Texte de la QUESTION :
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M. Richard Dell'Agnola appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la possibilité offerte aux citoyens étrangers de produire un certificat de coutume lors de leur mariage. La circulaire CIV/09/05 du 2 mai 2005 autorise l'officier d'état civil à vérifier si le ou les futurs époux remplissent les conditions du mariage, en demandant un certificat de coutume établi par les autorités consulaires étrangères de leur nationalité. Or l'attestation de mariage à laquelle est joint le certificat de coutume des ressortissants algériens est contraire au droit français. Ainsi, le code du mariage algérien permet de contracter mariage avec plus d'une épouse dans la limite de la Chari'a (art. 8), prévoit que la conclusion du mariage pour la femme incombe à son tuteur matrimonial (art. 11) et interdit à une musulmane d'épouser un non-musulman (art. 31). Les parquets des tribunaux de grande instance saisis ont des conclusions divergentes. Certains considèrent qu'en droit français, le mariage n'étant pas prohibé entre deux personnes de religion différente, il n'est en conséquence pas possible de célébrer le mariage au vu du certificat de coutume. Une position différente a également été prise, estimant alors qu'ils ne peuvent requérir l'annulation d'un mariage contracté en violation d'une loi étrangère dès lors que les conditions exigées par la loi française sont remplies. La situation actuelle est source de difficultés : les futurs époux au regard de notre loi, plus favorable, ont la possibilité de présenter un certificat de coutume. Celui-ci ne permet pas à l'officier d'état civil d'effectuer les vérifications nécessaires, s'agissant de la simple transcription de la loi applicable dans le pays d'origine, elle-même contraire au droit français. En outre, en fonction des décisions des parquets, les mariages sont autorisés ou pas. En conséquence, il demande de nouvelles instructions qui permettent aux officiers d'état civil de ne pas verser au dossier des futurs époux les certificats de coutume contraires à la loi française.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'en application des règles du droit international privé français, les conditions de fond du mariage sont définies par la loi nationale de chaque époux, sauf convention internationale contraire et sous réserve de sa compatibilité avec l'ordre public français. La preuve du contenu de la loi étrangère appartient au futur conjoint étranger et le certificat de coutume a ainsi pour objet de préciser quelles sont, selon la loi étrangère, les conditions de fond du mariage et les pièces d'état civil ou les justificatifs permettant au futur conjoint étranger de démontrer qu'il remplit ces conditions. L'officier de l'état civil appelé à célébrer le mariage d'un étranger doit donc préalablement vérifier la compatibilité des conditions de fond posées par la loi étrangère avec l'ordre public français. En cas d'incompatibilité, la mise en oeuvre de l'exception d'ordre public prévue en droit international privé français permet d'exclure l'application de la loi étrangère et conduit donc le procureur de la République, selon les cas, à s'opposer à la célébration d'une union qui serait valable selon la loi étrangère, ou à autoriser une union que cette loi prohiberait. Ainsi, lorsque l'application de la loi étrangère conduirait à la célébration d'un mariage prohibé par le droit français, l'officier de l'état civil ne peut procéder à cette célébration. C'est notamment le cas lorsque la loi étrangère autorise la polygamie et que le futur époux étranger se trouve déjà engagé par une précédente union non dissoute. Dans une telle hypothèse, la célébration du mariage se heurte aux dispositions de l'article 147 du code civil, qui prohibe la conclusion des mariages polygames sur le territoire français quelle que soit la nationalité des époux. Au contraire, lorsque la loi étrangère prévoit des empêchements au mariage qui n'existent pas en droit français, l'officier de l'état civil peut passer outre et célébrer le mariage, dès lors que les conditions exigées par la loi française sont remplies et que les futurs époux persistent dans leur projet matrimonial. Il en va ainsi, par exemple, lorsque la loi de l'État étranger prohibe l'union de son ressortissant avec un conjoint de confession différente, alors que le principe de laïcité du mariage applicable en droit français exclut toute discrimination relative à la religion. Dans un tel cas, l'officier de l'état civil doit toutefois informer préalablement les futurs époux que leur union risque de ne pas être reconnue à l'étranger dans la mesure où il existe un empêchement au mariage au regard de la loi étrangère. Cet avertissement, établi par écrit, doit être conservé au dossier de mariage.
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