Texte de la QUESTION :
|
M. Jean-Pierre Blazy attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur le projet du troisième réseau aéroportuaire annoncé par le Gouvernement à l'occasion du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 18 décembre 2003. Suite à l'abandon du troisième aéroport parisien à Chaulnes confirmé par les conclusions de la mission parlementaire Gonnot en juillet 2003, il annonçait la mise en place d'un troisième réseau aéroportuaire dans le grand bassin parisien. Il devait s'organiser autour de Beauvais, Vatry et Châteauroux. Ce réseau de plates-formes moyennes, existantes ou à créer, permettrait d'assurer la desserte équilibrée du territoire national et notamment le desserrement du trafic fret de l'aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle. Aujourd'hui, force est de constater que ce troisième réseau aéroportuaire n'est qu'un effet d'annonce. Il reste purement virtuel. Par ailleurs, même si quelques vols de nuit ont été supprimés à Roissy - Charles-de-Gaulle, le problème reste entier. Cet aéroport est le plus nuisant en Europe avec 160 mouvements par nuit entre 22 heures et 6 heures, loin devant ses concurrents. Pourtant, des solutions existent. Si l'on prend l'exemple de Francfort, le gestionnaire de l'aéroport a négocié en concertation avec les élus et les populations riveraines le développement de l'aéroport contre l'instauration d'un couvre-feu total la nuit. Le trafic de nuit sera transféré sur l'ancienne base militaire de Hahn située à 120 kilomètres. En France, la plate-forme de Vatry dans la Marne est immédiatement opérationnelle pour accueillir le trafic fret de Charles-de-Gaulle qui connaît une croissance forte (+ 6 % en 2003 avec 1 723 600 tonnes transportées). L'enjeu est de vanter les atouts de Vatry auprès de grands intégrateurs implantés sur le territoire national tel que Fédéral Express. Un transfert de ses activités permettrait d'instaurer à terme une plage de silence total entre minuit et 5 heures à Roissy - Charles-de-Gaulle. Il lui demande d'évaluer l'impact réel des mesures annoncées sur la nuit à Roissy - Charles-de-Gaulle entre 0 heure et 5 heures mais aussi entre 22 heures et 0 heure et entre 5 heures et 6 heures. D'autre part, il souhaite que soit précisé le calendrier de mise en place du troisième réseau aéroportuaire dans le grand bassin parisien.
|
Texte de la REPONSE :
|
PERSPECTIVES DES INFRASTRUCTURES
AEROPORTUAIRES PARISIENNES M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre
Blazy, pour exposer sa question, n° 1134, relative aux perspectives des
infrastructures aéroportuaires parisiennes. M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le secrétaire
d'État à l'aménagement du territoire, lors de l'examen récent du projet de loi
relatif aux aéroports, j'ai eu l'occasion d'interpeller le Gouvernement sur la
politique aéroportuaire qu'il mène depuis l'abandon du projet de troisième
aéroport parisien à Chaulnes, initié par le précédent gouvernement. Je souhaite
vous interroger à nouveau sur la mise en place du troisième réseau aéroportuaire
dans le grand bassin parisien, annoncée lors du comité interministériel
d'aménagement et de développement du territoire du 18 décembre 2003,
c'est-à-dire il y a presque un an et demi. Il devait s'organiser autour
d'aéroports tels que Beauvais, Vatry - que M. le président connaît bien - et
Châteauroux afin de permettre, entre autres, le desserrement du trafic de fret
de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. Je constate
aujourd'hui que ce troisième réseau reste virtuel et se limite à un effet
d'annonce. Pourtant, il pourrait constituer une alternative à court terme aux
nuisances générées par les aéroports parisiens. Je pense notamment aux vols de
nuit de Roissy-Charles-de-Gaulle, où les restrictions prises entre minuit et
cinq heures ont certes conduit à la suppression de quelques vols mais restent
insuffisantes au regard des 160 vols qui sont enregistrés chaque nuit, d'autant
que l'on assiste à des reports avant et après cet intervalle de temps. Il apparaît donc que la politique aéroportuaire du
Gouvernement repose toujours sur le choix de l'hypertrophie parisienne, si bien
que Roissy-Charles-de-Gaulle reste, de nuit, l'aéroport européen le plus
nuisant. Des solutions existent, mais force est de constater qu'aucune politique
raisonnée d'aménagement du territoire, favorisant une intermodalité active entre
Vatry, Beauvais et Châteauroux, les réseaux ferrés à grande vitesse et les
réseaux routiers, n'a été véritablement engagée. La mise en oeuvre de ce
troisième réseau aéroportuaire n'a fait l'objet d'aucun calendrier précis. On ne
peut se satisfaire des progrès du trafic de fret sur Vatry : à peine 20 000
tonnes, contre 1 742 000 tonnes à Roissy, ce qui représente une croissance de
9,5 % en 2004. En 2003, le rapport d'information
parlementaire sur l'avenir de la politique aéroportuaire à l'horizon 2020
jugeait la situation francilienne " dramatique " et " explosive ", et demandait
à juste titre un plafond absolu de développement de l'aéroport de Roissy. Qu'en
est-il aujourd'hui ? La révision du plan d'exposition au bruit a pris du retard
et il conviendrait de formuler enfin des hypothèses sur le trafic aérien à moyen
et à long terme. En 2004, Roissy a enregistré exactement 526 707 mouvements :
c'est insupportable pour les 2,65 millions d'habitants franciliens qui sont,
selon un rapport de l'ACNUSA, survolés par les avions décollant de Roissy. Pouvez-vous nous préciser, monsieur le secrétaire d'État,
le calendrier - s'il existe - de la mise en oeuvre de ce troisième réseau
aéroportuaire dans le grand bassin parisien ? Quel sera le rôle de Vatry ? Et
quelles sont les hypothèses retenues pour le trafic à Roissy dans le cadre de la
révision du plan d'exposition au bruit ? M. le président. La parole est à M. le secrétaire
d'État à l'aménagement du territoire. M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'État à l'aménagement du territoire. Je
vous prie tout d'abord, monsieur le député du Val-d'Oise, de bien vouloir
excuser Gilles de Robien, qui n'a pu se rendre ce matin à l'Assemblée et m'a
demandé de vous répondre. Dès son arrivée au
Gouvernement, M. de Robien s'est attaché en priorité à la réduction de la gêne
sonore nocturne autour de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. Le trafic entre
minuit et cinq heures connaissait alors une croissance de plus de 11 % par an
depuis cinq ans, atteignant 26 000 mouvements en 2001. Grâce aux efforts
conjugués d'Air France et de La Poste et aux limitations quel le ministre a
mises en oeuvre, ce nombre a pu être abaissé à 21 400 en 2004. La tendance
passée a été totalement inversée et un processus de décroissance a été instauré
pour les années à venir. Les appareils produisant des bruits émergents, les plus
perturbateurs du sommeil, ont été interdits depuis le 1er avril 2004. Le trafic entre vingt-deux heures et six heures s'est élevé
à 54 600 mouvements en 2004, ce qui représente une légère baisse par rapport à
2003. Ceci résulte notamment de l'effet fortement incitatif des taux de la taxe
sur les nuisances sonores aériennes, qui ont été relevés pour la période
nocturne. Conjuguée à une suppression effective des avions les plus bruyants la
nuit, cette relative stabilité du trafic se traduit par une réduction objective
des nuisances sonores. Conjointement à la limitation de
l'activité nocturne de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, le Gouvernement
entend promouvoir une desserte aéroportuaire équilibrée du territoire national,
s'appuyant sur le réseau des grands aéroports régionaux et sur le troisième
réseau de plates-formes de taille moyenne ou spécialisées telles que
Châlons-Vatry ou Beauvais. Le redéploiement du trafic aérien sur ces aéroports
dépend étroitement des caractéristiques du marché, des stratégies des compagnies
aériennes. Il s'inscrit dans le long terme. Les actions possibles des pouvoirs
publics, dans le respect du droit de la concurrence, sont essentiellement
d'ordre incitatif. Ainsi le gouvernement français offre-t-il systématiquement,
lors de la négociation des accords aériens bilatéraux, la possibilité pour les
transporteurs du pays partenaire d'accéder à des aéroports régionaux français.
Les efforts portent également sur l'amélioration des dessertes terrestres de ces
plateformes. Les aéroports régionaux accueillent depuis plusieurs années un
trafic international de plus en plus important. Durant les quatre dernières
années, le trafic entre ces aéroports et l'Union européenne a ainsi augmenté de
plus de 20 %. Sur Châlons-Vatry, le trafic de fret a
doublé par rapport à l'an passé et a été multiplié par dix depuis 2001. M. Jean-Pierre Blazy.
Mais il ne représente que 20 000 tonnes ! M. le secrétaire d'État à l'aménagement du
territoire. Le chiffre est faible, certes, mais l'aéroport présente
indéniablement des réserves de développement et la capacité actuelle, évaluée à
60 000 tonnes de fret par an, pourrait être étendue. Les discussions très
avancées menées l'an dernier avec un grand opérateur international de fret qui
voulait implanter son hub européen ont mis en
évidence les atouts de cette plate-forme, qui s'est retrouvée parmi les deux
sites finalistes. En outre, le trafic de passagers s'est accru avec la mise en
service d'une nouvelle aérogare. D'une manière générale, les perspectives de
développement de cet aéroport sont très dépendantes de l'amélioration - qui est
engagée - de son accessibilité terrestre. De son côté,
l'aéroport de Beauvais contribue activement à la desserte aérienne du grand
bassin parisien : son trafic a enregistré une croissance tout à fait
exceptionnelle de 40 % par an en moyenne au cours de ces dernières années. Cet
aéroport est essentiellement desservi par des compagnies à bas coûts. Ryanair
est à l'origine de 90 % de son activité. La stratégie de développement de cette
compagnie, largement affirmée par ses responsables, laisse à penser que le rôle
de cet aéroport sera conforté. Le troisième réseau
aéroportuaire n'est donc en rien un effet d'annonce : c'est une démarche
pragmatique et progressive, et les chiffres sont là pour le montrer. Nous ne
pouvons que souhaiter que cette tendance se poursuive et s'amplifie. M. le président. La
parole est à M. Jean-Pierre Blazy. M. Jean-Pierre Blazy. Je m'attendais à votre
réponse, monsieur le secrétaire d'État. À propos de
Roissy, vous parlez de " relative stabilité " et de " légère baisse ", ce qui
illustre bien que les résultats attendus ne sont pas au rendez-vous. Alors que
le trafic aérien est en augmentation, il reste concentré sur Paris et même, la
nuit, sur Roissy, puisqu'Orly bénéficie d'un couvre-feu. Pour les riverains, les
restrictions imposées sur la période qui va de minuit à cinq heures,
c'est-à-dire le coeur de la nuit, sont insuffisantes, d'autant que les effets de
report dont j'ai parlé sont considérables : entre vingt-deux heures et minuit et
après cinq heures, le trafic est très important. Il y a donc encore beaucoup à
faire. De plus, la révision du plan d'exposition au
bruit tarde à venir. Le terme ayant été fixé au printemps 2006 et le processus
s'échelonnant sur dix-huit mois, vous êtes déjà hors délai. Il faut formuler à
cette occasion des hypothèses de trafic. M. le président. Le débat ne peut se poursuivre,
monsieur Blazy. Veuillez conclure. M. Jean-Pierre Blazy. Mais M. le secrétaire d'État
ne m'a pas répondu sur ce point, monsieur le président. En ce qui concerne le troisième réseau, il est exact que
Beauvais se développe, mais Vatry progresse très peu. Une politique beaucoup
plus volontariste est nécessaire pour obtenir des résultats. S'il convient de
tenir compte du marché, il faut surtout des incitations beaucoup plus fortes
pour que le troisième réseau aéroportuaire, de virtuel, devienne réel.
|