FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 117952  de  Mme   Darciaux Claude ( Socialiste - Côte-d'Or ) QE
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  06/02/2007  page :  1162
Réponse publiée au JO le :  06/03/2007  page :  2364
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Colombie
Analyse :  droits de l'homme
Texte de la QUESTION : Mme Claude Darciaux alertée par le secours catholique, Caritas France, souhaite appeler l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur certaines recommandations exprimées par les membres du bureau international des droits de l'homme, action Colombie (OIDH-ACO) sur la situation de conflit armé et d'atteinte aux droits de l'homme en Colombie. Il apparaît que l'État colombien persiste à ne pas respecter l'essentiel des recommandations fondamentales prises, notamment, devant la commission des droits de l'homme des Nations unies. Si la France s'est positionnée à maintes reprises en faveur d'une solution politique négociée au conflit armé interne dans ce pays et a défendu les principes de vérité, justice et réparation, elle lui demande d'intervenir à nouveau auprès des autorités colombiennes, mais également d'encourager dans leur propre action les instances européennes. Sur la base des conclusions du Conseil de l'Union européenne du 3 octobre 2005, et de la déclaration du 26 juin 2006 de la Présidence de l'UE ; elle souhaite qu'il rappelle à cette dernière l'importance d'une stratégie de paix globale applicable à tous les acteurs armés. L'UE devrait, par exemple, oeuvrer pour garantir que sa politique de coopération et celle des États membres envers la Colombie continue à considérer la négociation comme unique solution viable au conflit interne. Les États membres devraient s'abstenir d'établir des politiques bilatérales qui offrent une aide militaire à ce pays, dans la mesure où ils ne peuvent garantir que cette aide ne contribue à alimenter les attaques contre la population civile. D'une manière générale, les politiques et accords bilatéraux nuisent à la cohérence d'une position commune européenne forte. Elle lui demande d'intercéder pour que l'UE continue à promouvoir la pleine mise en oeuvre de ses directives pour la protection des défenseurs des droits de l'homme en Colombie et soutienne l'établissement de dialogues constructifs entre le Gouvernement colombien et la société civile. De même, pour surmonter la crise humanitaire colombienne, elle lui demande de peser de son poids diplomatique pour promouvoir une perspective multilatérale concernant le rôle des Nations unies et des autres institutions de la communauté internationale.
Texte de la REPONSE : Le ministère des affaires étrangères, qui entretient un dialogue très suivi et régulier avec le département Amérique latine et Caraïbes de l'association du Secours catholique-Caritas France, suit avec une particulière attention la situation des droits de l'homme en Colombie, sous ses différents aspects. C'est le cas pour la loi « justice et paix », adoptée par le congrès colombien le 21 juin 2005 et promulguée par le président Alvaro Uribe le 25 juillet 2005 en vue de démobiliser les « groupes armés illégaux », qu'il s'agisse des paramilitaires ou des mouvements de guérilla. Cette loi a fait l'objet des conclusions adoptées par le conseil affaires générales (CAG) de l'Union européenne (UE) le 3 octobre 2005, qui a défini le cadre d'action de l'UE sur ce texte. Le conseil a ainsi pris note de différentes réserves, exprimées notamment par le haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCNUDH) : importance insuffisante accordée à la nécessité d'un démantèlement effectif des structures paramilitaires collectives, distinction floue entre les délits « politiques » et les autres types de délits, peu de temps disponible pour enquêter sur les aveux et sur les avoirs susceptibles de provenir d'activités illicites, possibilités réduites offertes aux victimes de demander réparation, peines maximales limitées pour les délits les plus graves, difficultés qu'éprouvera le système juridique colombien à répondre aux exigences de la nouvelle loi. Il a affirmé par ailleurs que la loi nécessite d'être mise en oeuvre de façon effective et transparente et a décidé d'apporter une coopération aux groupes de victimes pour appuyer la mise en oeuvre de la loi. C'est dans cette perspective précise qu'une aide d'1,5 MEUR a été mise en place par une décision de la Commission européenne en date du 19 décembre 2005 pour apporter, sous le contrôle de la délégation de l'UE en Colombie, un soutien aux communautés affectées par le conflit interne, aux groupes de victimes, aux activités locales de réconciliation, ainsi qu'à la démobilisation des enfants soldats. La cour constitutionnelle colombienne a, par sa décision du 18 mai 2006, apporté un certain nombre de précisions majeures pour l'application et la mise en oeuvre de la loi « justice et paix ». Si la cour a déclaré recevable l'article 3 de la loi, qui consacre le dispositif de la « peine alternative » (suspension des peines prononcées antérieurement au processus de démobilisation et remplacement par une peine, dite « alternative », d'une durée comprise entre cinq et huit ans de prison), elle a adopté des positions importantes en faveur de la protection des droits des victimes, et de leur conformité aux principes de vérité et de réparation. Cette décision de la cour constitutionnelle a apporté des changements notables à l'application de la loi. Elle a rapproché celle-ci des standards internationaux et, ainsi que l'a souligné notamment la commission colombienne des juristes, l'a rendue plus favorable aux victimes, en leur apportant une garantie renforcée en matière de vérité et de réparation. Suite à la proposition exprimée par la France lors du comité Amérique latine de l'UE (COLAT) du 6 juin 2006, la présidence de l'UE a souligné le principe d'un ferme soutien à apporter aux orientations définies par la cour constitutionnelle colombienne. Ces dernières serviront de cadre à l'évaluation future du processus engagé par la loi « justice et paix ». Concernant la situation de Mme Ingrid Betancourt, de Mme Clara Rojas et des otages en Colombie, la recherche de leur libération est une priorité constante de l'action du ministre des affaires étrangères. Sa forte implication est pleinement partagée par l'ensemble des autorités françaises, qui sont entièrement mobilisées sur cette question. Le président colombien Alvaro Uribe a confirmé le 21 décembre dernier qu'il donnait son accord à la reprise des contacts établis par la France, l'Espagne et la Suisse avec les FARC en vue de faciliter l'engagement des négociations visant à la conclusion d'un accord humanitaire. Soucieuse que les contacts nécessaires puissent se développer dans la plus grande discrétion, la France demeure convaincue qu'une solution pacifique est possible. Elle invite de façon constante tous les acteurs à renouer le fil du dialogue. Notre pays témoigne à chaque occasion sa pleine disponibilité pour accompagner la Colombie dans la recherche de chemins de paix, bénéficiant à l'ensemble de sa population. Enfin, conformément à la déclaration de la présidence de l'Union européenne en date du 26 juin 2006, la France appuie pleinement l'action conduite par le bureau du haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme en Colombie, dirigé par M. Juan-Pablo Corlazolli. Ce dernier joue un rôle majeur dans la promotion des droits de l'homme et du droit international humanitaire en Colombie. Dans la continuité de la déclaration de la présidence, des conclusions du conseil et des travaux du COLAT, la France porte, de façon permanente, une grande attention à la situation en Colombie, en étroite liaison avec la présidence de l'Union européenne.
SOC 12 REP_PUB Bourgogne O