Texte de la QUESTION :
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M. André Chassaigne appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le principe de la continuité de l'exécution d'une peine. En l'espèce, il souhaite lui soumettre le cas d'un détenu qui a été condamné à onze années de réclusion en Suisse, où il a commencé de purger cette peine, mais qui a été remis temporairement à la France près de trois années plus tard, en exécution de l'article 19-2° de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 pour y être jugé pour d'autres faits. Il a alors été condamné à vingt années de réclusion criminelle. Ce détenu est à nouveau remis aux autorités suisses pour poursuivre l'exécution de sa peine en Suisse, et il est ensuite transféré en France pour y exécuter la peine prononcée en France. La mise en exécution de la peine prononcée en France, suivie d'une prise de conscience de l'erreur et d'un retour en Suisse, a conduit l'intéressé à songer à demander une forme de confusion entre les peines française et suisse, fondée sur le principe, ancien, de la continuité de l'exécution des sentences pénales. Pour lui, la peine mise à exécution en France n'avait pu s'interrompre à compter de son renvoi en Suisse, et il avait en même temps poursuivi l'exécution de la peine française. L'article 716-4 du code de procédure pénale dispose certes que la période de détention exécutée hors de France est prise en compte dans la durée de la peine à exécuter en application d'une peine française lorsqu'elle résulte d'une extradition. Cependant, le cas présent ne répond pas aux prévisions de ce texte : il y a eu extradition de l'étranger vers la France et non le contraire. Il s'agissait d'un retour vers le pays requérant, la Suisse, et non d'une nouvelle extradition. Les juges n'ont donc pas tenu compte de ce principe, refusant la confusion des peines. Cependant, ce cas nous conduit à réfléchir sur une possible modification de la loi : alors qu'en droit français les peines criminelles sont obligatoirement confondues (art. 132-5 du code pénal), afin de faire échec à des durées de détention inhumaines et contre-productives en termes de prévention de la récidive, la présente décision conduit au contraire à une addition : l'intéressé devra purger vingt années après avoir exécuté onze autres années. Dans une situation voisine, celle où une personne condamnée à l'étranger vient purger sa peine en France, notre droit interne s'arroge le droit d'adapter celle-ci, si elle est excessive au regard de nos propres repères juridiques et culturels (art. 728-4 du code de procédure pénal). C'est pourquoi il l'interroge sur l'opportunité d'une réforme de la loi pour une uniformité d'application de la confusion des peines.
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