Texte de la QUESTION :
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Mme Christiane Taubira interroge M. le ministre des affaires étrangères sur la situation particulière de la Guyane confrontée à la présence d'une population de nationalité ou d'origine étrangère atteignant approximativement, pour autant que les institut statistiques puissent les mesurer, 40 % de la population si l'on inclut une estimation des personnes en situation irrégulière. Rappelant qu'elle avait soumis ces données et demandes à son prédécesseur et qu'elle l'avait lui-même sollicité, dès sa prise de fonction, elle lui redemande d'accorder une attention particulière et diligente à sa requête relative à l'ouverture d'une chancellerie pour la République du Guyana sous la forme d'un consulat, insistant sur l'importance d'une représentation diplomatique plutôt qu'un consulat honoraire, tel qu'il avait été envisagé par les services déconcentrés de l'Etat. En avril 2006, le policier Jean-Richard Robinson, père de deux petites filles, fonctionnaire dévoué, bien noté et déjà décoré malgré son jeune âge, décédait lors d'une interpellation de présumés criminels supposés impliqués dans des trafics. Onze ans plus tôt, le policier Serge Brown avait dans des circonstances comparables, payé de sa vie son dévouement professionnel. De multiples incidents impliquant délinquants et criminels et pénalisant des civils n'ont cessé de détériorer le cadre de vie urbain. Elle précise que la présence des dizaines de milliers d'étrangers n'est pat l'objet central de sa démarche. Les dimensions économiques, sociales voire culturelles de leur participation à la vie guyanaise relèvent d'autres responsabilités. L'histoire de la Guyane est parsemée de références rappelant les nombreuses conjonctures ayant conduit des personnes provenant de diverses régions du monde à tenter, sur cette terre hospitalière, de donner plus de lustre à leur vie. Les difficultés sont, généralement, le fait de carences imputables aux pouvoirs publics, qu'il s'agisse d'aménagement du territoire, de contrôle des personnes mais aussi des chantiers d'entreprises ou de la maîtrise des politiques publiques affectées par le surcroît de besoins économiques et sociaux. Ces précisions sont énoncées pour éviter tout malentendu. L'objet de la présente interpellation concerne les mesures efficaces à prendre pour contenir l'arrivée de personnes que les infrastructures ne permettent pas d'insérer dans des conditions acceptables ou de celles qui se rendent coupables de pratiques ou d'acte répréhensibles ou préjudiciables à la vie sociale ou à la préservation du patrimoine forestier et hydrographique. La gestion des eaux territoriales, tant du point de vue des activités halieutiques que du contrôle des trafics de stupéfiants, plaide également pour des dispositifs de coopération avec les pays voisins. La gestion exclusive de ces questions par le ministère de l'intérieur nourrit des préjugés, des raccourcis et des méthodes sans efficience du fait de la réalité physique d'un continent bordé par deux voies de communication, les fleuves Maroni et Oyapock, de plusieurs centaines de kilomètres, qui lui tiennent lieu de frontières. Les principales conséquences, déplorables, sont une aggravation de la défiance envers l'autre, différent ou étranger, une confusion de plus en plus fréquente entre cet autre et la source de tous les malheurs et de tous les désordres. Il n'est conforme ni à l'histoire ni à l'esprit guyanais de rejeter l'autre parce qu'il vient d'ailleurs, et il est peu propice à ses intérêts de voisinage à long terme que cette confusion et les désordres perdurent. Aussi, plutôt que de laisser confondre les infractions à la législation sur l'entrée et le séjour des étrangers avec des actes criminels, il revient au ministère des affaires étrangères de prendre sa part dans le rétablissement des conditions de convivialité qui passent par le retour de la sécurité et de la sauvegarde des écosystèmes. Afin que la délinquance et le crime demeurent une affaire de droit commun et ne devienne pas une question de nationalité. Très précisément, il s'agit : de la création d'un consulat pour ce qui concerne les personnes originaires du Guyana impliquées dans des délits ou crimes, ou simplement pour celles qui, dans le respect de la législation (dont l'application en Guyane obéit à des dérogations contestables au regard des principes du droit et de la déclaration universelle des droits de l'homme) font l'objet d'un arrêté d'expulsion. Des accords de coopération, entre pays qui oeuvrent ensemble, sur un plan, bilatéral, régional (AEC) ou multilatéral (UE/ACP) pour le respect du droit international, permettraient de réguler les flux migratoires ; de l'instauration de discussions avec les autorités fédérales brésiliennes (l'Itamarati à Brasilia) pour ce qui concerne les milliers de garimpeiros (exploitants clandestins d'or) déversant dans les criques et fleuves du mercure dont l'usage a enfin été interdit, compte tenu des lourdes conséquences sur la santé publique. Ces questions ne peuvent continuer à être traitées à l'échelle locale, entre le préfet et son homologue, le gouverneur d'État voisin, de l'Amapa ou du Para. La République du Venezuela a su entreprendre, au début des années 90, des négociations avec la République du Brésil pour conjuguer leurs efforts afin de mettre un terme aux incursions de garimpeiros et supprimer l'impact de leurs activités sur les modes de vies des habitants en conflit de territoire avec l'activité minière et sur l'environnement. Le Président de la République française a clairement exprimé son intention de créer au plus tard début 2007 le parc amazonien de Guyane dont le cadre juridique est défini par la loi 2006-436 du 14 avril 2006 et qui, physiquement, prolongera le parc brésilien Tumucutnaque. Cette initiative fera la dérision des instances internationales comme elle inspire le plus grand scepticisme à ceux qui sont soucieux de réelles mesures de préservation de la biodiversité. Elle lui demande quelles suites il entend réserver à ces requêtes qui appellent des mesures d'urgence et de durée.
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