FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 894  de  M.   Mariani Thierry ( Rassemblement pour la République - Vaucluse ) QOSD
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  21/06/1999  page :  3709
Réponse publiée au JO le :  23/06/1999  page :  6251
Rubrique :  emploi
Tête d'analyse :  entreprises d'insertion
Analyse :  loi d'orientation contre les exclusions. conséquences
Texte de la QUESTION : M. Thierry Mariani appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les textes réglementaires pris en application de la loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. En effet, il semblerait qu'ils limitent considérablement le champ d'action des associations intermédiaires dont les activités sont mises sous la tutelle de l'ANPE. Depuis dix ans, celles-ci ont pourtant prouvé qu'elles constituaient un maillon essentiel de la lutte contre l'exclusion et de l'insertion par l'économique. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures concrètes qu'elle entend prendre afin de soutenir et de faciliter leur action.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Thierry Mariani a présenté une question, n° 894, ainsi rédigée:
«M. Thierry Mariani appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les textes réglementaires pris en application de la loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. En effet, il semblerait qu'ils limitent considérablement le champ d'action des associations intermédiaires dont les activités sont mises sous la tutelle de l'ANPE. Depuis dix ans, celles-ci ont pourtant prouvé qu'elles constituaient un maillon essentiel de la lutte contre l'exclusion et de l'insertion par l'économique. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures concrètes qu'elle entend prendre afin de soutenir et de faciliter leur action.»
La parole est à M. Thierry Mariani, pour exposer sa question.
M. Thierry Mariani. Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
La parution des textes réglementaires pris en application de la loi du 29 juillet 1998, loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, soulève, vous le savez, de vives inquiétudes chez les responsables d'associations intermédiaires. Il semblerait en effet que ces textes limitent considérablement le champ d'action des associations intermédiaires dont les activités sont mises sous la tutelle de l'ANPE.
Les associations intermédiaires ont pour objectif la mise à disposition de salariés à titre onéreux, mais non lucratif, dans des conditions dérogatoires au droit commun du travail temporaire. Ces mises à disposition peuvent être effectuées tant au bénéfice de personnes morales que de particuliers.
Ces associations devront désormais obtenir un agrément de l'ANPE avant de mettre du personnel à disposition des entreprises. Un tel agrément, dont on pourrait comprendre la justification s'il s'agissait uniquement de mieux coordonner sur le terrain les différentes actions en faveur des personnes en difficulté, est ressenti comme une tracasserie administrative supplémentaire, témoignant du manque de confiance de l'Etat envers les associations intermédiaires. Ces dernières ne veulent pas être considérées comme des sous-traitants, mais comme desco-traitants.
Depuis dix ans, elles ont prouvé, tant par leur souplesse que par leur présence permanente sur le terrain, qu'elles constituaient un maillon essentiel de la lutte contre l'exclusion participant à la démarche de l'insertion par l'économique. Je pense, en particulier, à trois associations de ma circonscription «Coup de pouce» à Valréas, le «Pied à l'étrier» à Bollène, ou encore l'association «Piaf» à Orange - dont les élus locaux connaissent bien quel travail elles fournissent. Or ce travail risque d'être entravé par la nouvelle réglementation en vigueur.
Par ailleurs, de nombreux responsables d'associations intermédiaires se demandent si le cadre fiscal, et notamment la déduction fiscale de 50 % au titre des emplois familiaux auprès des particuliers, sera maintenu pour les associations intermédiaires. Si tel ne devait pas être le cas, vous comprendrez que les associations intermédiaires risqueraient d'en pâtir tout particulièrement, et à travers elles, nos concitoyens qu'elles aident à s'insérer par le travail.
Dans une époque marquée hélas ! par le développement de l'assistance, je tiens à souligner la nécessité de réinsérer par le travail nos concitoyens les plus fragiles et de leur rendre leur dignité. Cette démarche me semble en effet bien plus porteuse d'espoir que l'attribution d'un minimum social sans contrepartie qui enferme, plus qu'il ne les libère, nos concitoyens dans le cercle de l'exclusion et de la précarité.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais que le Gouvernement se prononce très clairement sur l'avenir des associations intermédiaires dans notre pays. Ces dernières n'ont-elles pas un rôle de tout premier plan à jouer dans la lutte contre l'exclusion ? Quelles mesures concrètes entend-il prendre pour faciliter et dynamiser leurs initiatives ? Enfin, ces associations intermédiaires peuvent-elles participer à la mise en place de chantiers d'intérêt général, tels que les chantiers d'école, pour ne citer que cet exemple ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
M. Jacques Dondoux, secrétaire d'Etat au commerce extérieur. Monsieur le député, je sais bien que le commerce extérieur ne conduit pas forcément à l'insertion et j'ai à vous présenter les regrets de Mme Aubry de ne pouvoir être ici. Mais je peux vous rassurer: dans mon village, j'ai une association d'insertion et je me ferai un plaisir de lui communiquer l'excellente réponse qui m'a été transmise.
L'insertion par l'activité économique met en oeuvre de façon exemplaire les grands principes fixés par la loi de la lutte contre les exclusions: tout d'abord privilégier une approche individuelle des situations, avec une réponse adaptée au cas de chacun et un accompagnement social, quand il apparaît nécessaire; ensuite, donner la priorité à l'emploi par rapport aux logiques d'assistance, en mettant en oeuvre des parcours d'insertion professionnelle devant déboucher sur un emploi durable.
Depuis un an, des avancées considérables ont été obtenues. Le programme de lutte contre les exclusions prévoit ainsi un doublement en trois ans de ce type d'activités. Un renforcement important des moyens financiers est mis en oeuvre à cette fin.
Pour ce qui concerne les entreprises d'insertion et les entreprises de travail temporaire d'insertion - ETTI -, les crédits d'aide au poste passent de 350 millions de francs environ, en 1998, à 540 millions de francs, en 1999, ce qui permettra de financer 10 000 postes d'insertion en entreprise d'insertion et 300 postes d'accompagnement dans les ETTI. Il s'y ajoute une exonération des charges sociales, qui passe de 50 % à 100 % et représente une charge nouvelle pour l'Etat de 338 millions de francs. Les procédures de versement de ces aides ont été améliorées, avec un calendrier accéléré et le regroupement des différentes aides sur une ligne unique.
Pour ce qui concerne les associations intermédiaires, la réforme mise en oeuvre a fait l'objet de discussions constantes avec les réseaux représentatifs.
Les associations intermédiaires sont confortées dans leur mission, qui est bien souvent de servir de point d'entrée dans l'insertion par l'activité économique, de constituer le seuil par lequel les personnes les plus éloignées de l'emploi peuvent accéder à une activité. Ainsi, la clause de non-concurrence a été supprimée, ce qui leur permet d'inscrire dorénavant leur action dans le secteur concurrentiel, y compris lorsqu'il existe d'autres entreprises, d'intérim, par exemple, qui interviennent dans la même zone. Les associations intermédiaires continuent, par ailleurs, à bénéficier d'une exonération de charges sociales et d'une aide spécifique au démarrage.
Pour faire bénéficier de l'insertion par l'activité économique les personnes qui en ont le plus besoin, la loi de lutte contre les exclusions a prévu une orientation par l'ANPE de toutes les personnes concernées. Pour les associations intermédiaires, cet agrément de l'ANPE ne concerne que les salariés qui sont mis à disposition en entreprise, au-delà des seize premières heures. Pour rendre cette procédure simple et rapide, l'ANPE s'est organisée localement, en mettant en place des équipes spécialisées lui permettant de répondre dans les meilleures conditions.
Le rôle de sas d'entrée de l'insertion par l'activité économique a conduit, par ailleurs, le législateur à prévoir une limite aux possibilités de mise à disposition de salariés en entreprise. Les limites retenues, en concertation étroite avec les différents réseaux représentant les associations d'insertion, sont de 240 heures au total, et d'un mois, éventuellement renouvelable une fois, pour une mise à disposition dans une même entreprise. Au-delà de ces limites, les salariés concernés ont normalement vocation à évoluer vers d'autres structures. Il peut s'agir d'entreprises de travail temporaire d'insertion.
Ces nouvelles dispositions n'entraînent pas de charge accrue pour les associations intermédiaires; elles ne devraient donc pas altérer leur équilibre financier. Dans certains cas, elles rendront nécessaire une adaptation de leur mode de fonctionnement, notamment pour les associations qui avaient développé une activité importante de mise à disposition en entreprises; d'où la création du fonds départemental d'insertion, doté de 45 millions de francs. Ce fonds pourra ainsi, au besoin, aider à créer une entreprise de travail temporaire d'insertion pour prendre le relais et poursuivre les mises à disposition en entreprise lorsque le seuil de 240 heures est atteint.
Par ailleurs, le rôle d'accompagnement social et professionnel que jouent les associations intermédiaires est reconnu. Celles-ci pourront, à ce titre, bénéficier de financements. Ces financements seront accordés dans le cadre des conventions de coopération, conclues notamment avec l'ANPE pour la mise en oeuvre du programme «nouveaux départs». Les associations intermédiaires pourront également être conventionnées dans le cadre de programmes locaux pour l'insertion et l'emploi et bénéficier d'appuis des conseils généraux, notamment pour les allocataires du RMI.
Enfin, seront mis en place, conclut Mme la ministre, des financements spécifiques pour conforter ce rôle d'accompagnement des associations intermédiaires, sur les crédits d'appui social individualisé.
Le dispositif devrait fonctionner et, notamment, permettre à des anciens de retrouver une dignité par le travail.
M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.
M. Thierry Mariani. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, pour la courtoisie de votre réponse. J'aurais préféré, vous le comprenez bien, que Mme Aubry soit présente et j'espère que le fait que le secrétaire d'Etat au commerce extérieur la remplace n'est pas pour prouver que les associations intermédiaires sont pour elle un problème extérieur. (Sourires.)
Permettez-moi trois remarques.
La première porte sur la discussion qui a eu lieu en amont de la loi d'insertion. J'ai la très nette impression que celle-ci a été insuffisante ou qu'il y a eu une incompréhension parce que, aujourd'hui, l'inquiétude des associations intermédiaires est réelle.
La deuxième a trait au passage à l'ANPE, qui est ressenti au niveau local comme un filtre qui alourdira les formalités administratives. De surcroît, et chacun de nous le constate dans sa circonscription, l'ANPE est déjà débordée par d'autres tâches. Pourquoi leur avoir confié une tâche supplémentaire qui, jusqu'à présent, ne s'était pas révélée nécessaire ?
La troisième concerne les chantiers d'intérêt général, à propos desquels vous n'avez pas répondu. Mon inquiétude demeure. Oui ou non, les associations intermédiaires pourront-elles mettre en place dans l'avenir des chantiers d'intérêt général ? J'espère qu'on me répondra par courrier.
Je terminerai par une déclaration de confiance et de volonté. Cette expérience, qui a été lancée par une majorité de droite et conduite par une majorité de gauche, a montré dans de nombreuses municipalités que les associations intermédiaires constituaient un réel moyen d'insérer par l'économique, et non par l'assistance, des personnes qui se retrouvaient en marge de la société.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne vous remettrai pas les pétitions qui étaient destinées à Mme Aubry; je les ferai porter à son ministère. Ces pétitions sont dues à des personnes de tout le Vaucluse qui ont bénéficié de ces associations intermédiaires et qui ont tenu à dire que celles-ci avaient joué leur rôle.
A côté des dispositifs mis en place dans cette loi sur l'insertion, les associations méritent de conserver leur rôle, parce qu'elles assurent une insertion de proximité par l'économique, qui est vraiment nécessaire.
RPR 11 REP_PUB Provence-Alpes-Côte-d'Azur O