Texte de la REPONSE :
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CONSÉQUENCES DE LA MISE EN OEUVRE DE LA PRESTATION DE SERVICE UNIQUE POUR LES CRÈCHES M. le
président. La parole est à M. Jacques Myard, pour exposer sa question,
n° 1049. M. Jacques
Myard. Je tiens à attirer l'attention du Gouvernement sur la prestation
de service unique ou PSU. Même s'il s'agit d'un lieu
commun, il ne faut pas oublier que l'enfer est pavé de bonnes intentions. On
peut, avec un principe louable ou de bon sens, mettre en difficulté des
collectivités qui ont fait d'importants efforts pour l'accueil de la petite
enfance. Une circulaire nationale de la CAF appuyée sur
un décret d'août 2002 crée une prestation de service unique pour l'accueil des
jeunes enfants, en vue d'assouplir le système en instaurant un multi-accueil et,
pour les familles, des prestations en quelque sorte " à la carte " - permettant
par exemple de payer exactement le nombre d'heures passées par l'enfant à la
crèche. La ville dont je suis l'élu a réussi à offrir, au
prix d'un énorme effort, près de 400 places en crèche et halte-garderie pour une
population de 22 258 habitants. M. Pierre Forgues. C'est une ville riche ! M. Jacques Myard.
Justement pas, mon cher collègue ! Si on calcule ses ressources par habitant,
elle est même très pauvre car, contrairement à un lieu commun, elle ne perçoit
pas de taxe professionnelle. Ce sont donc les ménages qui supportent la
fiscalité locale et la taxe d'habitation représente 50 % du budget de
fonctionnement. Ces 400 places de crèche et
halte-garderie représentent d'importants frais de structure, et un remplissage à
taux plein est indispensable pour assurer un équilibre entre les apports
respectifs des familles, de la ville et de la CAF. Si l'on déséquilibre le
rapport de trois tiers qui s'était plus ou moins établi en réduisant la
participation demandée aux familles - intention certes louable -, on demandera
davantage au contribuable : c'est le principe des vases communicants ! Selon nos calculs, les pertes subies par les collectivités
locales gestionnaires représentent quatre points d'impôts supplémentaires. Cela
finit par faire beaucoup, s'ajoutant à d'autres charges récurrentes qui
résultent de choix économiques anciens : ainsi, entre autres, la classification
des communes en villes " riches " ou " pauvres ", qui, sous prétexte que nous
manquons de logements sociaux, nous vaut d'être surtaxés et de voir notre
dotation globale de fonctionnement croître moitié moins vite que celle des
autres villes. Bien que partant d'une bonne intention, ce
système est pervers et doit être remis à plat. Personnellement j'attends du
Gouvernement qu'il révise les orientations de la CAF, de manière à ce qu'elles
tiennent compte aussi des efforts consentis par les collectivités locales en
faveur du bien-être des familles. M. le président. La parole est à Mme la secrétaire
d'État aux personnes handicapées. Mme Marie-Anne Montchamp,
secrétaire d'État aux personnes handicapées. Monsieur le député, depuis le
1er janvier 2002, la prestation de service unique, la PSU, servie par les CAF,
est applicable à tous les établissements qui accueillent des jeunes enfants
relevant du décret du 1er août 2000, quel que soit le type d'accueil assuré :
halte-garderie, crèche collective, familiale ou parentale. Un des objectifs forts de cette réforme était de mieux
s'adapter aux besoins des parents en soutenant le développement du "
multi-accueil ", c'est-à-dire la faculté pour un établissement recevant
originellement les enfants uniquement de façon permanente d'assurer aussi un
accueil occasionnel. Il s'agit de s'adapter aux nouveaux rythmes professionnels
des parents, qui n'ont pas forcément besoin d'un accueil à temps complet chaque
jour, et aux situations atypiques ou d'urgence. Les
modalités de mise en oeuvre de la prestation de service unique ont comporté une
phase importante de concertation, organisée dans le cadre de groupes de travail
auxquels participaient la CNAF et l'ensemble des partenaires nationaux du
secteur de la petite enfance, AMF, professionnels des établissements, etc. Cette réforme a été matérialisée par la convention
d'objectifs et de gestion passée entre l'État et la CNAF, pour la période
2001-2004, et qui est entrée en vigueur au 1er janvier 2002. Mais la première
année de mise en oeuvre de cette réforme a fait apparaître les difficultés
financières rencontrées par certains gestionnaires, liées notamment au passage
d'une tarification et d'une aide de la CAF journalières à une tarification et
une aide de la CAF horaires. Ainsi les familles ne payent que les heures
d'accueil réservées et la CAF ne paye que les heures d'accueil tarifées. La concertation au sein du groupe de travail a conduit à
proposer des mesures visant à résoudre les difficultés financières constatées,
mesures qui ont été opérationnelles dès 2003. Ces mesures portaient
essentiellement sur les éléments suivants : la prise en compte du coût de trois
heures de concertation et d'accompagnement par place et par an ; la possibilité
pour les établissements de pratiquer la réservation par créneaux horaires -
matinée, après-midi, repas - plutôt que par heure ; la conclusion d'un contrat
d'objectifs sur trois ans pour les structures enregistrant une baisse de
recettes, qui leur garantit temporairement et sous certaines conditions -
notamment l'engagement du gestionnaire d'améliorer le taux d'occupation, de
favoriser la diversité des publics accueillis et la mixité sociale, et
d'assouplir le mode de fonctionnement des structures afin de mieux répondre aux
demandes des familles - un niveau de prestation de service équivalent à
l'ancien. Par ailleurs, le délai de passage à ce nouveau
système de tarification, dont la date butoir était initialement fixée au 31
décembre 2004, a été prolongé de six mois pour les établissements qui n'ont pas
encore " adhéré " à la PSU. Pour suivre l'appropriation
de ces nouvelles règles par les crèches, la CNAF a mis en place un comité
partenarial de la petite enfance auquel l'État est associé. Il va de soi que si
les difficultés venaient à persister malgré les aménagements apportés, le
dispositif mis en place serait amendé en tant que de besoin. Tel est, monsieur le député, l'engagement que l'État
envisage de demander à la CNAF de souscrire dans le cadre des négociations de la
future convention d'objectifs et de gestion pour la période 2005-2008. M. le président. La
parole est à M. Jacques Myard. M. Jacques Myard. Je vous ai bien écoutée, madame
la secrétaire d'État, et j'ai cru percevoir que vos propos allaient crescendo jusqu'à rejoindre mes préoccupations. Je tiens
cependant à dire avec une certaine solennité que le système est mauvais. En
effet il déresponsabilise les parents, dont il fait des clients, qui veulent une
heure par-ci, une demi-matinée par là, sans se soucier de la gestion des
berceaux sur toute la journée. Mais on ne gère pas des crèches comme on gère des
billets de train. Il faut tenir compte des frais de gestion des structures : si
une famille choisit de ne laisser son enfant en crèche que le matin, par
exemple, on ne trouve pas automatiquement un enfant pour occuper le berceau
l'après-midi. Il faut être à cent lieues du véritable fonctionnement des crèches
pour penser que cela fonctionne ainsi. Si vous voulez faire des familles des
clients de la prestation sociale, continuez à aller dans ce sens ! C'est la raison pour laquelle je demande de remettre à plat
un système qui n'aboutit qu'à une augmentation des impôts accompagnée, non pas
d'une optimisation, mais d'une minimisation du fonctionnement de ces crèches, ce
qui est quand même un peu fort de café !
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