FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 101604  de  M.   Morel-A-L'Huissier Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Lozère ) QE
Ministère interrogé :  commerce extérieur
Ministère attributaire :  commerce extérieur
Question publiée au JO le :  01/08/2006  page :  7931
Réponse publiée au JO le :  14/11/2006  page :  11837
Rubrique :  TVA
Tête d'analyse :  création
Analyse :  TVA sociale. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de Mme la ministre déléguée au commerce extérieur sur les effets de l'instauration d'une TVA sociale sur le commerce extérieur. Le calcul et le mode opératoire de la TVA sociale sont inspirés de ceux de la TVA, d'où son nom. Ainsi, la TVA sociale s'appliquerait sur tous les biens vendus sur le territoire national, qu'ils soient fabriqués sur ce territoire ou importés de l'étranger. Á l'inverse, elle ne s'appliquerait pas aux exportations, et le montant total payé par les entreprises serait égal au total du montant encaissé par elles, grâce à leurs ventes, diminué du montant total de TVA sociale qu'elles auront payé sur leurs achats. On déduit de l'observation de ces mécanismes que la compétitivité est donnée, à l'exportation, par les prix de vente hors toutes taxes et, sur le marché intérieur, par les prix de vente toutes TVA comprises. Par conséquent, tout ce qui permet de diminuer les prix de vente hors TVA contribue à améliorer la compétitivité de nos industries à l'exportation, et tout ce qui provoque une augmentation des prix TVA comprise des produits importés (sans hausse des prix des produits fabriqués sur notre sol) a pour effet d'améliorer la compétitivité de notre industrie sur le marché intérieur. Dès lors, avec un transfert des charges sociales sur une TVA sociale, on pourrait obtenir à la fois une diminution des prix à l'exportation par suppression des cotisations qui alourdissent les prix de revient, et une augmentation des prix des produits importés par addition de la TVA sociale en plus de la TVA fiscale en vigueur. Aussi, il souhaiterait connaître son analyse en la matière.
Texte de la REPONSE : Afin de contribuer aux débats du groupe interministériel sur le financement de la protection sociale, les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ont effectué une analyse des effets macroéconomiques de court et long termes d'un basculement des cotisations sociales vers la TVA qui assurerait l'équilibre budgétaire (« TVA sociale »). Il ressort de cette analyse qu'une TVA sociale améliorerait la compétitivité des entreprises françaises et l'attractivité de la France à condition que la hausse de l'inflation reste maîtrisée. Les cotisations sociales pèsent sur la production française, qu'elle soit destinée au marché intérieur ou à l'exportation ; en revanche, la TVA exonère les produits exportés et taxe les importations. C'est sur cette dissymétrie que repose l'argument principal en faveur de la TVA sociale. Celle-ci améliorerait à court terme la compétitivité-prix des producteurs français : sur le marché intérieur, la hausse de la TVA augmente dans les mêmes proportions les prix des produits français et ceux des produits étrangers. Or, contrairement aux entreprises françaises, les entreprises étrangères ne bénéficient pas d'une diminution des cotisations sociales. Par conséquent, la compétitivité dés produits étrangers sur le marché français s'en trouve amoindrie au bénéfice des entreprises françaises ; à l'export, les prix de vente des entreprises françaises diminuent contrairement à ceux de leurs concurrents étrangers. Les entreprises françaises exportant à l'étranger bénéficient en effet de la baisse des cotisations sans avoir à subir de hausse de TVA. La plus ou moins grande efficacité de la TVA sociale dépend toutefois de deux facteurs dont l'importance dépend du contexte politique et social de la réforme : le comportement de marge des entreprises (françaises et étrangères) et le report de la hausse des prix à la consommation sur les coûts salariaux des entreprises françaises. Les gains potentiels de compétitivité à l'export ne s'observent que si les entreprises françaises n'en profitent pas pour augmenter leurs marges : l'augmentation des marges des entreprises pourrait neutraliser l'effet de la diminution des coûts de production sur les prix de vente. De même, les gains de compétitivité sur le marché intérieur sont réduits si les entreprises étrangères compriment leurs marges quand elles vendent en France, atténuant ainsi la hausse de la TVA sur le prix toutes taxes comprises des importations. De plus, la hausse de la TVA des produits importés renchérit mécaniquement les prix à la consommation : ce que l'on cesse de prélever à la production et qui cesse de peser sur les exportations, il est nécessaire de le prélever sur la consommation intérieure, en l'occurrence sur les importations. Ces effets inflationnistes seraient susceptibles de déboucher assez vite sur une hausse des salaires nominaux, les salariés faisant pression pour maintenir leur pouvoir d'achat. Si les salaires augmentent, les entreprises vont alors avoir tendance à augmenter leurs prix. Ainsi pourrait s'enclencher une spirale prix-salaire, qui réduit les avantages de la TVA sociale escomptés en termes de compétitivité et de créations d'emplois. Si cette boucle prix-salaire ne s'enclenche pas, le pouvoir d'achat des salaires n'est pas maintenu et la consommation des ménages peut en pâtir. À court terme, la baisse des cotisations employeurs entraînerait une baisse du coût du travail relativement au coût du capital. La TVA sociale pourrait alors favoriser des créations d'emplois en encourageant les entreprises à substituer du travail au capital. Une telle mesure est de nature à enrichir le contenu de la croissance en emploi : selon la même logique qui a présidé à la suppression de la part de la taxe professionnelle assise sur les salaires, on assisterait à une déformation de la structure des prélèvements obligatoires en faveur des biens et des modes de production intensifs en travail. Les secteurs abrités de la concurrence et à forte intensité en main d'oeuvre devraient profiter largement de l'introduction d'une TVA sociale. Les secteurs exposés à la concurrence et qui affichent une forte sensibilité à la baisse du coût du travail pourraient gagner des parts de marché, tout en maintenant une localisation de leur production sur le territoire national. Les industries moins exposées à l'international ou relativement moins sensibles à la baisse du coût du travail devraient bénéficier de manière moindre de cette mesure. Tous ces bénéfices seront d'autant plus importants que les comportements de marge des entreprises et les politiques et négociations salariales décrites plus haut parviendront à maîtriser l'inflation. Les règles communautaires encadrant la TVA ne paraissent pas constituer un obstacle à l'introduction d'une TVA sociale. Elles prévoient en effet que les Etats membres sont libres de fixer le taux normal, dès lors qu'il est au minimum égal à 15 %. Le Danemark a déjà adopté un tel système, sans que cela ait suscité d'opposition de la Commission européenne.
UMP 12 REP_PUB Languedoc-Roussillon O