FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 964  de  M.   Delobel Jean ( Socialiste - Nord ) QOSD
Ministère interrogé :  équipement et transports
Ministère attributaire :  équipement et transports
Question publiée au JO le :  06/12/1999  page :  6890
Réponse publiée au JO le :  08/12/1999  page :  10604
Rubrique :  outre-mer
Tête d'analyse :  DOM : Réunion
Analyse :  tourisme et loisirs. survols touristiques. sécurité
Texte de la QUESTION : M. Jean Delobel interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les accidents d'avions survenus dans l'île de la Réunion depuis une trentaine d'années. En effet, des survols touristiques de l'île sont organisés par des aéro-clubs qui se font concurrence au niveau des prix et dont les pilotes manquent d'expérience. Il en résulte une guerre larvée entre les aéro-clubs et les sociétés de transport public plus chères qui crient à la concurrence déloyale. La sécurité des passagers doit être assurée. Il faut que le vide juridique actuel soit comblé par une réglementation interne qui aurait pour but de clarifier la distinction entre les sociétés de transport public et les aéro-clubs privés. Une mesure législative, évoquée en 1984 se fait toujours attendre. Il lui demande quelles dispositions immédiates il envisage de mettre en place pour répondre à ces graves questions de sécurité concernant les vols touristiques.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Jean Delobel a présenté une question, n° 964, ainsi rédigée:
«M. Jean Delobel interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les accidents d'avions survenus dans l'île de la Réunion depuis une trentaine d'années. En effet, des survols touristiques de l'île sont organisés par des aéro-clubs qui se font concurrence au niveau des prix et dont les pilotes manquent d'expérience. Il en résulte une guerre larvée entre les aéro-clubs et les sociétés de transport public plus chères qui crient à la concurrence déloyale. La sécurité des passagers doit être assurée. Il faut que le vide juridique actuel soit comblé par une réglementation interne qui aurait pour but de clarifier la distinction entre les sociétés de transport public et les aéro-clubs privés. Une mesure législative, évoquée en 1984, se fait toujours attendre. Il lui demande quelles dispositions immédiates il envisage de mettre en place pour répondre à ces graves questions de sécurité concernant les vols touristiques.»
La parole est à M. Jean Delobel, pour exposer sa question.
M. Jean Delobel. Madame la secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle, la question sur laquelle j'appelle aujourd'hui l'attention du Gouvernement m'a été posée par une famille du Nord qui a connu un drame épouvantable, puisqu'elle a perdu ses enfants dans un accident d'aviation.
Depuis une trentaine d'années, les accidents d'avions et d'hélicoptère survenus dans l'île de la Réunion ont endeuillé de nombreuses familles, dont une de ma circonscription. Les plus chanceux - si j'ose m'exprimer ainsi - qui ont échappé à la mort sont restés handicapés à vie.
Des aéro-clubs employant des pilotes souvent inexpérimentés organisent des survols touristiques de l'île à des prix dérisoires. Ainsi, il est possible d'effectuer un survol de l'île pour un prix variant entre 270 et 340 francs par personne tandis que, dans une société agréée, l'excursion coûte entre 880 et 1 280 francs. L'écart vient du fait que le pilote professionnel touche un salaire de son entreprise, tandis que le pilote privé cherche plutôt à faire des heures, d'où l'éternelle guerre larvée entre les aéro-clubs et les sociétés de transport public qui crient à la concurrence déloyale.
Tout le monde sait que le développement du tourisme est une ressource économique vitale dont ne peut se priver l'île de la Réunion. Il est cependant inacceptable que les revues et les guides touristiques fassent de la publicité pour les compagnies non agréées, privilégiant par rapport à la logique des affaires la sécurité des passagers.
Par ailleurs, on a trouvé aux commandes de certains appareils impliqués dans des accidents mortels des pilotes privés qui comptaient entre cent et deux cents heures de vol. Je vous rappelle que, dans une société de transport public, le pilote professionnel doit avoir au moins cinq cents heures d'expérience.
Plus troublant encore, un Cessna qui s'est écrasé fin 1994 à quelques kilomètres de Marla était piloté par un jeune homme de dix-sept ans. Il est clair que les vols effectués par des professionnels disposant d'un agrément pour le transport des passagers ne peuvent pas être comparés à ceux pratiqués par des élèves pilotes, même si, comme l'a montré l'actualité de ces dernières années et tout récemment le crash de l'avion égyptien, le risque zéro n'existe pas.
Dans ce contexte, il est urgent de combler le vide juridique actuel par une réglementation interne plus contraignante visant à clarifier la distinction entre les sociétés de transport public et les aéro-clubs privés, car les exigences en matière de sécurité et de fiabilité du matériel ne sont pas les mêmes.
J'ajoute, avant de conclure, qu'une mesure législative évoquée en 1984 se fait toujours attendre.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, d'être notre interprète auprès de M. le ministre des transports et de m'indiquer quelles mesures concrètes et immédiates peuvent être envisagées pour remédier à cette situation.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le député, vous abordez ce sujet en insistant sur le plan humain, en rappelant la tragédie que représente un accident d'avion et les souffrances qu'il entraîne. En répondant à une telle question par une argumentation juridique, en rappelant le droit et la loi, j'ai toujours le sentiment de ne pas avoir le ton adéquat, attendu par les familles concernées. Néanmoins, à travers des exemples concernant le département de la Réunion, vous soulevez la question du champ d'activité des aéro-clubs par rapport à celui des pilotes professionnels. Et je vous apporterai la réponse la plus précise possible sur ce sujet.
Vous avez eu tout à fait raison de souligner l'importance qu'il y a à ce que ces domaines soient clairement délimités en ce qui concerne le transport des passagers. Le ministre chargé des transports, M. Jean-Claude Gayssot, estime que l'on ne peut cependant pas parler de «vide juridique» à cet égard, du moins depuis l'intervention du décret du 28 septembre 1998, qui a défini ce qui est permis et ce qui ne l'est pas pour les aéro-clubs.
Ceux-ci peuvent effectuer des vols locaux à titre onéreux, au profit de personnes étrangères à l'aéro-club, mais sous trois conditions. Il faut que le vol ait une durée inférieure à trente minutes, que le terrain de départ soit également le terrain d'arrivée et que l'avion ne s'éloigne pas de plus de quarante kilomètres du terrain de départ.
Le vol ainsi effectué doit bien entendu l'être par un pilote confirmé, agissant de façon bénévole, membre de l'aéro-club et autorisé par le président, et non pas par un élève-pilote.
Les pilotes privés peuvent effectuer ces vols à la condition de totaliser au moins 200 heures de vols au titre de la licence détenue, dont au minimum trente heures dans les douze derniers mois. Ils doivent être également détenteurs d'un certificat d'aptitude physique et mentale délivré depuis moins d'un an.
A ces précautions techniques s'ajoutent, pour l'aéro-club, l'obligation de l'agrément par les services de la direction générale de l'aviation civile, celle de la souscription d'une police d'assurance couvrant sa responsabilité civile tant à l'égard des personnes transportées qu'à l'égard des tiers, et, enfin, l'obligation de n'effectuer ni démarchage ni publicité à titre onéreux.
Si des infractions à ces règles sont constatées, elles peuvent conduire au retrait de l'agrément de l'aéro-club et, pour les cas les plus graves, aux sanctions pénales prévues au code de l'aviation civile.
C'est dire qu'il s'agit là d'un sujet sur lequel nous sommes particulièrement vigilants. Chaque fois que des manquements sont survenus, les services de police compétents n'ont pas manqué de mener une enquête, dont les services du ministre des transports ont, bien entendu, été informés.
Soyez assuré, monsieur le député, que M. Jean-Claude Gayssot partage votre souci de la sécurité des vols et du respect de la répartition des tâches que je viens d'évoquer. Il a d'ailleurs aussitôt signalé votre préoccupation aux services locaux de la Réunion, afin que d'éventuels manquements ne restent pas sans suite.
SOC 11 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O