Texte de la REPONSE :
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NOMBRE D'ACTES RACISTES COMMIS EN CORSE M. le
président. La parole est à M. Simon Renucci, pour exposer sa question,
n° 1106. M. Simon
Renucci. Le 15 novembre dernier, j'écrivais au ministre de l'intérieur,
étonné et choqué par l'accumulation des commentaires des médias à propos du
nombre d'actes racistes commis en Corse. Prétendant rapporter des propos
d'origine gouvernementale, les médias affirmaient que la moitié des actes
racistes perpétrés en France avaient lieu en Corse, alors que pour nous, un seul
acte raciste est toujours de trop. Cette stigmatisation, vous le comprendrez,
madame la ministre déléguée à l'intérieur, a choqué de nombreux habitants de
l'île, atteints dans leur dignité. Au cours du second
semestre de l'année dernière, des actes racistes revendiqués ont été, c'est
vrai, perpétrés en Corse. Comme tous les habitants de l'île, je les ai
condamnés. Un groupuscule a été démantelé, des individus ont été arrêtés,
ignorant l'histoire d'une terre qui a su protéger des populations ailleurs
pourchassées, par exemple pendant la seconde guerre mondiale. Dans leur immense
majorité les Corses continuent de faire vivre au quotidien ces valeurs de
fraternité et d'hospitalité. Avec leurs élus, ils restent particulièrement
sensibles à cette question et ne manquent jamais de manifester leur indignation
quand de tels actes sont commis. Ainsi le 23 octobre
dernier, précédant celles du continent, de nombreuses manifestations ont été
organisées sur l'île pour exprimer le refus de toute forme de racisme. Par mon
intermédiaire, Ajaccio a été l'une des premières villes à s'engager par des
manifestations citoyennes au cours de l'année 2004 et à signer la charte de la
fraternité. Expérience inédite en France, à la fin de l'année dernière, à
l'initiative de M. le préfet de Corse et de certains élus, toute la Corse s'est
mobilisée pour une semaine de la fraternité avec, pour fil rouge, une campagne
de sensibilisation dans la totalité des cinquante-trois collèges et lycées de
l'île. Par ailleurs, des initiatives associatives,
publiques et privées, témoignent partout de l'attachement des Corses aux valeurs
d'égalité, de fraternité, d'hospitalité mais aussi de laïcité. Tout cela, vous
en conviendrez, explique bien le sentiment d'incompréhension de nos concitoyens
qui se sentent injustement stigmatisés. Notre vigilance est permanente. Le comité interministériel de lutte contre le racisme et
l'antisémitisme du 17 janvier dernier l'a bien montré : c'est dans toute la
France que le nombre d'actes racistes et antisémites a atteint un niveau élevé,
trop élevé, au cours de l'année 2004. Je vous remercie, madame la ministre, de
me faire connaître les chiffres précis et votre position concernant cette
question qui nous tient particulièrement à coeur. M. le président. La
parole est à Mme la ministre déléguée à l'intérieur. Mme Marie-Josée Roig,
ministre déléguée à l'intérieur. Monsieur le député,
votre question porte sur le sujet ô combien sensible et douloureux de la
recrudescence des actes à caractère antisémite et raciste sur le territoire
national, notamment en Corse. Je tiens tout d'abord à rappeler que le ministre
de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a fait de
cette question l'un de ses six chantiers prioritaires, dont l'étude a été
confiée à M. Jean-Christophe Rufin. La Corse connaît,
depuis les années soixante-dix, une violence de forte intensité, d'inspiration
nationaliste mais aussi de droit commun, la frontière entre ces deux mobiles
étant parfois difficile à établir, comme l'ont montré certaines enquêtes
judiciaires. Bien que les crimes et délits constatés en
région Corse par les services de police et les unités de gendarmerie aient
enregistré une baisse de 10,04 % au cours de l'année 2004, il est
malheureusement exact que les actions menées contre la communauté maghrébine
progressent. En 2004, 116 actes à caractère raciste ou xénophobe - attentats à
l'explosif, incendies criminels, dégradations importantes, violences
volontaires, menaces -, dont 92 dirigés contre la communauté maghrébine, ont été
perpétrés en Corse. Au cours de cette même période, l'ensemble des actions
racistes ou xénophobes commises sur le territoire métropolitain s'est élevé à
596, dont 436 ont visé la communauté maghrébine. Voilà pour les chiffres que
vous me demandiez, monsieur le député. Les sources de
cette hostilité, qui touche les communautés d'origine étrangère d'une manière
générale et celles originaires du Maghreb en particulier, restent parfois
difficiles à cerner : règlements de comptes, rivalités associatives, lutte
contre le trafic de drogue, vengeance privée, racket, violence politique
nationaliste. Toutefois, quelles que soient leurs motivations, ceux qui
commettent ces actes doivent compter sur une ferme détermination des pouvoirs
publics. En tout cas je peux vous assurer que le ministère de l'intérieur est
mobilisé tant sur le terrain de la prévention du racisme et de la xénophobie,
que sur celui de la lutte contre toutes ses manifestations, pour
l'identification et l'interpellation des auteurs. Ainsi,
dans le cadre d'une vaste enquête relative à six attentats par explosif à
caractère raciste, perpétrés depuis le 19 mars 2004 en Haute-Corse par le groupe
terroriste Clandestini Corsi, les services de la police judiciaire ont procédé,
depuis le 15 novembre 2004, à l'interpellation de vingt-sept personnes : treize
d'entre elles sont écrouées et deux sont placées sous contrôle judiciaire. D'autres enquêtes ont conduit à l'interpellation, par les
services de sécurité, depuis le début de l'année 2005, des auteurs des
dégradations commises au mois de décembre 2004 contre les véhicules de
Maghrébins et le local de l'association Union des Marocains de Balagne à
Île-Rousse. Plusieurs mineurs, dont certains très jeunes, ont été mis en cause
dans le cadre de ces affaires. Le 15 janvier 2004, à
Porto-Vecchio, les gendarmes ont interpellé l'auteur de dégradations
volontaires, commises à l'aide d'un objet contondant, sur huit véhicules
appartenant à des personnes d'origine étrangère. Par
ailleurs, pour favoriser une meilleure réponse pénale, la loi du 3 février 2003
visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste,
antisémite ou xénophobe, a créé une nouvelle circonstance aggravante lorsque
l'infraction s'accompagne de propos ou d'actes portant atteinte à l'honneur ou à
la considération de la victime en raison de son origine, sa race ou sa
religion. Comme vous pouvez le constater, notre
détermination est totale en la matière. J'ajoute que ce combat doit être
poursuivi avec l'engagement de tous : autorités de l'État, mais aussi élus et
population locale. Je sais d'ailleurs votre implication dans cette lutte,
monsieur le député.
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