Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Pierre Dupont souhaite attirer l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur les inquiétudes suscitées par Natura 2000 sur les directives européennes 79/409 et 9/43. Le réseau Natura 2000 prévoit la création de zones de protection spéciale et de zones spéciales de conservation et nul ne peut dire aujourd'hui quelles seront les activités autorisées et celles interdites au sein de ces zones. La chasse, la pêche, les randonnées mais aussi l'agriculture et l'ensemble des activités économiques pourront-elles perdurer et sous quelles conditions ? Les propos rassurants des promoteurs de Natura 2000, que ce soient les associations ou les administrations, n'ont malheureusement aucune valeur juridique et n'engagent en aucune manière la Cour de justice des Communautés européenne, qui, seule, en cas de contentieux, pourra dire comment il convient d'interpréter les textes. Il ne s'agit pas tant d'être pour ou contre Natura 2000 que de savoir quelles en seront les conséquences, et la réponse ne peut venir que de la Cour de justice des Communautés européennes ou d'une modification de la directive. A défaut, ne conviendrait-il pas que l'Etat français légifère afin que les documents d'objectifs ou chartes établis localement ne puissent pas être remis en cause devant les différentes juridictions ?
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Texte de la REPONSE :
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Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative aux directives 79/409/CEE concernant la conservation des oiseaux sauvages et 92/43/CEE concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages conduisant à la constitution d'un réseau écologique cohérent dénommé Natura 2000. La question des activités économiques et sociales dans les sites qui feront partie du réseau Natura 2000 a été clarifiée en 1996, à la demande du précédent gouvernement, par le commissaire européen à l'environnement, Mme Ritt Bjerregaard. Celle-ci s'est prononcée sur cette question en considérant que le réseau Natura 2000 n'a pas pour objet de faire des sites qui le composeront des « sanctuaires de nature » où toute activité humaine serait à proscrire. Elle considère notamment qu'il ne doit pas y avoir d'interdiction a priori et générale de la chasse dans les zones Natura 2000. Ce principe a été repris et développé dans le mémorandum interprétatif de la directive établi par le Gouvernement français et approuvé par la Commission européenne au début de l'année 1997. L'un des points de ce document se réfère à l'article 6 de la directive Habitats pour préciser que : 1/ Ce sont les Etats membres (et non la commission), en vertu du principe de subsidiarité, qui prennent les mesures appropriées à chaque sites ; 2/ Ces mesures, sauf cas exceptionnels dûment justifiés par des exigences écologiques particulières aux types d'habitats naturels et aux espèces concernés par la directive et présents sur les sites désignés, ne conduisent pas les Etats membres à interdire les activités humaines préexistantes à la désignation des sites ni, de la même façon, à interdire des activités nouvelles qui ne remettent pas en question l'état de conservation favorable des habitats et des espèces. Le réseau Natura 2000 a principalement pour objectif de préserver des habitats naturels, des habitats d'espèces d'intérêt communautaire et les habitats de certaines espèces d'oiseaux, c'est-à-dire d'éviter leur disparition physique ou leur dégradation qualitative. Pour certaines espèces, celles pour lesquelles les sites seront désignés et intégrés au réseau Natura 2000, la directive demande aux Etats membres de veiller à ce que les efforts déployés en leur faveur ne soient pas amoindris par des perturbations touchant ces espèces, imputables à certaines activités humaines. Mais les deux directives ne prévoient pas l'interdiction des activités humaines qui pourraient être la cause de telles perturbations. Les Etats membres doivent seulement éviter, et non interdire, de telles perturbations, pour autant qu'elles soient susceptibles d'avoir un effet significatif eu égard aux objectifs de conservation des sites. Appliquer un tel principe conduit à examiner la situation au cas par cas, en fonction des espèces en cause et des activités dans un site donné. L'élaboration des propositions de gestion Natura 2000, sous la forme d'un « document d'objectifs » qui accompagnera les futures désignations de sites Natura 2000, en concertation avec les interlocuteurs locaux, permettra d'apprécier ces situations au plus près du terrain avec les intéressés eux-mêmes et des contextes locaux. Pour que les inquiétudes des milieux cynégétiques soient totalement dissipées, une proposition a été faite au Comité national de suivi Natura 2000 du 30 juillet 1997 de conduire une réflexion pour définir ensemble la notion de « perturbation ». Ces travaux ont abouti à un document approuvé le 4 décembre dernier par le Comité national qui démontre que, pour l'ensemble des zones Natura 2000 de la directive Habitats, la chasse n'a pas d'effet significatif en terme de perturbation. Une réflexion en cours sur la notion de « détérioration » viendra compléter ces premiers résultats. Parallèlement, un groupe issu du Comité national a été créé pour proposer une méthode permettant d'évaluer les coûts de gestion des futurs sites Natura 2000 incluant d'éventuelles compensations. Il est prévu que les travaux soient achevés à la fin du mois de mars. Les conclusions de ces différents groupes de travail seront largement diffusées. En ce qui concerne l'interprétation ultérieure de la Cour de justice des communautés européennes, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ne peut que souscrire à vos propos. La France a choisi la démarche contractuelle à travers des documens d'objectifs établis localement en concertation avec l'ensemble des partenaires. Ces documents fixeront pour chaque site les orientations de gestion, les éventuelles contraintes et les mesures de compensation ou de rémunération des prestations envisagées. Cette démarche a été entérinée dans le mémorandum français approuvé par la commission. A ce titre, la commission a accepté que le document d'objectifs constitue le document de référence qui sera transmis à la commission au moment de la désignation officielle des sites et qui vaudra engagement de l'Etat français. La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, si elle peut affirmer que la démarche française a reçu l'accord de la commission, ne peut évidemment pas s'engager sur une éventuelle jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes au cas où elle serait appelée à se prononcer sur la bonne adéquation d'un « document d'objectifs » aux objectifs poursuivis par la directive Habitats.
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