Texte de la QUESTION :
|
M. Christian Philip attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la question de l'application de l'article 123 de la loi SRU. Sans remettre en cause l'objectif de cette mesure qui est de généraliser à l'ensemble des personnes en situation de précarité financière un dispositif de « semi-gratuité » sur la totalité des réseaux, quelle que soit la localisation du lieu de résidence de l'usager, il apparaît que la mise en oeuvre de cet article pose plusieurs difficultés. Les différents débats qui ont suivi l'adoption de ce texte, notamment ceux organisés à l'initiative du groupement des autorités organisatrices de transports, ont permis de mettre en évidence les difficultés posées par la mise en oeuvre concrète de l'article par les autorités organisatrices. Ces difficultés, qui n'ont pas évolué depuis la publication de la loi SRU, sont à la fois d'ordre politique - la compétence d'organisation des transports collectifs urbains relève des collectivités locales, ce qui entraîne une grande diversité des situations en matière tarifaire - technique - difficulté d'identification des bénéficiaires, les personnes ne résidant pas dans le PTU - financier pour l'évaluation et le financement des compensations tarifaires. Les autorités organisatrices urbaines hors Ile-de-France sont nombreuses à pratiquer des réductions tarifaires, allant jusqu'à la gratuité, pour des catégories sociales défavorisées, en application de l'article 2 de la LOTI sur le « droit au transport ». Pourtant, elles sont peu nombreuses à appliquer cet article à la lettre. Alors que l'article 7-III de la LOTI dispose que « la politique tarifaire est définie par l'autorité compétente de manière à obtenir l'utilisation la meilleure, sur le plan économique et social, du système de transport correspondant. Sous réserve des pouvoirs généraux des autorités de l'Etat en matière de prix, l'autorité compétente fixe ou homologue les tarifs », l'article 123 de la loi SRU impose de pratiquer une réduction tarifaire. De plus, il impose aux autorités organisatrices urbaines des catégories de bénéficiaires, un niveau minimal de réduction et une application de celle-ci à des usagers non-résidents sur le PTU. Pour se conformer aux objectifs politiques de décentralisation des compétences, les autorités organisatrices devraient être libres des voies et des moyens pour mettre en place le droit au transport dans leur aire de compétence. Ainsi, et pour rendre applicable ce droit au transport par les autorités organisatrices, il ne paraît pas souhaitable d'imposer une liste de bénéficiaires potentiels, mais de laisser le choix aux autorités organisatrices des tarifications sociales ; le niveau minimal de réduction pourrait être maintenu, ainsi que l'alternative « toute autre forme d'aide équivalente », qui pourrait, par exemple, aboutir à la mise en place de chèques transports, avec éventuellement des partenariats avec des organismes d'assurance-chômage ; le texte devrait laisser les autorités organisatrices libres des moyens pour mettre en oeuvre des réductions tarifaires, sur leur aire de compétence. A cet égard, la clause concernant la réduction à des non-résidents du PTU ne devrait pas être maintenue. Pour que les pouvoirs publics puissent s'assurer que les autorités organisatrices appliquent le texte, celles-ci devraient avoir l'obligation, chaque année, de produire un bilan des actions mises en oeuvre pour assurer ce droit au transport. Le manque de clarté dans la rédaction du texte impose donc pour son application une évolution profonde de l'article 123, II souhaiterait savoir si un projet de loi modifiant cet article sera déposé par le Gouvernement et si ce projet de loi comportera uniquement des modifications liées à l'article 123 ou bien des évolutions concernant plusieurs articles de la loi SRU.
|
Texte de la REPONSE :
|
L'article 123 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (loi SRU) a posé le principe d'une obligation de semi-gratuité au bénéfice de personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond fixé par le code de la sécurité sociale. Ce dispositif a vocation à généraliser, à l'ensemble des systèmes de transport urbain du territoire, des mesures de tarification sociale auparavant librement décidées par les diverses autorités organisatrices de transport. Il rend également obligatoire la prise en compte, aussi large que possible, des personnes en grande difficulté sociale, notamment celles qui peuvent s'affilier à la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC), soit au total environ 10 % de la population française. Enfin, l'article 123 affirme le principe d'interopérabilité : un bénéficiaire donné doit avoir droit, quel que soit son lieu de résidence, à la tarification sociale attachée à n'importe quel système de transport urbain du territoire national. Deux ans après le vote de la loi, sa mise en oeuvre apparaît très contrastée. Les difficultés rencontrées ont été de deux ordres : le recensement fiable et exhaustif des personnes visées par l'article 123 et la mise en oeuvre du principe d'interopérabilité. Le syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF), autorité organisatrice pour l'ensemble de la région francilienne, a instauré la carte Solidarité Transport au profit des personnes spécifiquement visées par l'article 123 qui ne bénéficiaient pas, précédemment, des tarifs sociaux pour les jeunes, les chômeurs, les personnes âgées, les boursiers, les familles nombreuses. Ainsi, 120 000 cartes ont été délivrées à des personnes bénéficiaires de la CMU ou de l'aide médicale de l'Etat. Au total, le STIF estime avoir couvert, à ce jour, entre 50 % et 75 % des 800 000 personnes concernées. Cette démarche pragmatique du STIF permet progressivement d'atteindre l'objectif principal de la loi, pour ce qui concerne la région capitale, à l'exception de l'interopérabilité avec les réseaux en région. Dans les régions, ainsi que l'a récemment mis en lumière le débat organisé le 20 novembre 2002 par le groupement des autorités responsables des transports (GART), la plupart des autorités organisatrices ont depuis longtemps prévu de nombreux tarifs sociaux. Ces dispositifs sont extrêmement divers et les modalités de recensement des personnes spécifiquement visées par l'article 123 restent complexes. Ainsi que le fait observer l'honorable parlementaire, le principe d'interopérabilité n'est pas encore mis en oeuvre, tant par le STIF vis-à-vis des autres autorités organisatrices que par les autorités organisatrices de province entre elles ou vis-à-vis du STIF. En effet, il n'existe pas de modalités fiables de reconnaissance mutuelle des ayants droit entre les différentes autorités organisatrices. Le ministère de l'équipement, des transports, du logement et de la mer n'est pas opposé à une évolution de l'article 123 simplifiant sa mise en oeuvre et donnant pleine et entière responsabilité des autorités organisatrices, dans le cadre des compétences que l'article 7-III de la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs leur confère.
|