FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1085  de  M.   Ayrault Jean-Marc ( Socialiste - Loire-Atlantique ) QG
Ministère interrogé :  affaires sociales, travail et solidarité
Ministère attributaire :  affaires sociales, travail et solidarité
Question publiée au JO le :  21/01/2004  page : 
Réponse publiée au JO le :  21/01/2004  page :  567
Rubrique :  politique sociale
Tête d'analyse :  application
Analyse :  bilan et perspectives
DEBAT :

POLITIQUE SOCIALE DU GOUVERNEMENT

    M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, vous avez récemment justifié votre politique en déclarant vouloir faire du « social durable ». A l'heure où licenciements, chômage et précarité installent la souffrance sociale chez tant de Français (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), des éclaircissements s'imposent. Et, mes chers collègues, l'Assemblée nationale est bien le lieu où doivent se confronter les analyses et les solutions à apporter à notre pays.
    Monsieur le Premier ministre, qu'est-ce que le « social durable » quand les Restos du coeur annoncent qu'ils vont devoir servir trois millions de repas supplémentaires, parce que vous avez privé des milliers de chômeurs de leurs allocations ?
    Qu'est-ce que le « social durable » quand votre loi sur l'emploi prévoit d'assouplir les licenciements et se propose de légaliser la précarité en instaurant un nouveau contrat de travail dit « contrat de projet » ?
    Qu'est-ce que le « social durable » quand les personnels hospitaliers sont obligés de faire grève pour obtenir des postes ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Luc Reitzer. La faute à qui ?
    M. Jean-Marc Ayrault. Qu'est-ce que le « social durable » quand les chercheurs sont obligés de menacer de démissionner pour arracher des crédits ?
    M. Patrick Ollier. Caricature !
    M. Jean-Marc Ayrault. Qu'est-ce que le « social durable » quand les assurés sociaux sont sommés de rembourser votre déficit cumulé de la sécurité sociale de 40 milliards d'euros ?
    M. Lucien Degauchy. Qui est responsable ?
    M. Jean-Marc Ayrault. La liste est longue des inégalités que vous avez créées. Je ne retiendrai que la hausse des taxes et des impôts locaux, la diminution des allocations logement.
    Monsieur le Premier ministre, une politique sociale, cela ne consiste pas à payer de mots les Français ni à les noyer sous la compassion. Le désarroi de notre pays, que nous entendons ces jours-ci de plus en plus fort, vient de l'érosion continue de notre pacte social et de notre modèle social républicain, que vous alignez, sans jamais l'avouer, sur les normes a minima des Anglo-Saxons. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Francis Delattre. C'est vous le Saxon !
    M. Jean-Marc Ayrault. Vous avez le droit de croire que telle est la voie du salut. Mais, alors, ne vous faites pas passer pour le bienfaiteur des pauvres et des sans-grade !
    M. Richard Mallié. La question !
    M. Jean-Marc Ayrault. Assumez vos choix pour permettre aux Français de se prononcer dans quelques semaines en toute clarté. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Monsieur le Premier ministre, vous ne faites pas du « social durable » : vous inventez le « social jetable » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Hollande. Où est le Premier ministre ?
    M. le président. Ecoutez M. Fillon.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président Ayrault, vous avez raison : il y a une différence entre la politique sociale irresponsable que vous avez menée (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe socialiste) et qui vous a conduits à un échec électoral historique et les efforts que déploie le Gouvernement pour adapter notre modèle social aux réalités du monde d'aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Hollande. Dites plutôt pour l'abaisser !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous n'avons aucune leçon à recevoir (« Oh si ! » sur les bancs du groupe socialiste) de ceux qui n'ont trouvé comme réponse à la mondialisation que la réduction du temps de travail et le recours massif aux emplois précaires dans la fonction publique, au prix, d'ailleurs, d'un effort démesuré pour les finances publiques de notre pays. (Protestations et claquements de pupitres sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Nous n'avons pas de leçon à recevoir de ceux qui ont été incapables de réduire la pauvreté alors qu'ils bénéficiaient d'une croissance exceptionnelle (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
    M. Richard Mallié. Eh oui !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... n'ont pas su régler le problème des retraites, ont fait supporter à la sécurité sociale le coût des allégements de charges sur les entreprises, ont gelé les salaires des plus modestes et fait exploser le SMIC. (Mêmes mouvements.)
    Nous n'avons aucune leçon à recevoir...
    M. François Hollande. Si, vous en avez !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... de la part de ceux qui ont échoué à réformer la formation professionnelle et ont ignoré le dialogue social. (Mêmes mouvements.)
    Ne vous en déplaise, monsieur Ayrault, la politique courageuse que conduit le Gouvernement a permis à notre pays de retrouver la croissance. Pour la première fois depuis 2001, le chômage a légèrement baissé en novembre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Non ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Roland Chassain. Ils sont jaloux ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'objectif d'une croissance autour de 2 % est aujourd'hui considéré par tous comme atteignable. C'est dans cette perspective que nous allons préparer, avec les partenaires sociaux, la loi de mobilisation sur l'emploi. Cette loi, loin d'accroître la précarité, visera, au contraire, à sécuriser les trajectoires professionnelles.
    Sur ce sujet, il y a beaucoup à faire. Dois-je rappeler qu'entre 1997 et 2002 le recours à l'intérim a doublé dans notre pays, que vous avez assisté à l'augmentation des contrats à durée déterminée sans traumatisme apparent et que les emplois-jeunes, symboles de votre politique de l'emploi éphémère, étaient des contrats de cinq ans ?
    M. François Hollande. Votre symbole à vous, c'est le chômage !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le symbole de la politique sociale durable que nous conduisons, ce sont les contrats-jeunes en entreprise, qui sont des contrats à durée indéterminée. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

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