Texte de la QUESTION :
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M. François Grosdidier appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le droit à un recours collectif des victimes de l'amiante en France. Après une enquête de la Cour des comptes d'avril dernier, les recours en reconnaissance pour faute inexcusable des employeurs (reconnue systématiquement par les tribunaux) sont en perpétuelle augmentation alors qu'il y en a déjà eu 2 500 en 2004. D'une part, la passivité coupable des médecins du travail et de l'inspection du travail ne doit pas être laissée impunie. D'autre part, le CPA (Comité permanent amiante), qui rassemblait des représentants des ministères et des industriels, aurait influencé l'État entre 1982 et 1995. Il aurait exploité les incertitudes sur les effets de l'amiante en retardant au maximum l'interdiction de son usage en affirmant qu'il était possible d'utiliser de l'amiante si l'on prenait les mesures de sécurité suffisantes. Le lobbying de l'industrie de l'amiante sur les institutions publiques via le CPA a constitué une stratégie mûrement construite et refléchie. Pour réussir, cette stratégie a bénéficié de soutiens directs au sein des institutions publiques, en premier lieu l'INRS (Institut national de recherche et de sécurité). L'INRS voit donc sa responsabilité lourdement engagée dans l'affaire de l'amiante et il n'a toujours pas été réformé. Comme association 1901, il reste sous influence des employeurs, qui représentent la moitié du conseil d'administration. Il est indéniable que toutes les morts ou presque étaient évitables et que, par-delà les responsabilités individuelles, c'est en fait un système qui est responsable. À l'instar de l'affaire du sang contaminé, dont le procès avait apporté une réelle pédagogie en remettant à plat le système de veille sanitaire et d'alerte, le procès pénal de l'amiante devrait constituer une seule et même procédure qui regrouperait l'ensemble des plaintes des victimes de l'amiante, afin de soulever la responsabilité totale de l'État. Il lui demande les dispositions - ô combien opportunes ! - qu'il envisage de mettre en oeuvre afin de répondre à l'attente des victimes.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il mesure la souffrance des victimes de l'exposition à l'amiante et qu'il partage sa légitime préoccupation de voir les procédures judiciaires engagées à la suite de cette exposition être traitées avec toute l'efficacité et toute la célérité requises. À cette fin et dans un souci de bonne administration de la justice, une circulaire a été adressée le 12 mai 2005 aux procureurs généraux pour que ces affaires particulièrement complexes soient regroupées dans des juridictions disposant de moyens spécifiques et de magistrats spécialisés. À la suite de cette circulaire, les procédures ont été transmises aux pôles de santé de Paris ou de Marseille. À ce jour, soixante et onze affaires sont ainsi suivies à Paris et cinq dossiers à Marseille. Si un tel regroupement a été décidé, il n'est en revanche pas envisageable de joindre l'ensemble des dossiers actuellement suivis en matière d'amiante en une seule procédure. En effet, si la substance incriminée est la même, les affaires sont totalement distinctes au regard de la diversité des types d'expositions, des périodes des faits, des sites concernés et de l'état d'avancement des dossiers. Aussi, le regroupement de tous les dossiers en une même affaire aurait un effet inverse à celui recherché et risquerait de retarder l'issue des procédures, ne répondant ainsi pas aux souhaits des victimes.
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