Texte de la QUESTION :
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M. Bruno Bourg-Broc souligne auprès de M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes l'intérêt du récent rapport remis à la chambre de commerce et d'industrie de Paris, proposant une remise à plat de la formation professionnelle, puisque, selon ce rapport, en dépit des 23 milliards de dépenses en 2005 en actions de formation professionnelle, celles-ci n'ont « dans la plupart des cas, aucun impact avéré sur les parcours professionnels ». Il lui demande la suite réservée à la proposition tendant à réorienter les dépenses vers des publics ciblés. Il serait préférable que les dépenses publiques pour la formation professionnelle continue soient « réorientées ou concentrées sur des programmes ciblés, de longue durée, en faveur des demandeurs d'emploi ou des salariés dont les niveaux de formation sont faibles ».
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Texte de la REPONSE :
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L'une des propositions avancées par le rapport cité en référence est en effet de réorienter les dépenses publiques de formation professionnelle vers des publics ciblés. Les dépenses publiques de formation professionnelle sont d'ores et déjà pour l'essentiel concentrées sur les groupes d'actifs qui rencontrent les plus grandes difficultés à trouver ou retrouver un emploi : jeunes de faible niveau de qualification, adultes au chômage de longue durée, personnes handicapées ou en difficultés particulière d'insertion professionnelle. En outre, ce ciblage ne résulte pas d'une réorientation récente, mais constitue une caractéristique constante des actions de formation financées par les collectivités publiques depuis la montée du chômage amorcée après le premier choc pétrolier. Dès ce moment, en effet, les politiques publiques de formation professionnelle se sont pour l'essentiel développées en direction de deux groupes prioritaires : les jeunes sortis de formation initiale sans diplôme ni qualification (niveaux VI et V bis) et les adultes au chômage depuis plus d'un an. Le nombre annuel de demandeurs d'emploi ayant suivi un stage de formation professionnelle était voisin de 100 000 à la fin des années 1970. Il a dépassé 700 000 en 2004, la moitié des actions étant alors financées par les régions, un tiers par l'État et 8 % par le régime d'assurance chômage (la part de l'État étant vouée à se réduire fortement avec la décentralisation complète intervenue en 2004). Au sein de cet ensemble, près de 40 % des stagiaires étaient des jeunes (moins de 26 ans) peu qualifiés. Le réseau d'accueil (missions locales et PAIO) chargé d'orienter ces derniers vers une formation professionnelle complémentaire, en vue de leur accès à l'emploi, concentre depuis l'origine ses efforts sur cette catégorie. 43 % des jeunes qu'il a accueillis en 2004 étaient des non diplômés de niveau V (fin d'études secondaires courtes) et 72 % non bacheliers. De même, parmi les quelques 310 000 jeunes entrés en CIVIS depuis 2005, plus de 180 000 n'avaient pas atteint ce dernier niveau. Aux stages de formation professionnelle organisés en leur faveur s'ajoutent les contrats de formation en alternance (professionnalisation et apprentissage), au financement desquels les régions et l'État prennent une large part (près de 80 % du total) et qui s'adressent également en priorité aux moins qualifiés d'entre eux. En 2004, 45 % des 250 000 nouveaux apprentis avaient un niveau inférieur à V et un tiers le niveau V. Le contrat de professionnalisation, qui a succédé depuis 2004 au contrat de qualification, vise un public en moyenne plus qualifié. Néanmoins parmi les 50 000 premiers bénéficiaires de moins de 26 ans enregistrés en 2006, les deux tiers avaient atteint au plus le niveau IV (fin d'études secondaires longues), et plus du tiers ne dépassaient pas le niveau V. La grande majorité des demandeurs d'emploi adultes accueillis en stage sont pour leur part au chômage de longue durée, ou connaissent d'autres difficultés d'accès à l'emploi (handicap en particulier). Plus du tiers des adultes accueillis dans un stage financé par l'État (hors agents publics) étaient en 2004 demandeurs d'emploi ; la proportion dépassait les deux tiers pour les actions financées par les conseils régionaux. Au total, et tous financeurs confondus, 38 % des bénéficiaires de formation sont des jeunes entrant sur le marché du travail ou des demandeurs d'emploi adultes, proportion très supérieure à la part de ces deux groupes dans le total des actifs. On estime ainsi qu'aujourd'hui environ un jeune non qualifié sur deux accède chaque année à la formation professionnelle grâce aux programmes publics, de même qu'un chômeur adulte sur cinq. C'est dire que l'effort public de formation professionnelle continue est d'ores et déjà largement ciblé sur ces deux groupes prioritaires. En outre, beaucoup des éléments de la réforme en cours du service public de l'emploi et de ses interventions vont dans le même sens. Le développement progressif d'un dispositif de suivi systématique et personnalisé des demandeurs d'emploi, qui prend aujourd'hui la forme du « projet personnalisé d'accès à l'emploi » (PPAE), défini dès leur inscription sur la base d'un diagnostic individualisé porté sur leur distance à l'emploi (profilage), a précisément pour objectif de mieux cibler les prestations (bilan, orientation, formation, aide à l'embauche) et de les adapter au plus près des profils et des besoins individuels. Prévues par la convention tripartite signée le 5 mai 2006 par l'État, l'ANPE et le régime d'assurance chômage, la mise en place des guichets uniques ANPE-UNEDIC, et la mise en oeuvre d'un dossier unique du demandeur d'emploi, appuyé sur un système d'information unifié, vont dans le même sens. Plutôt qu'une priorité systématique aux formations les plus longues, le choix du gouvernement a consisté de ce point de vue à renforcer les moyens consacrés à l'accompagnement individuel des demandeurs d'emploi (réforme du service public de l'emploi) et à l'élaboration du parcours individualisé de formation (diagnostic, orientation et prescription dans le cadre du service intégré entre l'ANPE et l'AFPA). Quant à la commande de formations et l'évaluation de leur qualité, elle dépend désormais pour l'essentiel des régions, auxquelles la loi relative aux libertés locales de mai 2004 a confié la responsabilité complète de la formation professionnelle des demandeurs d'emploi, dans le cadre des plans régionaux de développement de la formation. En tant qu'acteur public de proximité, en charge du développement économique, la collectivité régionale est en effet la mieux désignée pour renforcer la liaison formation/emploi à l'échelle des territoires, en y associant les organismes professionnels.
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