Texte de la QUESTION :
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M. Kofi Yamgnane appelle l'attention de M. le ministre de la défense sur la portée de la jurisprudence du Conseil d'Etat en matière de traitement des restructurations militaires. Par un arrêt du 13 novembre 1997, entraînant annulation du jugement du tribunal administratif de Besançon, du 6 avril 1995 « commune de Fougerolle », la haute juridiction administrative a établi que les collectivités pouvaient céder un terrain à une société moyennant le franc symbolique contre engagement de la création de cinq emplois sous trois ans ou une somme de 36 000 francs en cas de non-respect de l'accord « lorsque la cession est justifiée par des motifs d'intérêt général et comporte des contreparties suffisantes ». La notion de contreparties suffisantes devra donc être appréciée en comparant la valeur du bien, soit un prix de marché, aux avantages économiques ou sociaux attendus de sa cession, sous peine de voir les délibérations censurées sur la base de la violation du principe de propriété des collectivités (Conseil constitutionnel - 25-26 juillet 1986 - privatisations) interdisant la cession de biens de leur patrimoine à un prix inférieur à leur valeur, de telles cessions s'apparentent à des libéralités. Il résulte de cette décision que les communes devront s'adapter aux lois du marché pour disposer de leur patrimoine immobilier. Il en va ainsi pour ce qui concerne les communes ou groupement de communes sur les territoires desquels se trouvaient implantées, préalablement à la mise en place du dispositif de réductions des effectifs militaires, des unités de l'armée de terre. En effet, les nécessités stratégiques ont, dans certains cas, et tout particulièrement pour ce qui concerne le site actuellement occupé par le 41e régiment d'infanterie à l'entrée de la presqu'île de Crozon, dans le Finistère, imposé une implantation éloignée des axes routiers et des centres urbains. Cet état de fait qui apparaissait compatible avec une optique militaire l'est nettement moins avec une reconversion civile. Les avantages d'hier se muent en inconvénients d'aujourd'hui et en écueils pour demain. L'exacte appréciation de la contrepartie économique et sociale à attendre de la cession d'un bien immobilier, en parfait état de conservation et de fonctionnement, mais à l'écart des zones industrielles et commerciales classiques posera donc un problème quasiment insoluble pour les collectivités qui auront à disposer des locaux laissés vacants par notre armée. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser dans quelles conditions et sous quelles modalités, la cession des actifs de la défense appréhendés par les collectivités pourra s'effectuer au profit d'entités privées.
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Texte de la REPONSE :
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Les immeubles militaires inutiles au service de l'Etat sont aliénés dans les conditions prévues par l'article R. 148-3 du code du domaine de l'Etat. Dans ce cadre, leur cession intervient, en principe, par adjudication. Il est toutefois fait exception aux enchères publiques lorsque la cession porte sur un immeuble dont la valeur n'excède pas un million de francs, ou lorsqu'elle intervient au profit d'une collectivité locale. Ainsi, la commune, le département, la région du lieu de situation de l'immeuble ou l'établissement public de coopération intercommunale peuvent bénéficier d'une vente amiable lorsqu'ils s'engagent à acquérir le bien et à en payer le prix dans un délai fixé en accord avec le ministère de la défense. Le prix de cette cession est fixé par la direction des services fiscaux en fonction de la valeur vénale de l'immeuble. Il ne peut, en aucun cas, être réduit à une valeur symbolique. La cession gratuite s'analyse en effet en une subvention en nature entrant dans la catégorie des dépenses en capital. Engageant les finances de l'Etat, elle exige une autorisation du Parlement en application du titre II de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. Les cessions d'immeubles dépendant du domaine privé des communes de plus de 2 000 habitants, des départements, des régions et des établissements publics de coopération intercommunale sont décidées après délibération motivée de l'assemblée concernée, prise au regard de l'avis du service des domaines sur la valeur vénale du bien. L'arrêt « commune de Fougerolles », rendu par le Conseil d'Etat le 3 novembre 1997, précise que lorsque l'intérêt général le justifie et que des garanties existent, le prix de vente peut être remplacé par une autre contrepartie, telle une promesse de création d'emplois, à la condition que celle-ci soit suffisante. Cette décision, qui porte sur la nature de la compensation susceptible d'être offerte à la collectivité locale en contrepartie de l'abandon de la propriété d'un élément de son patrimoine immobilier, n'a pas d'incidence sur les dispositions législatives et réglementaires qui encadrent actuellement la cession des immeubles militaires inutiles à l'Etat. Il convient toutefois de noter que lorsqu'un ensemble immobilier libéré par les armées ne peut, en raison de ses caractéristiques exceptionnelles et de sa localisation, faire l'objet d'une cession en l'état sur le marché, comme par exemple le site de Chateaulin, le ministère de la défense s'efforce de définir, en concertation avec les autres administrations, les collectivités territoriales et les acteurs de la vie économique locale, un programme de valorisaiton et de reconversion du site, préalablement à toute cession. L'évaluation de l'immeuble est ensuite effectuée, en fonction du projet élaboré, par le service des domaines de la direction générale des impôts, qui prend en compte la situation économique locale, les conséquences liées au départ des militaires, ainsi que les utilisations et la construtibilité nouvellement définies pour l'entreprise.
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