficier de l'indemnisation versée par la fondation « Entente franco-allemande » chargée de gérer les fonds prévus à cet effet. Il n'en demeure pas moins que les personnes qui ont été incorporées dans le service du travail obligatoire paramilitaire RAD/KHD et qui ne réussissent pas aujourd'hui à démontrer leur participation à des opérations militaires sous commandement allemand connaissent un réel préjudice moral et que celui-ci ne peut faire l'objet de mesures improvisées. Il lui demande donc s'il envisage de soumettre la revendication de cette catégorie d'incorporés de force à une étude attentive afin qu'une solution équilibrée puisse être trouvée.
|
Texte de la REPONSE :
|
Jusqu'alors la question des jeunes Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans le RAD-KHD faisait l'objet d'une approche essentiellement juridique et à travers des cas individuels. L'arrêt Kocher rendu par le Conseil d'Etat le 16 novembre 1973 ainsi que son avis émis le 10 juillet 1979 avaient ouvert une possibilité qui n'a pas été poursuivie jusqu'à son aboutissement. En autorisant la délivrance du certificat d'« incorporé de guerre » aux personnes ayant servi dans le RAD pouvant établir qu'elles se trouvaient sous commandement militaire et qu'elles ont participé à des combats, la haute juridiction tirait la conséquence juridique d'une situation historique : l'utilisation par la Wehrmacht ou la Luftwaffe, à partir de 1943, d'unités du RAD dans des opérations militaires. De cette jurisprudence a été déduite une pratique administrative imposant à chaque ancien membre des RAD d'établir, par ses propres moyens, l'engagement au combat de son unité. Cette exigence est particulièrement difficile à remplir, et cette difficulté est source d'injustice. Ainsi a-t-on pu observer une apparente fluctuation dans les décisions administratives, due en réalité à la fiabilité variable des éléments de preuves fournis dans chaque cas. De ce fait, des anciens RAD ayant servi dans la même unité et à la même époque peuvent voir leur dossier résolu de manières opposées selon la consistance de la documentation fournie. Cette situation peu satisfaisante s'explique par l'insuffisance des connaissances historiques sur ce qu'a été réellement le RAD et les missions qu'il a dû remplir durant la guerre. D'ores et déjà les recherches effectuées récemment dans les archives militaires allemandes montrent que ce « service de travail obligatoire » se transforme à partir de 1943 en organisation sous commandement militaire et que de nombreuses unités se sont trouvées impliquées dans des actions de combat dans plusieurs zones des différents fronts. Dès lors, il a semblé possible de passer de l'approche individuelle des dossiers à une approche collective. Dans cette perspective, des recherches ont été menées afin de déterminer les périodes pendant lesquelles les unités du RAD ne peuvent être considérées comme « unités combattantes » au sens de l'arrêt Kocher. Des tableaux qui recensent 118 unités vont être publiés prochainement. Les incorporés de forces dans le RAD n'auront donc plus à se préoccuper de retrouver des preuves sur les conditions dans lesquelles ont été accomplies les missions confiées à leurs unités : cette information sera fournie par ces tableaux. La mise en oeuvre de ce nouveau dispositif n'exclut pas, bien au contraire, une nouvelle réflexion et de nouvelles recherches sur l'incorporation forcée dans le RAD en vue d'assurer à ceux qui y ont été affectés aux différentes phases de la guerre une reconnaissance adaptée à la nature effective des services accomplis.
|