FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1049  de  M.   Myard Jacques ( Union pour un Mouvement Populaire - Yvelines ) QOSD
Ministère interrogé :  solidarités, santé et famille
Ministère attributaire :  solidarités, santé et famille
Question publiée au JO le :  01/02/2005  page :  886
Réponse publiée au JO le :  02/02/2005  page :  486
Rubrique :  enfants
Tête d'analyse :  crèches et garderies
Analyse :  prestation de service unique. mise en oeuvre. conséquences
Texte de la QUESTION : M. Jacques Myard appelle l'attention de M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille sur les difficultés de mise en oeuvre de la prestation de service unique (PSU) pour les gestionnaires des structures d'accueil de la petite enfance. Cette réforme dont l'application est généralisée au 1er janvier de cette année a pour objectif de simplifier le financement des prestations en faveur des crèches par la CAF et d'assouplir les modalités d'accueil des jeunes enfants. L'optimisation des capacités d'accueil des équipements, la plus grande amplitude des horaires d'ouverture, la meilleure prise en compte des besoins des enfants sont des objectifs louables, auxquels nous souscrivons. Il n'en demeure pas moins que la mise en oeuvre de la réforme se traduit pour les gestionnaires des crèches par des difficultés de fonctionnement et des pertes de recettes importantes. Les inquiétudes ont trait à l'existence des coûts fixes de ces structures et la nécessité d'assurer la qualité de l'accueil de l'enfant. Il lui demande de bien vouloir revenir sur le dispositif de la réforme qui pénalise gravement les collectivités locales gestionnaires, notamment celles qui ont effectué des efforts importants en matière d'accueil de la petite enfance et dont les pertes avec la PSU peuvent atteindre jusqu'à 3 ou 4 points d'impôts.
Texte de la REPONSE :

CONSÉQUENCES DE LA MISE EN OEUVRE
DE LA PRESTATION DE SERVICE UNIQUE
POUR LES CRÈCHES

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard, pour exposer sa question, n° 1049.
M. Jacques Myard. Je tiens à attirer l'attention du Gouvernement sur la prestation de service unique ou PSU.
Même s'il s'agit d'un lieu commun, il ne faut pas oublier que l'enfer est pavé de bonnes intentions. On peut, avec un principe louable ou de bon sens, mettre en difficulté des collectivités qui ont fait d'importants efforts pour l'accueil de la petite enfance.
Une circulaire nationale de la CAF appuyée sur un décret d'août 2002 crée une prestation de service unique pour l'accueil des jeunes enfants, en vue d'assouplir le système en instaurant un multi-accueil et, pour les familles, des prestations en quelque sorte " à la carte " - permettant par exemple de payer exactement le nombre d'heures passées par l'enfant à la crèche.
La ville dont je suis l'élu a réussi à offrir, au prix d'un énorme effort, près de 400 places en crèche et halte-garderie pour une population de 22 258 habitants.
M. Pierre Forgues. C'est une ville riche !
M. Jacques Myard. Justement pas, mon cher collègue ! Si on calcule ses ressources par habitant, elle est même très pauvre car, contrairement à un lieu commun, elle ne perçoit pas de taxe professionnelle. Ce sont donc les ménages qui supportent la fiscalité locale et la taxe d'habitation représente 50 % du budget de fonctionnement.
Ces 400 places de crèche et halte-garderie représentent d'importants frais de structure, et un remplissage à taux plein est indispensable pour assurer un équilibre entre les apports respectifs des familles, de la ville et de la CAF. Si l'on déséquilibre le rapport de trois tiers qui s'était plus ou moins établi en réduisant la participation demandée aux familles - intention certes louable -, on demandera davantage au contribuable : c'est le principe des vases communicants !
Selon nos calculs, les pertes subies par les collectivités locales gestionnaires représentent quatre points d'impôts supplémentaires. Cela finit par faire beaucoup, s'ajoutant à d'autres charges récurrentes qui résultent de choix économiques anciens : ainsi, entre autres, la classification des communes en villes " riches " ou " pauvres ", qui, sous prétexte que nous manquons de logements sociaux, nous vaut d'être surtaxés et de voir notre dotation globale de fonctionnement croître moitié moins vite que celle des autres villes.
Bien que partant d'une bonne intention, ce système est pervers et doit être remis à plat. Personnellement j'attends du Gouvernement qu'il révise les orientations de la CAF, de manière à ce qu'elles tiennent compte aussi des efforts consentis par les collectivités locales en faveur du bien-être des familles.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État aux personnes handicapées. Monsieur le député, depuis le 1er janvier 2002, la prestation de service unique, la PSU, servie par les CAF, est applicable à tous les établissements qui accueillent des jeunes enfants relevant du décret du 1er août 2000, quel que soit le type d'accueil assuré : halte-garderie, crèche collective, familiale ou parentale.
Un des objectifs forts de cette réforme était de mieux s'adapter aux besoins des parents en soutenant le développement du " multi-accueil ", c'est-à-dire la faculté pour un établissement recevant originellement les enfants uniquement de façon permanente d'assurer aussi un accueil occasionnel. Il s'agit de s'adapter aux nouveaux rythmes professionnels des parents, qui n'ont pas forcément besoin d'un accueil à temps complet chaque jour, et aux situations atypiques ou d'urgence.
Les modalités de mise en oeuvre de la prestation de service unique ont comporté une phase importante de concertation, organisée dans le cadre de groupes de travail auxquels participaient la CNAF et l'ensemble des partenaires nationaux du secteur de la petite enfance, AMF, professionnels des établissements, etc.
Cette réforme a été matérialisée par la convention d'objectifs et de gestion passée entre l'État et la CNAF, pour la période 2001-2004, et qui est entrée en vigueur au 1er janvier 2002. Mais la première année de mise en oeuvre de cette réforme a fait apparaître les difficultés financières rencontrées par certains gestionnaires, liées notamment au passage d'une tarification et d'une aide de la CAF journalières à une tarification et une aide de la CAF horaires. Ainsi les familles ne payent que les heures d'accueil réservées et la CAF ne paye que les heures d'accueil tarifées.
La concertation au sein du groupe de travail a conduit à proposer des mesures visant à résoudre les difficultés financières constatées, mesures qui ont été opérationnelles dès 2003. Ces mesures portaient essentiellement sur les éléments suivants : la prise en compte du coût de trois heures de concertation et d'accompagnement par place et par an ; la possibilité pour les établissements de pratiquer la réservation par créneaux horaires - matinée, après-midi, repas - plutôt que par heure ; la conclusion d'un contrat d'objectifs sur trois ans pour les structures enregistrant une baisse de recettes, qui leur garantit temporairement et sous certaines conditions - notamment l'engagement du gestionnaire d'améliorer le taux d'occupation, de favoriser la diversité des publics accueillis et la mixité sociale, et d'assouplir le mode de fonctionnement des structures afin de mieux répondre aux demandes des familles - un niveau de prestation de service équivalent à l'ancien.
Par ailleurs, le délai de passage à ce nouveau système de tarification, dont la date butoir était initialement fixée au 31 décembre 2004, a été prolongé de six mois pour les établissements qui n'ont pas encore " adhéré " à la PSU.
Pour suivre l'appropriation de ces nouvelles règles par les crèches, la CNAF a mis en place un comité partenarial de la petite enfance auquel l'État est associé. Il va de soi que si les difficultés venaient à persister malgré les aménagements apportés, le dispositif mis en place serait amendé en tant que de besoin.
Tel est, monsieur le député, l'engagement que l'État envisage de demander à la CNAF de souscrire dans le cadre des négociations de la future convention d'objectifs et de gestion pour la période 2005-2008.
M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.
M. Jacques Myard. Je vous ai bien écoutée, madame la secrétaire d'État, et j'ai cru percevoir que vos propos allaient crescendo jusqu'à rejoindre mes préoccupations. Je tiens cependant à dire avec une certaine solennité que le système est mauvais. En effet il déresponsabilise les parents, dont il fait des clients, qui veulent une heure par-ci, une demi-matinée par là, sans se soucier de la gestion des berceaux sur toute la journée. Mais on ne gère pas des crèches comme on gère des billets de train. Il faut tenir compte des frais de gestion des structures : si une famille choisit de ne laisser son enfant en crèche que le matin, par exemple, on ne trouve pas automatiquement un enfant pour occuper le berceau l'après-midi. Il faut être à cent lieues du véritable fonctionnement des crèches pour penser que cela fonctionne ainsi. Si vous voulez faire des familles des clients de la prestation sociale, continuez à aller dans ce sens !
C'est la raison pour laquelle je demande de remettre à plat un système qui n'aboutit qu'à une augmentation des impôts accompagnée, non pas d'une optimisation, mais d'une minimisation du fonctionnement de ces crèches, ce qui est quand même un peu fort de café !

UMP 12 REP_PUB Ile-de-France O