FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 7776  de  M.   Michel Jean-Pierre ( Radical, Citoyen et Vert - Haute-Saône ) QE
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  15/12/1997  page :  4591
Réponse publiée au JO le :  23/03/1998  page :  1666
Rubrique :  travail
Tête d'analyse :  licenciement pour inaptitude physique
Analyse :  procédure
Texte de la QUESTION : M. Jean-Pierre Michel appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les licenciements de salariés malades ou handicapés. En effet, l'article L. 122-45 du Code du travail interdit plusieurs discriminations à l'embauche d'un salarié et interdit pour les mêmes raisons son licenciement. Toutefois, s'agissant de l'état de santé ou du handicap, le texte ouvre la possibilité du licenciement notamment, si le médecin du travail a constaté l'inaptitude. Dans les faits, cette disposition est souvent vidée de son contenu. En effet, le licenciement d'un malade s'effectue non pas en raison des absences pour maladie, mais pour des absences longues et répétées qui ne lui permettent pas de remplir provisoirement son contrat de travail. Certes, la jurisprudence est de plus en plus vigilante, mais elle admet le licenciement lorsque l'employeur avance qu'il est dans l'obligation de remplacer le salarié en ayant recours à une embauche. Cette disposition est en contradiction avec la nécessité pour l'entreprise de remplacer le salarié dès le premier jour de son absence, et elle méconnaît les possibilités multiples qu'ont les employeurs de recourir à des contrats à durée déterminée. Il est donc important de clarifier cette importante question. C'est pourquoi il lui demande quelle est sa position sur ce problème et les instructions qu'elle pourrait éventuellement adresser aux directions départementales du travail et de l'emploi.
Texte de la REPONSE : L'article L. 122-45 du code du travail prévoit qu'aucune personne ne peut être licenciée, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail, en raison de son état de santé ou de son handicap. Le licenciement intervenu en violation de ces dispositions est nul ; le tribunal peut donc, s'il l'estime possible, ordonner la réintégration du salarié. De plus, les articles 225-1 à 225-4 du nouveau code pénal permettent de sanctionner tout licenciement discriminatoire fondé sur l'état de santé ou le handicap du salarié, dès lors que l'inaptitude n'est pas constatée par la médecine du travail. Les sanctions pénales prévues sont de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende. La maladie entraîne une simple suspension du contrat de travail, à l'issue de laquelle le salarié reprend normalement son activité. Mais il se peut que l'employeur soit tenu, pour un motif extérieur à la maladie, de procéder au licenciement du salarié. Ce licenciement n'est alors licte que s'il repose, comme tout licenciement, sur une cause réelle et sérieuse. Cependant, une absence prolongée ou des absences fréquentes et répétées pour maladie peuvent, par les perturbations qu'elles causent à la bonne marche de l'entreprise et par la nécessité de remplacement du salarié malade, justifier la rupture du contrat de travail. Dans ce cas et sous certaines conditions, la jurisprudence admet que le licenciement du salarié est justifié. L'appréciation de l'absolue nécessité de remplacer le salarié s'effectue au cas par cas par les tribunaux en fonction de plusieurs critères, tels que l'emploi et la qualification du salarié (cass. soc. 6 mars 1986 et 27 avril 1988), la taille et la nature de l'activité de l'entreprise (cass. soc. 8 décembre 1983) ou encore la durée de l'absence (cass. soc. 1er juin 1980 et 30 juin 1988). Par ailleurs, l'absence du salarié doit notamment « nuire à la bonne marche de l'entreprise » (cass. soc. 20 juillet 1989), « désorganiser le poste de travail » (cass. soc. 3 juillet 1990), ou encore « entraver son bon fonctionnement » (cass. soc. 20 juillet 1989). En tout état de cause, lorsque la convention collective applicable prévoit un délai de garantie d'emploi, le licenciement du salarié n'est pas possible avant l'expiration de ce délai. Par ailleurs, le licenciement n'est justifié que si le remplacement du salarié ne peut être effectué que par l'embauche d'un nouveau salarié sous contrat à durée indéterminée (cass. soc. 13 mars 1991), ainsi l'employeur ne peut affecter un autre salarié de l'entreprise à ce poste (cass. soc. 8 octore 1992). Ces dispositions législatives et cette jurisprudence assurent aux salariés absents pour raisons de santé une réelle protection, tout en tenant compte des nécessités de fonctionnement des entreprises. Il n'apparaît pas opportun de remettre en cause cet équilibre par une modification législative.
RCV 11 REP_PUB Franche-Comté O