Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Réponse publiée au JO le :
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Analyse : |
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Texte de la REPONSE : |
«M. Arnaud Montebourg appelle l'attention de M. le ministre de la défense sur le survol, par trois Mirage F1 basés à Djibouti, de la villa personnelle de M. Ismaïl Omar Guelleh, au lendemain de son élection à la présidence de la République de Djibouti, le 9 avril dernier afin de «saluer le nouveau Président d'un geste d'amitié». Cette parade aérienne, sans aucun rapport avec les missions assignées aux forces françaises prépositionnées à Djibouti, est-elle une initiative du commandement de l'état-major des forces françaises stationnées à Djibouti, ou a-t-elle été décidée par ses soins ? Dans les deux cas, cette initiative symbolique paraît contredire les objectifs de la «nouvelle politique africaine de la France» définie par le ministre de la coopération dans sa déclaration du 25 novembre 1998 à l'Assemblée nationale rappelant le principe de «non-ingérence, qui ne nous dispense pas d'être exigeants, et de réviser nos projets de coopération si les droits de l'homme et l'Etat de droit ne sont pas respectés». La République de Djibouti s'étant signalée aux yeux de plusieurs organisations non gouvernementales comme violant à répétition les règles communément admises en la matière, il le prie de lui indiquer si ce «geste d'amitié» traduit une évolution des principes et des objectifs fixés par la «nouvelle politique africaine de la France».» La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour exposer sa question. M. Arnaud Montebourg. Monsieur le ministre de la défense, je souhaite vous interroger sur des faits précis qui ont été confirmés à la presse internationale par le commandement des forces françaises prépositionnées à Djibouti. Trois Mirage F1 basés à Djibouti ont survolé la villa personnelle de M. Ismaïl Omar Guelleh au lendemain de son élection à la présidence de la République de Djibouti, le 9 avril dernier, afin de «saluer le nouveau président d'un geste d'amitié». Cette parade aérienne, qui n'a aucun rapport avec les missions assignées aux forces françaises prépositionnées à Djibouti, est-elle une initiative du commandement de l'état-major des forces françaises stationnées à Djibouti ou a-t-elle été décidée par le ministre de la défense ou par une autre autorité exerçant le commandement sur les forces françaises à Djibouti ? Dans les deux cas, cette initiative symbolique contredirait les objectifs de la «nouvelle politique africaine de la France» définie par M. le ministre de la coopération dans sa déclaration du 25 novembre 1998 à l'Assemblée nationale, laquelle rappelait le principe de «non-ingérence, qui ne nous dispense pas d'être exigeants et de réviser nos principes de coopération si les droits de l'homme et l'Etat de droit ne sont pas respectés». Cette politique, que je soutiens dans ses principes mais dont j'ai eu à critiquer certaines des applications, tend à lier, et c'est heureux, le soutien matériel et financier des contribuables français ou le soutien symbolique de la France aux régimes africains avec le respect par ceux-ci des normes habituellement admises en ce qui concerne les droits de l'homme. La République de Djibouti, s'il est encore permis de la qualifier de république - en tout cas, elle semble ne l'être qu'en apparence -, s'étant signalée aux yeux de plusieurs organisations non gouvernementales comme Amnesty international ou la Fédération internationale des droits de l'homme comme violant de façon répétée les règles communément admises en la matière, je vous prie, monsieur le ministre, de bien vouloir indiquer à la représentation nationale si ce «geste d'amitié» exprimé par l'armée française, qui ajoute d'ailleurs le ridicule au gaspillage, traduit une évolution des principes et des objectifs fixés par cette fameuse et introuvable «nouvelle politique africaine de la France». M. le président. La parole est à M. ministre de la défense. M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le député, les faits de la plus grande importance que vous avez rappelés sont, vous le savez, postérieurs à l'envoi par les autorités françaises responsables d'un télégramme officiel de félicitations au nouveau président djiboutien, les félicitations en pareil cas étant un usage diplomatique qui remonte à plusieurs siècles, cela ne vous a pas échappé. Le survol de la résidence privée de M. Ismaïl Omar Guelleh a été effectué par trois Mirage F 1 qui opèrent régulièrement des déplacements dans cette région où se poursuit, je le rappelle, un conflit armé qui a déjà fait des dizaines de morts; la sécurité de Djibouti peut donc être en jeu. Ce survol correspond à une initiative d'un niveau inférieur au commandement militaire local. Mon cabinet a rappelé à ce commandement que toute manifestation d'une force armée susceptible d'une interprétation politique, aussi ténue soit-elle, relève de l'autorité du Gouvernement, et non de celle du commandement local. L'incident, je crois, ne mérite pas plus que ce bref commentaire. Le gouvernement français n'a pas ménagé ses efforts en faveur de la consolidation des droits de l'homme, que ce soit à Djibouti ou ailleurs, et vous savez que, dans une telle matière, la fonction des gouvernements, celle des parlements et celle des organisations non gouvernementales se distinguent nettement. J'ai eu, tout récemment, un débat approfondi, positif et sympathique avec un groupe de dirigeants d'organisations non gouvernementales à propos des questions qui se posent au Kosovo. Nos partenaires, et souvent amis, des organisations non gouvernementales veillent de leur côté avec beaucoup de ténacité à ce que nous n'empiétions pas sur leur domaine de responsabilité et sur leur droit d'expression. Je signale par ailleurs que le nouveau président djiboutien, élu il y a quelques semaines, a pris une mesure d'amnistie en faveur d'une quarantaine de détenus, dans laquelle on peut, je crois, voir un certain souci d'apaisement des tensions politiques dans cette république. Quant à la politique africaine que développent les pouvoirs publics et le Gouvernement sur l'ensemble du continent, elle se traduit par un encouragement - vous avez cité une expression de mon collègue Charles Josselin - à la démocratisation, au renforcement de l'Etat de droit et aux pratiques de bonne gouvernance, en s'abstenant de ce qui peut devenir, de la part de l'ancienne puissance coloniale, une ingérence dans les affaires intérieures de nos partenaires. C'est fidèle à ces principes, en observant ces limites et en liaison étroite avec nos partenaires européens, que le gouvernement actuel a été conduit à suspendre la coopération, entre autres militaire, avec les pays où ont eu lieu des coups d'Etat, notamment, dans les derniers mois, avec le Niger et les Comores. Les inflexions ainsi apportées aux différents éléments de notre politique africaine forment un ensemble qui vise à une meilleure adéquation de nos instruments et de nos pratiques à l'évolution d'un continent dont la France souhaite rester le premier partenaire. Si cette politique vous a paru «introuvable», j'espère vous avoir aidé à commencer à en discerner les contours. M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg. M. Arnaud Montebourg. Je vous remercie, monsieur le ministre de la défense, de toutes ces assurances, et d'avoir réaffirmé le primat de l'autorité politique sur les militaires. Il eût été un peu difficile pour la représentation nationale d'admettre que les militaires décident de féliciter politiquement quelqu'un qui vient d'être élu à de si hautes fonctions, alors même que le processus électoral a été gravement contesté. Je note donc, mais je poserai prochainement une nouvelle question à ce sujet, que des observations ont été faites au commandement des forces françaises prépositionnées à Djibouti. Reste à savoir si des sanctions ont été prononcées, car il est inacceptable que le pouvoir politique soit mis devant le fait accompli. Il s'est agi en quelque sorte d'un télégramme de félicitations adressé par le biais d'une parade ridicule, car les Mirage F1 sont en opérations en Erythrée, à Djibouti et dans toute la corne de l'Afrique. J'ai donc encore beaucoup de questions à vous poser, monsieur le ministre, sur la politique française à Djibouti avant d'être totalement convaincu et de trouver la «nouvelle politique de coopération française avec l'Afrique». |