FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 908  de  M.   Angot André ( Rassemblement pour la République - Finistère ) QOSD
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  28/06/1999  page :  3877
Réponse publiée au JO le :  30/06/1999  page :  6516
Rubrique :  police
Tête d'analyse :  commissariats
Analyse :  effectifs de personnel. Quimper
Texte de la QUESTION : M. André Angot appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le problème de la sécurité des villes de province de moyenne importance. Pour exemple, la ville de Quimper où la population a augmenté de 10 % en dix ans, où les délits sont en progression constante et où le nombre de policiers a baissé de 20 % ces dernières années. La police nationale n'est donc plus en mesure d'y assurer efficacement sa mission de maintien de l'ordre. Aussi, la rénovation du commissariat de Quimper et l'augmentation importante des effectifs de la police nationale s'imposent de manière urgente. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. André Angot a présenté une question, n° 908, ainsi rédigée:
«M. André Angot appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le problème de la sécurité des villes de province de moyenne importance. Pour exemple, la ville de Quimper où la population a augmenté de 10 % en dix ans, où les délits sont en progression constante et où le nombre de policiers a baissé de 20 % ces dernières années. La police nationale n'est donc plus en mesure d'y assurer efficacement sa mission de maintien de l'ordre. Aussi, la rénovation du commissariat de Quimper et l'augmentation importante des effectifs de la police nationale s'imposent de manière urgente. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière.»
La parole est à M. André Angot, pour exposer sa question.
M. André Angot. Monsieur le ministre de l'intérieur, après l'emploi, la sécurité est la deuxième préoccupation des Français. Outre les quartiers difficiles des grandes métropoles régionales et de l'Ile-de-France, au sein desquels la police ne pénètre plus et qui sont devenus des zones de non-droit, il faut que vous sachiez, monsieur le ministre, qu'il existe aussi, en province, des villes de moyenne importance dans lesquelles la situation devient également très difficile.
M. Boulaud a évoqué tout à l'heure le cas de Nevers. Permettez-moi de prendre l'exemple de la ville de Quimper, afin d'illustrer mon propos.
La police nationale n'est plus en mesure d'y assurer efficacement sa mission de maintien de l'ordre. Cette situation se vit quotidiennement à Quimper, où le sentiment d'insécurité est aujourd'hui ressenti par la population, qui exprime son ras-le-bol et sa lassitude. Depuis quelques mois, des bandes organisées sèment le trouble dans la ville-préfecture du Finistère.
Le trafic de drogue s'étend dans le centre-ville, où les bagarres entre bandes rivales sont devenues courantes. Des rixes violentes se produisent même en plein après-midi à quelques mètres d'espaces de jeux réservés aux enfants. Très récemment, une violente bagarre à coups de barre de fer s'est terminée par l'hospitalisation de plusieurs jeunes adolescents. A Quimper, il ne se passe plus une semaine sans qu'une ou plusieurs voitures ne soient incendiées, et des poubelles brûlent pratiquement chaque nuit. Ce dernier point est loin d'être anecdotique puisqu'il y a quelques semaines, un simple feu de poubelles a failli détruire la totalité d'un centre commercial et sa vingtaine de commerces.
Les contrats locaux de sécurité, pour lesquels vous faites tant de promotion, ne peuvent, à eux seuls, constituer une réponse suffisante.
De plus, et dans le même esprit, le recrutement de nombreux agents de sécurité par le biais des emplois-jeunes, dont Quimper est généreusement pourvu, n'a qu'un seul but: masquer la baisse des effectifs de la police nationale. Dans cette ville, alors que la population a augmenté de 10 % en dix ans et que le nombre des délits ne cesse de croître, celui des policiers est passé de plus de 100 il y a quelques années à 71 actuellement, soit une baisse de 30 %. La nuit, le commissariat ne compte que cinq policiers - un dans les bureaux, deux en tenue dans une voiture identifiée et deux en civil dans un véhicule banalisé - pour 63 000 habitants.
De plus, les conditions de travail des policiers quimperois sont devenus obsolètes. Le commissariat est inadapté à une vraie mission de service public: ses locaux sont devenus trop exigus et il manque un espace pour l'accueil du public, il est dépourvu de parking et manque de personnel administratif. Il n'y a pas de locaux pour accueillir les agents de sécurité ni aucune salle ou vestiaire pour l'accueil d'un personnel féminin en augmentation. Bref, la situation devient intenable.
Vous devez savoir, monsieur le ministre, que la ville de Quimper a connu une forte augmentation de son taux de délinquance: de l'ordre de 20 % en 1997 et de plus de 10 % en 1998, soit un accroissement de 30 % en deux ans.
M. François Goulard. Et elle s'aggrave !
M. André Angot. En parallèle, le nombre de policiers, je le répète, a baissé de 30 %, ce qui est considérable.
Les commerçants du centre-ville n'en peuvent plus. Le nombre de vitrines cassées ou endommagées augmente chaque semaine. Des rues deviennent difficilement fréquentables à certaines heures, prises d'assaut, même le jour, par des vendeurs de drogue.
M. François Goulard. Que fait le maire de Quimper ?
M. André Angot. Des hôteliers ont tiré la sonnette d'alarme et averti la police. Certains ont en effet constaté que le trafic de drogue se faisait dans les chambres. La seule réponse de la mairie de Quimper a été la signature d'un contrat local de sécurité et la création de postes de surveillant d'espaces publics.
Améliorer l'aide aux victimes et sensibiliser les individus contre la toxicomanie ou l'alcoolisme par des campagnes publicitaires, comme le suggère ce contrat local de sécurité, ne sont que des voeux pieux en l'absence d'une volonté ferme de lutter contre la délinquance. Pour ma part, je considère que des mesures concrètes sont préférables à de bonnes intentions. La lutte contre la délinquance ne peut se résumer à la seule bonne gestion de la communication.
Il est urgent de rénover le commissariat de Quimper, d'augmenter très fortement les effectifs, de créer un commissariat annexe dans un ou plusieurs quartiers afin de mieux quadriller la ville, de renforcer les moyens de la justice en accélérant les comparutions et d'améliorer le traitement administratif des plaintes en recrutant du personnel de secrétariat. Compte tenu de l'ampleur de la délinquance à Quimper, son traitement ne peut être homéopathique.
Je profite d'ailleurs de l'occasion qui m'est donnée pour rendre hommage à l'action des forces de l'ordre. Leur travail est difficile et s'effectue, à l'heure actuelle, dans des conditions déplorables, tant le manque d'effectifs et de locaux adaptés est manifeste. La prévention ne peut être efficace que si le citoyen a le sentiment que la répression viendra réellement sanctionner le délit. Les habitants de Quimper attendent des engagements concrets et non de simples «mesurettes» qui ne répondraient pas au grave problème de la délinquance dans leur ville, monsieur le ministre.
M. François Goulard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. le ministre de l'intérieur. Monsieur le député, j'admets bien volontiers que des événements particulièrement violents et soudains peuvent marquer profondément une population. Je pense, cependant, que la description que vous faites de la situation à Quimper ne répond pas exactement à la réalité.
S'il est vrai qu'il y a eu une augmentation de la délinquance en 1997 et en 1998, la baisse est tout de même continue depuis le début des années 90 et elle se prolonge en 1999 puisque, pour les cinq premiers mois de l'année, la délinquance générale et celle de voie publique ont respectivement diminué de 4,9 % et de 13,1 %. Mais je n'ignore pas qu'un certain nombre de faits particulièrement marquants peuvent donner un sentiment d'insécurité qui n'est pas exactement à l'unisson de la statistique. J'observe cependant que la baisse concerne aussi bien les vols de véhicules, les dégradations, les cambriolages et les vols à la roulotte.
Quant à l'activité judiciaire déployée par les fonctionnaires de la circonscription de Quimper, elle s'est traduite par une hausse des faits élucidés, des personnes mises en cause et des gardes à vue.
Au mois d'avril, les forces de police, en collaboration avec les fonctionnaires des douanes et conformément aux instructions que j'ai données, ont mené dans le centre-ville des opérations préventives et répressives permettant des interpellations pour usage de stupéfiants provoquant ainsi la dislocation du groupe auquel les personnes interpellées appartenaient.
Cette action répressive est nécessaire parce que seules des sanctions marquent des limites et constituent un rappel efficace à la loi et, de ce point de vue-là, ont une valeur pédagogique qui fait partie de la prévention et de la dissuasion, qui, par ailleurs, doivent être développées autant que possible.
Je me félicite, à cet égard, de la conclusion d'un contrat local de sécurité. Il ne peut naturellement pas être une réponse immédiate aux problèmes qui se posent, mais il est un cadre dans lequel il faut agir pour resserrer le diagnostic et prévoir les mesures en conséquence.
S'agissant des moyens du service public, je rappelle que la circonscription de Quimper compte 113 fonctionnaires, deux policiers auxiliaires et douze adjoints de sécurité.
L'étude de l'évolution des personnels fait bien apparaître une baisse de six fonctionnaires titulaires. Mais j'ai le plaisir de vous annoncer que six gardiens de la paix sont appelés à prendre leurs fonctions en septembre prochain.
De plus, le recrutement, au titre du développement d'activités pour l'emploi des jeunes, de trente-trois adjoints de sécurité supplémentaires dans le département, permettra d'atteindre, à la fin de cette année, le nombre de soixante-douze, ce qui permettra de renforcer les moyens mis en oeuvre dans la circonscription de Quimper. J'observe que déjà quatre adjoints de sécurité sont présents à l'accueil. Ce renfort facilitera également l'ouverture prochaine d'un poste d'ilotage à Kermoysan, dans la ligne définie par le contrat local de sécurité signé le 13 novembre 1998 avec la municipalité, dont, encore une fois, je tiens à saluer l'implication.
S'agissant de l'hôtel de police de Quimper, des travaux de réfection ont été réalisés en 1995 et 1997. Toutefois, bien qu'en bon état, les locaux actuels sont peu fonctionnels et demandent, sans aucun doute, à être modernisés. Dans cette perspective, une étude concernant l'extension de l'hôtel de police par location partiel d'un bâtiment appartenant à EDF, situé en face du site actuel, est en cours.
L'examen de ce projet sera mené, croyez-le bien, avec toute la diligence nécessaire.
M. le président. La parole est à M. André Angot.
M. André Angot. Monsieur le ministre, je vous remercie de prendre en compte un certain nombre des difficultés rencontrées par la ville de Quimper, à savoir le nombre insuffisant de personnels affectés au commissariat et le manque de fonctionnalité des locaux. Je voudrais quand même tempérer votre optimisme en ce qui concerne la diminution de la délinquance. Il est vrai que l'on peut faire dire aux statistiques beaucoup de choses mais il faut que vous sachiez, monsieur le ministre, que les commerçants et les habitants en ont tellement «ras-le-bol» des plaintes qui n'ont jamais de suite que beaucoup n'en déposent plus. Cela donne l'impression que la délinquance diminue, mais, malheureusement, ce n'est pas la réalité. Les commerçants savent que cela ne vaut plus le coup de déposer des plaintes pour des bris de vitrine ou pour des détériorations de leur magasin parce qu'ils ont constaté qu'il n'y avait pratiquement pas de suite. Les particuliers, les dames qui se font voler leur sac à main réagissent de la même façon. Avec de tels comportements, on peut faire dire aux statistiques sur la délinquance ce que l'on veut.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre de l'intérieur. Monsieur Angot, les statistiques ne sont pas bonnes quand elles montrent une détérioration de la sécurité et mauvaises quand elles corrigent cette impression. Les statistiques sont les statistiques. Les habitants de Quimper déposent des plaintes et ils sont d'autant plus fondés à le faire que le taux d'élucidation est supérieur à celui que l'on observe dans le reste du pays, ce qui montre une bonne activité des services de police.
Quant aux statistiques sur la délinquance, vous savez très bien qu'elles traduisent l'évolution de la délinquance mais aussi l'activité des services de police. Plus les services de police sont actifs, plus les statistiques manifestent cette activité par un accroissement des infractions constatées. Donc, vous avez raison, les statistiques doivent être maniées avec une certaine précaution, mais aussi avec un souci d'objectivité que je vous incite à partager avec moi.
RPR 11 REP_PUB Bretagne O